La liberté d'expression au Liban semble en avoir pris un coup depuis l'épisode de la démission du Premier ministre Saad Hariri depuis Riyad, il y a deux semaines, et les secousses qui en ont résulté. Même une personnalité médiatique de premier plan, comme le journaliste Marcel Ghanem, n'a pas échappé aux poursuites judiciaires engagées contre lui, à la demande du ministre de la Justice Salim Jreissati, ce qui a fait réagir hier l'ancien Premier ministre Fouad Siniora. « Nous rejetons et dénonçons de telles pratiques », a déclaré ce dernier, estimant que le journaliste n'est pas responsables des attaques verbales lancées au cours de son talk-show.
Un autre journaliste d'opinion s'est, lui, retrouvé carrément derrière les barreaux pour avoir écrit un article sur le site électronique al-Janoubia. Ahmad Ayoubi est ainsi en garde à vue depuis jeudi dernier. Il est accusé d'avoir critiqué le président de la République et d'avoir porté atteinte aux relations avec « un pays frère », nommément l'Arabie saoudite. Hier, l'Alliance civile islamique et l'avocate Zeina el-Masri, qui représente Ayoubi, ont tenu une conférence de presse sur le sujet, afin de plaider pour sa remise en liberté.
Me Masri a expliqué que « M. Ayoubi est en garde à vue depuis jeudi sur ordre du procureur général de Beyrouth, aucun mandat d'arrêt n'a été émis contre lui jusqu'à présent et il n'a pas encore été interrogé par le juge compétent ». Interrogé par L'Orient-Le Jour sur l'affaire Ayoubi, l'ancien député Farès Souhaid, membre du mouvement de l'Initiative nationale tout comme Ahmad Ayoubi lui-même, place cette arrestation dans le cadre d'une menace pesant sur la liberté d'expression à un niveau national. « Nous remarquons dernièrement qu'il y a une orientation vers une reconstitution de l'État sécuritaire tel que nous l'avons connu au temps des Syriens, dit-il. Nous constatons cela à trois niveaux : d'une part, la diabolisation de certaines personnalités politiques sous prétexte d'avoir nui au compromis politique en vigueur, dont j'ai moi-même fait les frais, d'autre part, la tentative d'intimidation de journalistes comme Marcel Ghanem, et enfin l'arrestation de leaders d'opinion comme Ahmad Ayoubi. » Selon M. Souhaid, M. Ayoubi devra être entendu aujourd'hui lundi par le juge d'instruction de Beyrouth. « Il devrait être relâché à la suite de cet interrogatoire, dit-il. S'il ne l'est pas, nous prévoyons des manifestations dans les rues. Après tout, à l'ère des réseaux sociaux et de toutes les insultes, les propos rédigés par Ahmad Ayoubi respectent les conventions. »
commentaires (2)
JUGULER LES OPINIONS EST PLUS QU,UNE HONTE C,EST UN CRIME !
LA LIBRE EXPRESSION
10 h 33, le 20 novembre 2017