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Culture - Design

Salim al-Kadi au MoMA : le keffieh résiste au temps

Au Musée d'art moderne de New York, l'exposition « Items : is Fashion modern ? » regroupe des dizaines d'artistes du monde entier dont un Libanais, Salim al-Kadi, qui y présente son désormais fameux keffieh pare-balles, que les Libanais avaient découvert en 2016 au Beirut Design Week.

Le keffieh en kevlar de Salim al-Kadi au MoMA.

Quand Salim al-Kadi a eu l'idée du keffieh pare-balles, il était bien loin de penser au parcours que celui-ci allait connaître. Car de la petite boutique Geek Express de Saïfi, son keffieh a voyagé jusqu'à une salle de l'énorme MoMA new-yorkais. Une mer et un océan plus loin, son objet identifié avait fait tellement de bruit sur la Toile que les curateurs de l'exposition « Items : Is Fashion Modern ? » s'étaient vu obligés de l'exposer. Douce obligation évidemment, car le keffieh 2017 de Salim al-Kadi était la parfaite illustration de ce show multifaces. Faisant écho à une exposition de 1944 intitulée « Are Clothes Modern ? », la version 2017 rassemble 350 objets sur la totalité du 6e étage du musée. Expo phare de la rentrée de la big apple, elle a pour but de montrer que la mode, au-delà de son aspect léger, est à la croisée de la politique, de l'économie, du style, de la technologie et de la culture. Quoi de mieux que le keffieh de Salim al-Kadi pour illustrer ce propos. À l'origine coiffe des paysans pour les protéger du soleil, du vent et du sable, son usage s'est étendu aux militaires anglais stationnés dans la région, il est également devenu un symbole de résistance avec son utilisation par les divers mouvements palestiniens, et a fini par être détourné par les fashionistas qui en ont fait un objet de mode dans les décennies 2000. Avec son keffieh en kevlar, al-Kadi s'engage plus avant sur sa portée de résistance. Il lui fait quitter la tradition pour le faire rentrer dans la modernité, avec l'alliage entre tissus anciens et modernes, avec sa fabrication artisanale et son usage postmoderne. Le keffieh est devenu un symbole mondial de résistance, porté par les manifestants du monde entier. Il les protège désormais des vicissitudes policières tout en affirmant bien haut leur appartenance. Le keffieh est au manifestant moderne ce que la cape est à Superman ou Wonderwoman, une protection et un signe distinctif.

Rencontré dans un hall d'hôtel à New York le matin de la conférence de presse de lancement de l'exposition, l'architecte libanais ne cachait pas sa nervosité, son excitation en fait, à l'idée de voir son bébé exposé dans le temple de l'art moderne mondial. Il savait que la portée de son œuvre allait bien plus loin que la plupart des objets exposés, qu'il était plus politique et engagé, et que même s'il s'en défend de son sourire désarmant, c'est bien de combat dont il est question. Combat politique on l'a vu, mais aussi combat pour le maintien de l'artisanat, son keffieh étant produit à la main par une Palestinienne de Aïn el-Héloué, qui réussissait là où la machine échouait, le kevlar étant réfractaire à la technologie. Son keffieh en kevlar est l'évolution ultime de ce bout de tissu qui aura traversé le XXe siècle en changeant d'usage, tout en restant objet protecteur. Protecteur face aux conditions climatiques, il devient, grâce au cerveau de Salim al-Kadi, protection face aux conditions politiques, symbole du petit contre le grand, de l'opprimé contre l'oppresseur, mais terriblement stylé, car le keffieh est aussi devenu un symbole marketing. Le Français a son béret, le Russe sa chapka, le cowboy son stetson, le résistant son keffieh.

Quand Salim al-Kadi a eu l'idée du keffieh pare-balles, il était bien loin de penser au parcours que celui-ci allait connaître. Car de la petite boutique Geek Express de Saïfi, son keffieh a voyagé jusqu'à une salle de l'énorme MoMA new-yorkais. Une mer et un océan plus loin, son objet identifié avait fait tellement de bruit sur la Toile que les curateurs de l'exposition « Items : Is...

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