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Liban

Visite de Le Pen : Les Libanais divisés

Marine Le Pen, hier, en compagnie de Samy Gemayel à Saïfi. Photo Dalati et Nohra

S'il est désormais fréquent que les candidats à la présidentielle française se rendent au Liban dans le cadre de leur campagne, la visite de la présidente du Front national, Marine Le Pen, a suscité de vives réactions dans les milieux politiques.

Ces réactions pourraient s'expliquer par les positions de Mme Le Pen – que d'aucuns qualifient d'« extrémistes » quant à certains dossiers, dont notamment ceux des réfugiés et du conflit syrien. Mme Le Pen estime en effet que « le régime de M. Assad est une solution bien plus rassurante pour la France que l'État islamique », et appelle au retour des réfugiés.
À l'heure où certains estiment que la candidate d'extrême droite veut « protéger son pays », d'autres la jugent « raciste » et « fasciste ». C'est dans ce cadre que s'inscrit par exemple la campagne lancée hier sur les réseaux sociaux pour protester contre la visite de Mme Le Pen. Un sit-in est prévu aujourd'hui, à midi, parallèlement à la conférence de presse de la candidate à la présidence française.
C'est aussi le cas, bien entendu, des milieux de l'opposition chiite, hostiles au Hezbollah et au régime Assad.
Interrogé à ce sujet par L'Orient- Le Jour, le journaliste Moustapha Hani Fahs, opposé de longue date au parti de Hassan Nasrallah, estime que « Marine Le Pen n'aurait pas dû se rendre au Liban qui ne peut pas supporter sa campagne ». « Le pays du Cèdre s'oppose aux idées de la candidate française », dit-il notant, toutefois, qu'« il existe, au Liban, une sorte de "droite confessionnelle'' qui se réjouit du racisme de Mme Le Pen ».
M. Fahs va même plus loin. Il dénonce les propos de la présidente du Front national tenus à l'issue de ses entretiens avec les responsables libanais. « Il s'agit d'une atteinte aux sunnites du monde arabe, dans la mesure où ces propos laissent entendre que tous ceux qui soutiennent la révolution syrienne sont des sympathisants de l'État islamique (EI) », explique M. Fahs. Le chef du courant du Futur, le Premier ministre Saad Hariri, qui a reçu la candidate hier, lui a d'ailleurs fait entendre un son de cloche similaire, lui reprochant cet amalgame entre modérés et radicaux.
De son côté, Ibrahim Chamseddine, ancien ministre d'État pour le Développement administratif et fils de l'ancien chef spirituel de la communauté chiite au Liban, feu Mohammad Mehdi Chamseddine, se veut plus prudent. Dans une déclaration à L'OLJ, M. Chamseddine indique que Marine Le Pen est « une femme politique française aux positions inconfortables, tant sur le plan local, que sur le plan européen ». Tout en affirmant « ne pas comprendre la visite de Mme Le Pen à Beyrouth », l'ancien ministre estime que le voyage de la candidate pourrait s'expliquer par « ses positions de repli sur soi qui exige un soutien extérieur que le Liban pourrait assurer ».
Sur un autre plan, Ibrahim Chamseddine critique vivement la vision « minoritaire » des chrétiens d'Orient que Le Pen dit défendre. Selon lui, « ces derniers ne sont aucunement minoritaires. Loin de là. Ils font partie intégrante du tissu de la région et n'ont pas besoin de soutien extérieur, quelle qu'en soit la source ».

« Un modèle à suivre »
À son tour, le coordinateur général des forces du 14 Mars, Farès Souhaid, préfère mettre l'accent sur les chrétiens du Liban en tant que modèle à suivre : « Les chrétiens libanais peuvent donner des leçons du vivre-ensemble avec l'autre, à l'heure où les Européens trouvent des difficultés à gérer des sociétés plurielles », dit-il à L'OLJ. Farès Souhaid ne cache pas, d'ailleurs, (son) « étonnement » quant à l'intérêt si particulier accordé au Liban et aux chrétiens de la région. « Cela est très douteux », souligne le coordinateur général du 14 Mars avant de poursuivre : « Nous estimons que tous ceux qui prétendent nous protéger se protègent eux-mêmes. » Selon lui, « Michel Aoun n'aurait pas dû recevoir Mme Le Pen ». Si certains estiment que ce comportement découle des responsabilités officielles de M. Aoun et tous ceux qui se sont entretenus avec la candidate française, Farès Souhaid déclare qu'il s'agit d'un « comportement opportuniste », dans la mesure où Mme Le Pen pourrait bien être la prochaine locataire de l'Élysée.

