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Lifestyle - Disparition

Paul Bocuse, le chef qui a fait des cuisiniers des stars

Le pape de la gastronomie française est décédé samedi à l’âge de 91 ans.

Un portrait de Paul Bocuse peint sur la façade d’un immeuble à Lyon. Jeff Pachoud/AFP

Le chef Paul Bocuse, décédé samedi à l’âge de 91 ans, laisse un héritage énorme à la gastronomie française et mondiale : il a contribué à la starisation des chefs et apporté de la modernité à la cuisine, même s’il a fini par incarner un certain classicisme français.
« C’est celui avec qui Henri Gault et Christian Millau ont lancé la Nouvelle Cuisine. Il a été à l’origine de ce big bang dans la gastronomie française et mondiale », explique Côme de Chérisey, patron du guide gastronomique Gault & Millau. C’est une simple salade de haricots verts croquants qui fait naître ce mouvement révolutionnaire. Au milieu des années 1960, Gault et Millau goûtent chez Bocuse ce plat, et d’autres, qui suscitent l’envie d’une cuisine affranchie des canons très codifiés de la tradition française. Le travail d’autres cuisiniers français s’inscrit dans cette tendance, comme les frères Troisgros, Michel Guérard ou Alain Senderens. En 1973, Gault et Millau lancent leur manifeste pour une Nouvelle Cuisine : cuissons plus courtes, moins de sauces, utilisation des produits du marché. « Cela a vraiment révolutionné la cuisine, et cela continue à marquer des générations de chefs, souligne M. de Chérisey. Quand Yannick Alléno lance son livre sur les sauces il y a deux ans, il se réfère aux commandements de la Nouvelle Cuisine. »
Le chef Pierre Gagnaire décrit la genèse de la Nouvelle Cuisine comme une « rencontre de gens malins ». Gault et Millau « ont été très intelligents, ils ont goûté le changement. Et en face, il y avait cet homme qui avait saisi l’opportunité d’exister, au-delà du simple fait culinaire », dit-il.

Notre père à tous
Inspirateur de la Nouvelle Cuisine, Bocuse refusait pour autant d’en être l’ambassadeur. « Je n’ai jamais fait de Nouvelle Cuisine, à part une salade de haricots verts qui a laissé tout le monde sur le derrière. La Nouvelle Cuisine, c’était rien dans l’assiette, tout dans l’addition ! » disait-il, en 2007, au critique gastronomique François Simon.
« C’était un homme de la terre, il aimait la terre, il la respectait, il magnifiait le produit, il était contre une cuisine trop moderne. Sa cuisine soi-disant passéiste était complètement dans le ton actuel », affirme le chef Marc Veyrat. Pour un autre chef, Philippe Etchebest, « Bocuse fait partie des bases, et en cuisine, il n’y a pas de créativité sans fondamentaux ». « Bocuse était cette base-là, ce socle qu’on avait pour s’exprimer. Il s’est construit tellement de choses autour de ce socle, dit encore M. Etchebest. C’était un peu notre père à tous, notre référent. »
Au-delà de son travail, Bocuse est celui qui a donné un statut au cuisinier. « C’est l’homme qui a contribué à sortir les chefs des cuisines, rappelle M. de Chérisey. Dans les années 1960 et au début des années 1970, les cuisiniers étaient en cuisine, on parlait du restaurant, mais pas des chefs. » À partir de ce moment-là, « les cuisiniers sont sortis de leurs cuisines et sont devenus des personnes importantes, des créateurs de cuisine, visibles et reconnus », analyse-t-il. Bocuse était aussi un visionnaire sur le plan commercial. « Il a compris tous les codes autour du commerce de la gastronomie et il est le premier à avoir fait de son nom une immense marque, connue dans le monde entier », note M. de Chérisey. « La soupe VGE (une soupe aux truffes créée pour le président Valéry Giscard d’Estaing) est devenue un plat médiatique, emblématique. Cela montre comment un chef crée une recette qui devient un objet de communication », poursuit-il.
Bocuse a également été l’un des premiers, bien avant Alain Ducasse, à revendiquer le fait qu’un chef pouvait ne pas être toujours lui-même derrière les fourneaux, mais laisser un autre officier en son nom.

Anne-Laure MONDESERT et
Paul RICARD/AFP

Le chef Paul Bocuse, décédé samedi à l’âge de 91 ans, laisse un héritage énorme à la gastronomie française et mondiale : il a contribué à la starisation des chefs et apporté de la modernité à la cuisine, même s’il a fini par incarner un certain classicisme français.« C’est celui avec qui Henri Gault et Christian Millau ont lancé la Nouvelle Cuisine. Il a été à...

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