À la veille de la dernière élection présidentielle française, le Premier ministre de l’époque, Manuel Valls, et le ministre de l’Économie, Emmanuel Macron, avaient présenté leur démission pour se lancer dans la bataille électorale en vue de la présidentielle. Par éthique personnelle et honnêteté intellectuelle, et surtout par respect pour leurs électeurs, ils ne pouvaient en effet accepter de mélanger les plans et de mener campagne en risquant de profiter, d’une quelconque façon, des avantages que pouvaient leur procurer leurs fonctions officielles.
Le Liban est bien évidemment encore très (très) loin des pratiques démocratiques d’un pays comme la France. À la lumière de l’extrême complexité du contexte politique actuel, il serait irréaliste de demander aux ministres candidats aux législatives de présenter leur démission dans la perspective du scrutin du 6 mai. Par contre, on aurait pu s’attendre à un tel comportement éthique de la part de personnalités éclairées, imprégnées de valeurs humanistes et occidentales, censées représenter le modèle d’un nouveau style de gouvernance, moderne et avant-gardiste. Ce n’est malheureusement pas le cas pour tout le monde.
Le candidat Nicolas Chammas, qui brigue le siège grec-orthodoxe de Beyrouth I sur la liste aouniste, a ainsi convié au nom du conseil d’administration de l’Association des commerçants de Beyrouth, dont il est toujours le président en exercice, à un dîner hier soir dans un restaurant d’Achrafieh… « en son honneur » (sic !), en sa qualité de candidat aux élections (re-sic), comme indiqué noir sur blanc sur les cartons d’invitation! Il a placé ainsi toute l’Association des commerçants de Beyrouth, par le biais de son conseil d’administration, au service de sa propre campagne électorale.
L’histoire ne dit évidemment pas si le candidat Nicolas Chammas a consulté au préalable à ce sujet tous les membres de l’association, et l’aurait-il fait, a-t-il le droit, éthiquement, de se servir de l’ensemble de l’association comme instrument au service de sa campagne pour conquérir un siège parlementaire? Il s’agit là clairement d’un cas d’école en matière d’exploitation d’une fonction et d’un mandat à des fins personnelles et électorales… Un bel exemple de ce qui risquerait d’être son comportement s’il venait à se frayer un chemin pour faire son entrée au Parlement. Le candidat Chammas aurait grandement gagné en crédibilité si dès l’annonce de sa candidature il avait démissionné de son poste de président de l’Association des commerçants de Beyrouth. Il pourrait peut-être se rattraper à cet égard et franchir le pas. Mais le mal est déjà fait. Car c’est le premier geste qui compte et qui reflète souvent le véritable état d’esprit d’une personne et donc son comportement futur si elle est amenée à occuper des fonctions officielles.
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Mais tous les candidats aux élections, sans distinction, agissent de la même manière. Alors, il faut trouver d'autres arguments ou - mieux - d'autres candidats.... FM
13 h 29, le 11 avril 2018