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Moyen Orient et Monde - Éclairage

Les « cerveaux » iraniens, enjeu méconnu de l’accord nucléaire

Les gardiens de la révolution, et plus généralement les conservateurs, s'inquiètent du retour de membres de la diaspora qui pourraient leur faire concurrence.

Le président iranien Hassan Rohani à la tribune de l’ONU, le 20 septembre 2017 à New York. Photo AFP

Les mots ne pouvaient pas être plus clairs et incisifs. Lors de l'Assemblée générale des Nations unies qui s'est tenue il y a deux semaines à New York, le président américain Donald Trump s'en est violemment pris à l'Iran, « un État voyou, économiquement ravagé, qui exporte principalement la violence, le carnage et le chaos ». Le portrait est peu flatteur et omet un facteur souvent oublié qui a pourtant un poids important dans les « exportations » iraniennes tant décriées par M. Trump. Ce facteur, c'est la « fuite des cerveaux », soit tous ces étudiants, chercheurs ou hommes d'affaires que le pays voit partir chaque année.

« Environ 150 000 individus hautement qualifiés quittent l'Iran tous les ans, ce qui correspond à une perte annuelle pour l'économie d'environ 150 milliards », a déclaré en janvier 2014 le ministre de la Science, de la Recherche et de la Technologie, Reza Faraji-Dana. Le chiffre semble exagéré puisque les départs oscilleraient en fait entre 50 000 et 70 000 personnes, mais le Fonds monétaire international a placé la République islamique en tête du classement mondial pour la fuite des cerveaux en proportion du nombre d'habitants. Une perte considérable pour un pays qui forme tous les ans des étudiants à forte valeur ajoutée.

En août 2014, l'attribution de la médaille Fields (le « prix Nobel » mathématique) à Myriam Mirzakhani avait mis en lumière les bonnes performances du système éducatif iranien. Toutefois, face à un taux de chômage des jeunes qui frôle les 30 % et face au nombre de place limité dans les universités, nombreux sont les « cerveaux » qui optent pour l'exil. En débutant une carrière aux États-Unis, ceux-ci peuvent parfois prétendre à un salaire six fois plus élevé que dans leur pays d'origine. L'intérêt économique joue donc un rôle non négligeable, mais il n'explique pas tout. L'exil des « cerveaux » iraniens reste profondément lié à l'environnement politique du pays. Sous l'ancien président iranien Mohammad Khatami, entre 1997 et 2005, plusieurs retours avaient été enregistrés, comme lors de l'élection de Hassan Rohani en août 2013. Les départs se sont quant à eux intensifiés suivant les crises politiques du pays, que ce soit en 1999 lors de la répression des manifestions étudiantes, en 2005 lors de l'élection de Mahmoud Ahmadinedjad ou en 2009 après le « mouvement vert ».

 

(Pour mémoire : En Iran, le péril jeune)

 

Entre risques et bénéfices
La « fuite des cerveaux » reste aujourd'hui tributaire des nombreux remous géopolitiques. Après des années de sanctions qui ont mis à mal l'économie iranienne, l'accord de Vienne de 2015 sur le nucléaire iranien a ouvert de nouvelles perspectives de développement et pose la question d'un éventuel retour des « cerveaux ». Après son élection à la tête du pays, Hassan Rohani les avait d'ailleurs appelés à investir en Iran pour montrer leur « amour » envers leur pays. La sauvegarde de l'accord constitue donc un enjeu majeur pour le président iranien. « Nous laissons ouvertes les portes de la coopération. Nous avons conclu des dizaines de contrats de développement aussi bien avec les pays de l'Occident que de l'Orient », a-t-il déclaré à la tribune des Nations unies. Si l'objectif de 50 milliards de dollars de nouveaux investissements est encore loin d'être réalisé, plusieurs entreprises comme Total ou Renault ont déjà commencé à investir en Iran. L'avenir dira toutefois si l'accord résistera aux attaques du président américain. « L'accord iranien est l'un des pires accords que les États-Unis ont jamais signés. Cet accord est un embarras pour les États-Unis », a-t-il déclaré à New York.

