Rechercher
Rechercher

Liban - Conférence

Peut-on parler de droits humains arabes ?

Lors de la 13e conférence annuelle du monde arabe de Harvard, un panel de discussion s’est penché sur « les droits humains arabes et le dialogue entre les cultures ».

Lors de la conférence, Nagib Hage Chahine, Ghassan Moukheiber, Salim Jreissati, Lara Karam Boustany et Nadim Houry. Photo A.-M.H.

Les pays arabes dans leur grande majorité, le Liban y compris, ont émis des réserves sur les droits des femmes, sur l’égalité des genres. Alors qu’est reconnue l’universalité des droits de l’homme, et que le Liban a participé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme grâce aux efforts du ministre Charles Malek, il est légitime de se demander s’il existe des droits spécifiques aux pays arabes. C’est sur cette question que s’est penché le panel de discussion intitulé « Les droits humains arabes et le dialogue entre les cultures », lors de la treizième conférence annuelle du monde arabe de Harvard, qui s’est déroulée au cours du week-end dernier à l’hôtel Kempisky Summerland de Beyrouth. Un événement organisé par l’Association arabe des anciens élèves de Harvard (HAAA) en collaboration avec le Club Harvard au Liban (Ahual), qui a vu la participation du ministre de la Justice, Salim Jreissati, et en présence de l’ancien bâtonnier de Beyrouth, Antonio el-Hachem, et celle notamment du doyen de la faculté de droit de l’Université Saint-Joseph, le Pr Fayez Hage Chahine.

Pourquoi un tel thème, qui fait d’emblée une distinction entre les droits de l’homme et les droits de l’homme arabe? Parce que, explique le Pr Nagib Hage Chahine, médiateur de la conférence, « les pays arabes refusent certains droits reconnus mondialement ». Ils estiment que « ces droits sont en conflit avec la loi islamique » et « menacent l’identité arabe ». Nombre d’entre eux ont même adopté des chartes et conventions régionales, « sans pour autant que ces lois n’assurent la protection à certains droits humains ». La question est donc de savoir si cette spécificité arabe est justifiée sur le double plan légal et culturel.

Des solutions absentes
« Notre région présente d’importantes lacunes en matière de respect des droits humains », répond Nadim Houry, directeur du programme Terrorisme et contre-terrorisme auprès de Human Rights Watch, qui énumère les violations des droits des femmes migrantes, de la communauté LGBT, des libertés d’expression et de pensée... « Non seulement tout va mal, mais nous constatons l’absence de solutions », note-t-il, se prononçant d’emblée contre les arguments des pays arabes qui font part de « l’incompatibilité des droits humains avec la charia et la culture arabe ». « Rien dans la culture, l’héritage ou la religion ne justifie le non-respect des droits de l’homme », martèle-t-il. Et de constater « la faiblesse des arguments » avancés par les États arabes, mais aussi « l’avancée des forces conservatrices » sur le terrain.

Chiffres à l’appui, le Pr Lara Karam Boustany compare les réserves émises par les pays arabes. « Tous les États arabes sauf le Liban ont essayé de justifier ces réserves, précise-t-elle. Ils lient directement les droits des femmes et la nécessité de maintenir les liens familiaux à la lutte contre Israël. » Demandant s’il est si dangereux de reconnaître les droits des femmes, elle regrette que « la limite fixée aux droits des femmes soit régulièrement justifiée par le poids des traditions ».
À son tour, le ministre de la Justice, Salim Jreissati, explique comment les pouvoirs exécutif et judiciaire tentent de protéger les droits de l’homme au Liban, malgré les blocages. Il promet que « le combat se poursuivra » et qu’il fera son possible « pour un meilleur respect des droits de l’homme ».

Enfin, le député Ghassan Moukheiber se penche sur « l’influence qu’exerce la religion sur le législateur » dans la région. Il présente alors le Liban comme un pays « intéressant », car à la frontière entre l’État religieux et laïc ; comme un pays « dynamique » aussi, vu le conflit qui oppose la société civile à la structure politique. Et précise que les droits de l’homme n’y sont « pas statiques », mais liés aux différentes phases qu’a traversées le pays. Partant de sa propre expérience au Parlement, il met en exergue trois cas de figure « où le Parlement libanais a bloqué des textes de lois jugés inacceptables, car les droits humains étaient liés à l’islam ». Le défi est aujourd’hui « de relancer le dialogue, afin d’aligner le Liban et l’ensemble des pays arabes sur les standards internationaux ».


Lire aussi

Qui parle pour les Arabes ?

Les pays arabes dans leur grande majorité, le Liban y compris, ont émis des réserves sur les droits des femmes, sur l’égalité des genres. Alors qu’est reconnue l’universalité des droits de l’homme, et que le Liban a participé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’homme grâce aux efforts du ministre Charles Malek, il est légitime de se demander s’il...

commentaires (1)

Si Salim Jreissati se propose de travailler pour développer la notion des droits de l’homme au Liban, alors c’est mal barré et pour l’homme et pour ses droits.

Saleh Issal

08 h 09, le 24 avril 2018

Tous les commentaires

Commentaires (1)

  • Si Salim Jreissati se propose de travailler pour développer la notion des droits de l’homme au Liban, alors c’est mal barré et pour l’homme et pour ses droits.

    Saleh Issal

    08 h 09, le 24 avril 2018

Retour en haut