Rechercher
Rechercher

Culture - Livres

Quand Antoine Douaihy plonge dans l’extrême absence...

L'auteur, dont l'écriture en langue arabe est d'une limpide transparence, publie aujourd'hui son huitième opus au titre poétique, « Akher el-aradi » *. Lumière sur les zones d'ombre d'un sujet grave et douloureux...

Antoine Douaihy, une narration doublée d’une culture qui allie en toute subtilité et sensibilité Occident et Orient.

Le regard bleu-vert clair, le sourire qui affleure lentement et avec réserve, les cheveux plus sel que poivre, marié et père de trois enfants, professeur retraité d'anthropologie de l'Université libanaise, l'auteur de Hadikat el-fajr (Le jardin de l'aube), à soixante-neuf ans, est porté à l'introspection. Il est toujours riche d'une vie intérieure qui hante le blanc de ses pages...

Vingt ans de séjour en France. Il en a gardé le raffinement dans la tournure et l'élégance de ton. Dans une narration doublée d'une culture qui allie en toute subtilité et sensibilité l'Occident et l'Orient. Lui qui vit entre Zghorta et Ehden, il dit d'ailleurs sans ambages son attachement à l'ensemble de l'Europe ainsi qu'à sa terre natale. Une synthèse qui nourrit l'essence de son œuvre. D'ailleurs, en substance, il a cet aveu révélateur et touchant : « J'écris ce qui est académique en langue française, mais la langue arabe est celle de mon âme, elle ne change pas dans le temps... »

Avec des personnages féminins qui reviennent inlassablement comme une antienne qui s'installe, l'écrivain, loin de ce qu'on appelle les romans à thème, cite Laura et Anna. Son univers romanesque, comme il le souligne, naît toujours d'une intériorité en constante effervescence et bouillonnement. « Pour moi, il n'y a pas de temps linéaire. C'est un phénomène cyclique dans mes écrits, explique-t-il. Dans une littérature des profondeurs et une musique interne, loin de tout romantisme, rien ne se perd, tout revient d'une autre façon... »

De quoi parle ce dernier roman dont la couverture restitue en illustration un fragment d'une belle aquarelle de Omar Ounsi ? « C'est aller à l'extrême de l'absence, dit Antoine Douaihy, la mort, certes, mais il y a aussi la disparition de ce monde. Avec la possibilité d'être loin de ce qui est perceptible, visuel, tangible... Ce livre, Fin des terres, est la quête géographique et spirituelle, pour un être qui se dérobe brusquement, disparaît littéralement... »

 

Vie vs néant
L'histoire ? Le narrateur qui vit avec une jeune femme, Clara, l'attend dans un salon de thé au jardin du Luxembourg à Paris. Sans crier gare, sans explication aucune, elle ne viendra pas. Plus jamais, sans signal ni alerte. Envolée, volatilisée dans l'espace et le temps. Vaine recherche. Alors le jeune homme tente de comprendre cette énigmatique absence. Par-delà les points de chute géographiques et spirituels, il passe en revue gestes, lieux, pensées et actions qui auraient pu être la source d'une rupture, d'un départ, d'une séparation. On ne dira pas la fin du récit pour garder l'intérêt du lecteur jusqu'au bout. Et le plaisir de découvrir ce qui unit ou désunit deux êtres qui s'aiment d'amour. Entre-temps, du jardin du Luxembourg à Paris jusqu'aux terres les plus lointaines de l'Amérique, l'histoire se ramifie dans une écriture tragique. Car ici, il s'agit du tragique de l'humanité frappée et guettée par sa fragilité et sa vulnérabilité. Et une question essentielle que se pose un personnage dans ce livre : « La vie vaut-elle d'être vécue malgré son tragique avec le temps, la conscience terrible de la mort et la fragilité du corps ? Je crois que la vie est préférable au néant ! »

Un livre dense et intense où l'impact des sentiments, des émotions, des obsessions, des rêves, des visions et de l'inconscient charrie toute rationalité.
Mais déjà Antoine Douaihy est ailleurs. Il met les dernières touches à son prochain ouvrage qui parle de son adolescence avant son départ pour l'Europe. « La vie intérieure est l'univers dans son entité. Lorsqu'elle s'éteint, l'univers s'éteint. » Autour de sa table de travail, de sa plume et de ses pages, l'homme évoque, une fois de plus, le passé. Le parfum de la fin de l'enfance et celui du début de l'âge d'homme. Titre pressenti et en lice Madinat el-chita' (Ville d'hiver). Écriture et narration à suivre.

 

*Akher el-aradi d'Antoine Douaihy (191 pages ; Dar al-Mourad – Arab Scientific Publishers, Inc.). En vente dans les librairies.

 

Pour mémoire 

Antoine Douaihy, témoin de la vie

Le regard bleu-vert clair, le sourire qui affleure lentement et avec réserve, les cheveux plus sel que poivre, marié et père de trois enfants, professeur retraité d'anthropologie de l'Université libanaise, l'auteur de Hadikat el-fajr (Le jardin de l'aube), à soixante-neuf ans, est porté à l'introspection. Il est toujours riche d'une vie intérieure qui hante le blanc de ses...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut