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Nos Lecteurs ont la Parole - Sylvain THOMAS

L’homme est toujours pressé, Dieu ne l’est pas !

Nous nous demandons parfois si ce n'est pas là l'une des principales misères de notre temps : nous sommes pressés alors que Dieu ne l'est pas. Les rouages de notre vie sont, pourrait-on dire, en prise avec ceux de l'œuvre divine. Or le mécanisme divin est infiniment plus robuste que le nôtre. Et chaque fois que nous accélérons notre allure alors que Dieu conserve son rythme, nous « arrachons les dents » de notre engrenage. Nous nous usons. Pourquoi, par exemple, vouloir que nos enfants grandissent plus vite que de raison ? Qu'un enfant de cinq ans se comporte ainsi qu'il est normal à son âge, son père lui en fait l'observation. « Pourquoi fiston ne te conduis-tu pas comme un grand garçon ? »
À quoi le simple bon sens répond : parce qu'il « n'est pas » un grand garçon. Nous voulons qu'un enfant de cinq ans ait le comportement d'un adulte, non dans son intérêt, mais pour notre tranquillité à nous ; non par désir du bien, mais par impatience.
Tel père de famille demandait un jour à un doyen d'université si son fils ne pourrait pas abréger ses études, de façon à « arriver au but par des voies plus rapides ». « C'est certainement possible, répondit le doyen. Mais tout dépend de ce que vous voulez faire de votre fils. Quand Dieu veut créer un chêne, il y met un siècle. Veut-il faire pousser une courgette, il ne lui faut que deux mois... »
Peut-être lisons-nous trop et ne pensons-nous pas assez ?
Force de vouloir bourrer notre cerveau de faits et de détails, nous le rendons semblable à un grenier encombre de bric-à-brac : combien de pensées disparaissent sous ce fatras ! Sans doute vaudrait-il mieux faire de notre esprit un musée, d'où l'on élimine la médiocrité pour ne conserver que les chefs-d'œuvre, afin de les contempler longuement et de les apprécier à leur juste valeur.
La nature nous prouve, par mille et un indices, que le rythme insensé de notre vie est absolument anormal au vingt et unième siècle. Quand, fuyant les rues surpeuplées et les horaires surchargés, on quitte le tohu-bohu de la vie moderne pour faire une promenade parmi les arbres et les pinèdes, qui se développent avec tant de lenteur, et les collines boisées calmes et silencieuses qui semblent toujours au repos, on se laisse un peu gagner par la paix tranquille de la nature. Le soleil prend tout son temps pour se lever et se coucher. Nulle force humaine ne saurait hâter sa course. La glace des lacs attendra pour fondre que l'air atteigne la température voulue. Les oiseaux migrateurs arrivent et repartent quand ils sont prêts.
Même les inventions, sur lesquelles l'homme exerce un pouvoir apparemment absolu, semblent venir à leur heure, quand le temps a fait son œuvre, quand le niveau du savoir humain est en état de favoriser leur venue. Léonard de Vinci dessina le plan de plusieurs « machines volantes » : mais il ne put dépasser le stade de la théorie, faute d'une force motrice pour les faire voler. L'avion dut attendre, pour voir le jour, le moment où le lent et sûr progrès de la science permit de créer un moteur capable de soutenir son vol.
Pourtant, une conception erronée de la notion de patience recèle un réel danger : nous risquons de sombrer dans l'inaction, de nous contenter de voir venir les événements au lieu d'y participer afin de contribuer au progrès de l'humanité. Ne confondons pas la patience et la passivité, cette attitude qui consiste à attendre que les cailles nous tombent dans le bec toutes rôties. L'être vraiment patient commence tôt sa tâche et l'exécute en prenant son temps, c'est-à-dire en se conformant au rythme de Dieu. Nous connaissons une anecdote qui illustre excellemment cette vérité. Après le départ d'une visiteuse à cheveux blancs, une jeune fille dit à sa mère : « Maman, si j'étais sûre de devenir une vieille dame aussi charmante qu'elle, aussi bonne et douce, cela me serait égal de vieillir. » « Eh bien ! répondit sa mère, si tu veux devenir une vieille dame comme elle, tu ferais bien de t'y prendre dès maintenant et de ne pas oublier qu'elle n'est pas devenue en un jour ce qu'elle est... » Les beaux et bons fruits mûrissent lentement selon le bon vouloir de Dieu qui a créé la nature.

Nous nous demandons parfois si ce n'est pas là l'une des principales misères de notre temps : nous sommes pressés alors que Dieu ne l'est pas. Les rouages de notre vie sont, pourrait-on dire, en prise avec ceux de l'œuvre divine. Or le mécanisme divin est infiniment plus robuste que le nôtre. Et chaque fois que nous accélérons notre allure alors que Dieu conserve son rythme, nous...

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