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Liban - Subventions

Bkerké dénonce les dettes de l’État envers les écoles gratuites, les hôpitaux et les associations

Hariri débloque en urgence 5 milliards de LL pour empêcher la fermeture de l’école secondaire Khadija el-Koubra, relevant des Makassed.

Le patriarche maronite Béchara Raï présidant hier la rencontre extraordinaire à Bkerké. Photo ANI

L’été promet d’être chaud dans l’enseignement privé qui s’enlise dans la crise. Une crise qui est certes la conséquence de l’adoption de la loi 46 sur la grille des salaires, en août 2017. Mais pas seulement. Depuis quatre ans déjà, l’État n’a pas déboursé les subventions qu’il doit aux écoles caritatives (gratuites ou semi-gratuites) en vertu du décret 9298 du 12/10/1974, poussant certaines à la faillite, voire à la fermeture. Une situation qu’endurent également les hôpitaux et associations de bienfaisance qui peinent à poursuivre leur mission, à l’heure où l’État manque à ses obligations.

La dette aux écoles privées gratuites : 101 milliards et 50 millions de LL
Cette situation alarmante a fait l’objet d’une rencontre exceptionnelle hier à Bkerké, présidée par le patriarche maronite Béchara Raï. Une rencontre qui vient en réponse à l’appel des supérieurs généraux des ordres religieux, et à laquelle ont participé les évêques César Essayan et Hanna Rahmé, les supérieures et supérieurs des congrégations catholiques, et les députés représentant les différents blocs parlementaires. Étaient notamment présents les députés Ibrahim Kanaan (Liban fort), Antoine Habchi (La République forte), Hadi Hobeiche (courant du Futur), Farid Haykal el-Khazen (Coalition nationale), Élias Hankache (Kataëb), Albert Mansour (PSNS), Nicolas Nahas (centre indépendant), Fayçal Sayegh (Rencontre démocratique), ainsi que les députés du Kesrouan, Neemat Frem, Chamel Roukoz et Chawki Daccache.
Selon le secrétaire général des écoles catholiques, le père Boutros Azar, également coordonnateur général des Associations éducatives privées, cette rencontre parrainée par le chef de l’Église maronite, à laquelle il a participé et qui a vu une présence essentiellement catholique, avait pour objectif « d’alerter contre le manquement de l’État à ses devoirs, non seulement à l’égard des écoles privées, toutes communautés confondues, mais aussi à l’égard des hôpitaux et des associations caritatives dont les contrats ne sont même plus renouvelés ». « L’État viole les règlements », martèle-t-il. « À titre d’exemple, révèle le père Azar à L’Orient-Le Jour, il doit aujourd’hui 101 milliards et 50 millions de LL aux écoles privées gratuites et semi-gratuites ». « Les dettes de l’État s’accumulent depuis l’année scolaire 2014-2015 », observe-t-il, précisant que le décret-loi exige pourtant que les subventions aux écoles privées soient réglées deux fois par an, en avril et juillet. Le fait que l’État ne s’acquitte pas de ses obligations a des « conséquences désastreuses sur l’école privée, avec ce qu’elle entraîne comme fermeture d’établissements, licenciements d’enseignants, baisse du niveau de l’éducation... ».
À l’issue des prises de parole, une commission restreinte représentant l’ensemble des blocs a été formée pour suivre le dossier et pousser l’État à s’acquitter de ce qu’il doit aux écoles gratuites et à soutenir l’éducation privée, en dépit du déficit de son budget. En l’absence d’un gouvernement, la réponse risque néanmoins de tarder.

Mobilisation pour sauver l’école des Makassed
À l’heure où se tenait la rencontre de Bkerké, un développement majeur captait l’attention de tous. L’annonce de la fermeture de l’école secondaire Khadija el-Koubra, relevant de l’association islamique philanthropique des Makassed de Beyrouth. Cette annonce a poussé les enseignants licenciés, les élèves et leurs parents à barrer la route devant l’école à Aïcha Bakkar, avant de se rendre à Dar el-Fatwa pour faire entendre leur voix. Le mufti de la République, Abdellatif Deriane, a aussitôt organisé une réunion élargie, regroupant les manifestants, le nouveau président de l’association des Makassed, Fayçal Sinno, le ministre sortant de l’Éducation, Marwan Hamadé, deux députés de Beyrouth, Fouad Makhzoumi et Nazih Najm, ainsi que le président du syndicat des enseignants des écoles privées, Rodolphe Abboud.
Après avoir fait part de son soutien moral à l’association, le mufti Deriane a exhorté son président à revenir sur sa décision de fermer l’établissement scolaire et à respecter les droits des enseignants et des élèves. De son côté, le ministre Hamadé a promis une mobilisation sur tous les fronts, afin que l’association perçoive les arriérés qui lui sont dus. Quant au député Fouad Makhzoumi, il a également affirmé son soutien à l’association et à l’éducation de manière plus générale, fustigeant le Parlement et le gouvernement dans leur gestion des défis liés à la grille des salaires. Le Premier ministre désigné Saad Hariri, qui se trouve à l’étranger, a alors invité le ministre sortant des Finances, Ali Hassan Khalil, à régler les subventions dues à l’association des Makassed. Il a ajouté qu’un montant de 5 milliards de LL serait débloqué dans l’urgence pour limiter les conséquences de la crise que traverse l’association islamique philanthropique.
Quoi qu’il en soit, il est légitime de se demander aujourd’hui pourquoi l’école Khadija el-Koubra, qui est très prisée, devait mettre la clé sous la porte. Nous n’avons pas pu contacter le nouveau président des Makassed, Fayçal Sinno, qui multipliait les réunions. Mais selon des sources informées contactées par L’OLJ, l’association a accumulé les déficits budgétaires depuis de nombreuses années. Ce qui l’a poussée à fermer environ 5 établissements scolaires dans la Békaa, au Akkar et dans l’Iqlim, et à décider hier de la fermeture de l’école secondaire de Aïcha Bakkar. Et ce, alors qu’elle n’avait appliqué que partiellement la grille des salaires, sans accorder aux enseignants les six échelons exceptionnels, et que sa dette à la Caisse de retraite des enseignants s’élevait à 8 milliards de LL. Ces mêmes sources se demandent s’il ne serait pas aujourd’hui nécessaire d’aider l’hôpital des Makassed, le but étant que l’association ne coule pas. « Peut-elle continuer ? » se demandent-elles.
Également questionné par L’OLJ sur la nature du soutien envisagé par Fouad Makhzoumi à l’association islamique, un proche de l’homme d’affaires affirme que ce dernier soutient déjà l’association de manière ponctuelle et envisage de continuer. Il fait toutefois état d’une « mauvaise gestion des Makassed ». Et d’ajouter : « Sans un plan clair de redressement de l’institution et une bonne gouvernance sur base d’une étude de faisabilité, il ne faut pas compter sur une aide à long terme. »

L’été promet d’être chaud dans l’enseignement privé qui s’enlise dans la crise. Une crise qui est certes la conséquence de l’adoption de la loi 46 sur la grille des salaires, en août 2017. Mais pas seulement. Depuis quatre ans déjà, l’État n’a pas déboursé les subventions qu’il doit aux écoles caritatives (gratuites ou semi-gratuites) en vertu du décret 9298 du...

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