Côté iranien, les pasdaran voient d'un mauvais œil un éventuel retour de ces « cerveaux » qui pourraient venir concurrencer leurs intérêts bien établis. « L'arrestation des binationaux à l'aéroport de Téhéran par les gardiens de la révolution a créé une forme d'insécurité pour les retours », analyse Clément Therme, spécialiste de l'Iran à l'Institut international d'études stratégiques (IIES) de Londres et codirecteur avec Guillaume Fourmont de Iran : une société face à la mondialisation. Les gardiens de la révolution, et plus généralement les conservateurs, s'inquiètent de l'intégration des « cerveaux » iraniens. « Le risque pour eux, c'est qu'avec l'émergence d'acteurs privés en Iran apparaisse une société civile indépendante et une démocratisation qui ne dépende plus des clientèles du régime. Tout le monde sait que pour survivre, le système a besoin du développement économique, mais qu'il faut éviter l'émergence d'un secteur privé indépendant adossé à une société civile qui réclame l'amélioration des droits civiques », ajoute-t-il.

Plus qu'un bras de fer entre réformateurs et conservateurs, toute la classe politique iranienne est donc partagée entre les bénéfices et les risques que représente le retour de membres de la diaspora estimée aujourd'hui à 5,5 millions d'Iraniens. Contacté par L'Orient-Le Jour, Hazhir Rahmandad, célèbre scientifique américain né en Iran, pointe, pour sa part, l'intérêt du retour des « cerveaux » : « Beaucoup d'individus ont émigré, mais cela constitue aujourd'hui un fort potentiel de croissance pour le pays. La question est de savoir si le gouvernement peut exploiter ce potentiel », souligne-t-il. Face à un pays prêt au développement, le capital humain iranien présent à l'étranger représente donc une aubaine. Néanmoins, l'avenir de ce développement semble plus que jamais dépendre des méandres politiques internationaux et nationaux.

 

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Les mots ne pouvaient pas être plus clairs et incisifs. Lors de l'Assemblée générale des Nations unies qui s'est tenue il y a deux semaines à New York, le président américain Donald Trump s'en est violemment pris à l'Iran, « un État voyou, économiquement ravagé, qui exporte principalement la violence, le carnage et le chaos ». Le portrait est peu flatteur et omet un facteur souvent...

commentaires (3)

hehe est le pire c’est que chez nous ils en voient un exemple !!! Faut faire une étude dessus sur combien ne sont pas satisfait de leur Pays ... un exemple à suivre 2al haha laissez moi rire

Bery tus

15 h 32, le 04 octobre 2017

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Commentaires (3)

  • hehe est le pire c’est que chez nous ils en voient un exemple !!! Faut faire une étude dessus sur combien ne sont pas satisfait de leur Pays ... un exemple à suivre 2al haha laissez moi rire

    Bery tus

    15 h 32, le 04 octobre 2017

  • Ne vous inquiétez surtout pas pour l'Iran ???? Je ne crois pas qu'ils soient à cours de cerveaux. Inquiétez-vous plutôt pour le Liban, seul pays au monde à accepter de vivre sans courant, sans eau et de se faire racquet par les mafias des moteurs et de je ne sais quoi, ce qui témoigne d'un Qi moyen de 50 dans ce pays de moutons. La diaspora de l'Iran represente 4-5% de sa population La diaspora libanaise represente 100000% de la population residente au Liban et nous pour le coup, seul les moutons restent au pays dans notre cas.

    Chady

    15 h 04, le 04 octobre 2017

  • QUAND ON PLONGE UN PAYS DANS L,OBSCURANTISME ET EN ON FAIT LA SECONDE FACE DE LA MEME MONNAIE OBSCURE ON OUVRE LES PORTES DE L,EMIGRATION EN MASSE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 16, le 04 octobre 2017

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