France : l'Assemblée approuve la proposition de loi sur le "secret des affaires" en première lecture

Les députés français ont approuvé mercredi en première lecture une proposition de loi pour protéger le "secret des affaires" des entreprises, qui suscite des inquiétudes parmi les médias et associations.

Ce texte sur "la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués", a été soutenu par la majorité et la droite, alors que la gauche a voté contre. Il transpose une directive adoptée par le Parlement européen en juin 2016 après 18 mois déjà de vifs débats.

La proposition de loi émanant du parti présidentiel La République en marche (LREM) a été approuvée par 46 voix contre 20.

Pendant deux jours, les échanges ont tourné autour de la définition du secret des affaires donnée dans la directive: est protégée une information connue par un nombre restreint de personnes, ayant une valeur commerciale en raison de son caractère secret et qui fait l'objet de mesures particulières de protection.

Dans une tribune la semaine dernière, un collectif de sociétés de journalistes (du journal Le Monde à l'AFP), de syndicats et d'associations (comme Sherpa) avait dénoncé une définition "si vaste que n'importe quelle information interne à une entreprise peut désormais être classée dans cette catégorie". Ce collectif avait jugé "trop faibles" les dérogations prévues pour empêcher les poursuites de syndicalistes, lanceurs d'alerte ou journalistes qui révéleraient une telle information. 

Pour la ministre française de la Justice Nicole Belloubet, la majorité et la droite, "dire cela c'est faux". "Le secret des affaires ne pourra être opposé aux lanceurs d'alertes et aux journalistes", a martelé la ministre.

"Les dérogations sont claires et précises", a plaidé Naïma Moutchou (LREM), rappelant avoir été "avocate de droit de la presse pendant huit ans".

La gauche en a fait une lecture radicalement inverse.

"Cette loi érige le secret des affaires en principe supérieur aux droits fondamentaux", a tempêté le communiste Stéphane Peu.

Ces groupes ont été irrités par le refus de la majorité d'amender le champ d'application du texte.

"L'objectif est d'avoir dans l'ensemble des pays de l'Union la même définition du secret des affaires", a insisté le rapporteur Raphaël Gauvain (LREM), soulignant que la directive devait être transposée par les États membres d'ici au 9 juin.

Seul consensus : les "sanctions en cas de procédure dilatoire ou abusive" contre les journalistes et les lanceurs d'alertes, ajoutées à l'initiative du rapporteur. L'amende pourra aller jusqu'à 20% du montant de la demande de dommages et intérêts (ou 60.000 euros en l'absence de demande).