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Moyen Orient et Monde - Syrie

« Personne n’aime vivre dans une maison qui n’est pas la sienne... »

Forcées de fuir la Ghouta, des familles échouent dans les habitations d’autres déplacés.

« Personne n’aime vivre dans une maison qui n’est pas la sienne, ou utiliser les affaires d’un autre », confie Oumayma al-Cheikh (25 ans), vêtue d’un niqab noir qui ne dévoile que ses yeux. Elle est ici en compagnie de son époux, Firas Abou al-Kheir (28 ans), et de leurs deux enfants. Nazir al-Khatib/AFP

Contraintes de quitter la Ghouta orientale, Oumayma al-Cheikh et sa famille ont trouvé dans le Nord-Ouest syrien le calme et la sécurité qu’elles recherchaient. Mais leur nouveau domicile appartient à une famille qui a elle aussi été poussée à fuir. « Personne n’aime vivre dans une maison qui n’est pas la sienne, ou utiliser les affaires d’un autre », confie cette mère de deux enfants.
La ville kurde de Afrine ainsi que la province du même nom ont été la cible d’une offensive d’envergure, menée en début d’année par la Turquie. Des dizaines de milliers d’habitants ont dû fuir. Aujourd’hui, une atmosphère détendue règne dans la ville. Devant des immeubles éventrés lors de l’opération militaire turque, des enfants ont pris d’assaut les balançoires, et sur les trottoirs les vendeurs ont réinstallé leurs étals. « On est venu ici pour épargner à nos enfants souffrances et bombardements », dit Mme Cheikh, lors d’une promenade dans un jardin public.
Après un siège asphyxiant de plusieurs années et une campagne de frappes ayant dévasté l’ancien fief rebelle de la Ghouta, le régime de Bachar el-Assad a fini par s’emparer en avril de cette région en périphérie est de Damas, dont la famille al-Cheikh est originaire, poussant là aussi des milliers d’habitants sur les routes. Quelque 36 000 déplacés ont trouvé refuge à Afrine et dans sa région, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Certains vivent dans des camps – environ 10 000 selon l’ONU –, mais d’autres se sont installés dans les maisons abandonnées. Depuis le début du conflit en 2011, la moitié de la population syrienne a été contrainte de quitter son foyer, soit environ 11 millions de personnes, dont 6 millions de déplacés internes.
« Les maisons que nous avons abandonnées sont habitées par d’autres personnes. C’est le cas de tout le monde en Syrie. Nous ne sommes pas les seuls », se défend Oumayma al-Cheikh. « Des groupes rebelles nous ont aidés à habiter ici. On est épuisés par les bombardements du régime, on veut un peu de repos », ajoute Ahmad al-Bouri, qui a fui la Ghouta avec ses parents. « Si le propriétaire revient, on ne sait pas ce qu’on va faire, reconnaît-il. On va devoir partir, aller dans les camps (de déplacés) ou chercher une autre maison. » Pour le jeune homme de 19 ans, l’heure n’est pas vraiment au départ. Il a postulé pour rejoindre la police locale mise en place par les rebelles qui, avec les soldats turcs, contrôlent désormais la région. Mehdi Haymur et son fils fouillent dans un tas de débris à l’entrée d’un appartement criblé de balles, à la recherche d’objets qui puissent leur être utiles. Ils trouvent une paire de coussins déchirés. « Nous avons perdu nos maisons, nos terres et notre travail. Nous avons été forcés de quitter la Ghouta et nous sommes également venus ici de manière forcée », déplore M. Haymur.
Cette situation inquiète les habitants de Afrine, même s’ils n’expriment leur exaspération qu’à demi-mot. « Des inconnus se sont installés dans la maison de mon cousin et ne veulent pas en sortir », lâche Mahmoud Hassan. Cet agriculteur de 58 ans s’empresse toutefois de tempérer : « Les gens de la Ghouta sont très bien, on s’entend avec eux. »
Plus de 137 000 personnes ont fui la région de Afrine et se trouvent toujours déplacées dans les régions environnantes, selon l’ONU, tandis que 135 000 autres ont choisi de rester dans la région, dont un tiers dans la ville de Afrine. Pour ces déplacés, « la liberté de mouvement reste limitée », a récemment déploré le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU, estimant que cela « empêchait » certains de rentrer chez eux. Des responsables kurdes accusent Ankara d’entraver leur retour pour imposer un changement démographique à l’enclave kurde.
Othmane Khalil, ouvrier de 57 ans, ne cache plus sa frustration : « Des familles de la Ghouta se sont installées dans notre rue, elles sont entrées dans la ville alors que les (habitants de Afrine) ne sont pas autorisés à revenir. Si la route était ouverte, tout le monde rentrerait. »
Nazir AL-KHATIB/AFP

Contraintes de quitter la Ghouta orientale, Oumayma al-Cheikh et sa famille ont trouvé dans le Nord-Ouest syrien le calme et la sécurité qu’elles recherchaient. Mais leur nouveau domicile appartient à une famille qui a elle aussi été poussée à fuir. « Personne n’aime vivre dans une maison qui n’est pas la sienne, ou utiliser les affaires d’un autre », confie cette...
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LE DEPLACEMENT FORCE EST PERE DE LA MISERE !

LA LIBRE EXPRESSION

19 h 46, le 30 mai 2018

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Commentaires (2)

  • LE DEPLACEMENT FORCE EST PERE DE LA MISERE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 46, le 30 mai 2018

  • ...""des familles échouent dans les habitations d’autres déplacés"". On se croit au Liban dans les années 1970-1980....

    L'ARCHIPEL LIBANAIS

    10 h 07, le 30 mai 2018

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