Armes de l'EI : Tereos plus vigilant sur ses exportations de sorbitol

Tereos, le troisième groupe sucrier mondial, a mis en place des mesures de surveillance de ses exportations dans une vingtaine de pays, après la découverte de sorbitol produit par lui dans les caches d'armes irakiennes de l'organisation Etat Islamique, a-t-on appris lundi auprès de cette entreprise.

Il y a un an, l'ONG CAR (Conflict Armament Research) avait mis au jour la présence dans ces caches de plusieurs tonnes de sorbitol, un sucre issu du blé et du maïs, utilisé dans la fabrication de carburant pour roquettes, comme l'a rappelé le Journal du Dimanche du 10 décembre dans une enquête. Le sorbitol, vendu par Tereos à un de ses clients historiques en Turquie, a été "détourné" ensuite pour finir dans un entrepôt de l'EI.

"Aujourd'hui, on a une vingtaine de pays où les exportations sont sous surveillance, il y a une enquête approfondie avant d'exporter. On s'est doté pour ça d'un outil, une solution d'analyses de données, d'évaluation du profil de nos clients", a dit à l'AFP Gérard Benedetti, le directeur de la communication du groupe Tereos, le premier fabricant de sucre français.

Cette solution informatique, un logiciel "reconnu au niveau international", apporte au groupe Tereos des éléments sur la gouvernance d'un client, son environnement financier, qu'"on prend en compte avant de valider une vente", indique M. Benedetti.

Parmi les pays désormais sous surveillance figurent la Libye, l'Irak, la Syrie, l'Egypte, le Liban, le Soudan du Sud, la Somalie, l'Erythrée, le Burundi et la Centrafrique.

Le groupe a également décidé, "à titre de précaution", de stopper dans un certain nombre de pays la commercialisation de sorbitol auprès de distributeurs et de ne vendre ce produit, dans des zones de conflit ou à proximité, qu'"auprès d'industriels" qui les utilisent directement.

Ca a été "une grande émotion pour les salariés de découvrir qu'un produit alimentaire basique, banal, pouvait être utilisé et détourné à des fins terroristes", a commenté M. Benedetti, qui rappelle que le sorbitol est "un produit alimentaire extrêmement banal", utilisé quotidiennement pour fabriquer du chewing-gum, des confiseries ou du dentifrice.

"A aucun moment, nous n'avons été alertés par aucune autorité française ou étrangère sur le fait qu'il y avait des détournements possibles ou qu'il y avait des filières suivies dans certains pays", a assuré M. Benedetti.

Il assure que ces décisions de contrôle ont été prises du "propre chef" de l'entreprise, pour éviter que ce produit, qui ne fait l'objet d'"aucune restriction ni de vente, ni d'exportation", soit à nouveau détourné de son usage habituel.