Une simple visite...
Si ce tableau défavorable à la visite de Marine Le Pen fait dire à certains que le Liban officiel n'aurait pas dû recevoir la présidente du FN, les partis chrétiens ne perçoivent pas les choses sous cet angle. À l'heure où le Courant patriotique libre souligne que le chef de l'État devrait recevoir tout le monde, les Forces Libanaises et les Kataëb préfèrent cerner l'événement à la simple visite d'une candidate française, tout en soulignant l'importance de saisir les occasions d'évoquer les sujets épineux, dont la question migratoire et les chrétiens d'Orient.
Joint par L'OLJ, l'ancien ministre de la Culture Gaby Layoun déclare à ce sujet que le chef de l'État est tenu de recevoir tout le monde. Il en veut pour preuve le fait qu'Emmanuel Macron s'est entretenu avec M. Aoun lors de sa visite à Beyrouth en janvier dernier. « Recevoir les candidats ne signifie pas adopter leurs idées », note-t-il avant de dresser ce constat : « Les chrétiens d'Orient n'ont pas besoin de protection. Il faut les soutenir pour qu'ils restent dans leurs pays. »
Du côté de Saïfi, le vice-président des Kataëb, Salim Sayegh, souligne à L'OLJ que « Marine Le Pen est un visiteur étranger qui préside un grand parti français, et qui est venue exprimer son attachement au Liban ». « Nous avons voulu mieux entendre son programme électoral concernant les sujets touchant le Liban, dont la question migratoire et la crise syrienne », dit-il. Tout en soulignant l'importance de « conjuguer fermeté et ouverture dans la lutte contre toute forme d'extrémisme », M. Sayegh indique que « la meilleure réponse au terrorisme reste le Liban en tant que message ». Selon l'ancien ministre des Affaires sociales, « la polémique observée au sujet de la visite de Mme Le Pen ne nous concerne pas, dans la mesure où nous sommes contre toute idéologie et tout dogmatisme. Nous avons une culture de la neutralité. Il faut donc essayer d'écouter tout le monde de façon objective ».
Même son de cloche à Meerab. Une source FL indique à L'OLJ que « le parti est prêt à recevoir tout le monde ». « Des relations historiques auxquelles nous sommes attachés lient les deux pays », ajoute-t-on avant de faire état de « certaines réserves sur quelques points ». Dans les mêmes milieux, on souligne que l'entretien prévu pour Mme Le Pen avec Samir Geagea (aujourd'hui) sera une occasion pour lui expliquer les moyens de défendre les chrétiens d'Orient et d'expliquer le danger que représente M. Assad.

« C'est le moment ou jamais »
Si Roger Eddé, qui a reçu Mme Le Pen à Jbeil dimanche soir, explique sa décision par la profondeur des « relations amicales entre les deux pays », l'économiste et analyste politique Sami Nader réduit l'importance de la récente polémique. Dans une déclaration à L'OLJ, M. Nader souligne qu'au lieu de s'y opposer, les gens hostiles à la visite de la candidate française devraient saisir cette occasion pour lui exposer leurs divergences de point de vue. C'est le moment ou jamais. « À travers sa visite au Liban, Marine Le Pen s'ouvre à l'islam. C'est l'occasion pour les Libanais de lui faire part de leur expérience du vivre-ensemble », conclut Sami Nader.
Il reste un problème important qui touche une bonne part de la population libanaise : la double nationalité que Mme Le Pen s'est dit déterminée à retirer, une fois élue. Joint par L'OLJ, le militant pour les Droits de l'homme Wadih el-Asmar explique cette décision par « le désir de Mme Le Pen de prouver que tous les problèmes de la France seront résolus si les émigrés quittent le pays ». « Il s'agit d'une mesure symbolique pour revenir au principe de la race pure », dit-il, d'un ton peu rassuré.

S'il est désormais fréquent que les candidats à la présidentielle française se rendent au Liban dans le cadre de leur campagne, la visite de la présidente du Front national, Marine Le Pen, a suscité de vives réactions dans les milieux politiques.
Ces réactions pourraient s'expliquer par les positions de Mme Le Pen – que d'aucuns qualifient d'« extrémistes » quant à certains...

commentaires (6)

QU,EST-ELLE VENUE FAIRE...

LA LIBRE EXPRESSION

13 h 50, le 21 février 2017

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Commentaires (6)

  • QU,EST-ELLE VENUE FAIRE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    13 h 50, le 21 février 2017

  • Yâ äâïybichoûm ! Recevoir une pareille, alors que 75% des Français, si pas plus, la rejette.... Dans les Poubelles de l'histoire de LA FRANCE !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    13 h 13, le 21 février 2017

  • On lit bien que le souci des libanos français c'est pas la sortie de l'euro ou de l'Europe. Ni les taxes à subir et l'âge de la retraite . Pour nous autres , il n'y aura d'intérêt que dans la politique étrangère de la France, et la messe est dite , Marine ne mâche pas ses mots et n'a pas sa langue dans sa poche. ELLE EXPRIME CE QUE LES FRANÇAIS LIBRES ET SOUVERAINS SOUHAITENT ENFIN À LEUR PAYS , LA FRANCE . LE HÉROS BASHAR ET SES ALLIÉS RUSSES IRANIENS IRAKIENS ET DU HEZB RÉSISTANT SERONT LES GRANDS VAINQUEURS , PUISQU'IL EN FAUDRA UN DE TOUTE FAÇON. MERCI DE PUBLIER MÊME SI ÇA FAIT MAL DE L'ENTENDRE .

    FRIK-A-FRAK

    12 h 56, le 21 février 2017

  • Divisés, en effet, entre ceux xénophobes et racistes anti-Musulmans et TOUS les autres....

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    11 h 20, le 21 février 2017

  • La Marinade, hier, à Saïfi ; yîîîh ; chez…. Les Phalanges ! Läâmâh ! On se serait crus, derechef revenus, …. En 30-40 ! Yâ wâïyléééh !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    10 h 58, le 21 février 2017

  • Pourquoi faut-il absolument faire passer cette femme pour un monstre? Elle est solide, et dit à voix haute ce que beaucoup pense tout bas. Si elle avance là où son propre père a échoué, c'est qu'elle a des atouts...

    NAUFAL SORAYA

    07 h 57, le 21 février 2017

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