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Moyen Orient et Monde - Sommet du climat

« Si Trump veut se retirer de l’Accord de Paris, il le peut, mais il devra en assumer les conséquences »

Un expert et militant américain, rencontré lors de la COP22 qui se tient actuellement à Marrakech, dit « espérer » qu'il sera possible de convaincre le président élu des États-Unis de ne pas abandonner les efforts mondiaux de lutte contre le changement climatique.

Des activistes américains manifestent durant le sommet du climat à Marrakech pour protester contre l’élection de Donald Trump aux États-Unis. Fadel Senna/AFP

Lorsque l'actuelle Conférence des parties (Cop22) organisée à Marrakech a commencé, c'était lundi dernier, le 7 novembre, la veille de l'élection américaine. Selon plusieurs témoins sur place, l'atmosphère était au beau fixe, après l'adoption, en 2015 à Paris, d'un accord jugé « historique » qui a rassemblé 190 pays dans la même course contre le changement climatique. Ce qui a d'autant plus contribué à la bonne humeur, c'est que cet accord est entré en vigueur à une vitesse record, le 4 novembre (soit quelques jours seulement avant le sommet), après sa ratification par un nombre suffisant de pays (plus de 105 à ce jour). La COP de Marrakech, loin du suspense qui avait régné à Paris l'année dernière, devait donc entamer les discussions en vue de décider des mesures pratiques visant à mettre en application cet accord, notamment les épineuses questions du financement (100 milliards de dollars par an devront être assurés par les pays riches à partir de 2020), et la réduction de l'écart entre, d'une part, les ambitions nationales volontaires des pays pour la réduction de leurs émissions et, d'autre part, les objectifs fixés par l'accord pour faire en sorte que la température de la terre n'augmente pas de plus de 1,5 à 2 degrés par rapport à l'ère préindustrielle, le repère pris en considération par la science.

Dans cette ambiance calme et studieuse, donc, la nouvelle de l'élection surprise de Donald Trump à la présidence des États-Unis est tombée comme une massue : le candidat républicain, devenu président, avait en effet menacé, au cours de sa campagne, de retirer les États-Unis de cet accord, alors même que l'administration de l'actuel président Barack Obama avait joué un rôle prépondérant dans les négociations qui y ont mené. Les personnalités politiques de plusieurs pays ainsi que les organisations internationales avaient vite fait de minimiser l'incidence de l'événement et se montrer positives, mais les implications de cette élection sont-elles aussi anodines que l'on croit ?

Prié de commenter les perspectives de l'élection de M. Trump à la présidence des États-Unis, Alden Meyer, directeur de stratégie à la « Union of Concerned Scientists », se montre modérément pessimiste en répondant aux questions de L'Orient-Le Jour. Il n'hésite pas à confirmer que le président élu a les moyens légaux de retirer les États-Unis d'un accord global que ce pays a contribué à réaliser. « S'il est prêt à assumer les dégâts politiques qu'une telle décision impliquerait, il est parfaitement capable de le faire, dit-il. Techniquement, il a la possibilité de retirer les États-Unis de l'Accord de Paris dans quatre ans. Ou encore, s'il veut vraiment sortir le grand jeu, il pourrait se retirer en une seule année de toute la Convention de Rio de 1992, qui avait été négociée par un président républicain et avait été ratifiée à l'unanimité par le Sénat américain ». La Convention de Rio, rappelons-le, est à la base de la création de la Convention cadre des Nations unies pour le changement climatique (CCUNCC) et de tout le processus de négociations climatiques.

Le nouveau président américain peut retirer son pays de la course climatique, mais le ferait-il vraiment ?

« J'espère qu'il ne le fera pas, ce serait stupide de sa part, répond cet expert et militant qui suit de près les négociations et fait du lobbying depuis de nombreuses années. Ce serait dommageable pour son propre agenda, et créerait des tensions avec les autres pays sur des questions qui lui tiennent à cœur comme le commerce international ou la lutte contre le terrorisme. Nous tentons de le convaincre de ne pas recourir à cette mesure extrême, nous appelons aussi des leaders internationaux à lui faire entendre raison, mais nous ne savons pas vraiment quelles sont ses intentions ».

Comment la délégation US gère-t-elle cette situation?

« La délégation se trouve dans une position très délicate, dit-il. Elle représente de toute évidence une administration qui changera bientôt de mains. Les autres négociateurs savent pertinemment bien que ce qu'avancent les actuels négociateurs n'est pas représentatif de la politique de la prochaine administration. Ceux-ci prennent ce revers avec une grande dignité, cependant, et continuent à faire du très bon travail, selon moi. »
Et pourtant, les États-Unis avaient regagné ces dernières années un statut de leader dans ce domaine... « Tout à fait, répond Alden Meyer. Le risque, selon des articles de la presse américaine, c'est que sous l'administration Trump, les États-Unis n'abdiquent de ce rôle au profit de pays comme la Chine ou autres. »
Et d'ajouter: « C'est une décision que M. Trump devra prendre: voudra-t-il se cantonner dans le rôle de climatosceptique et crier à qui veut l'entendre que la question du changement climatique n'est pas importante, alors même que 190 pays ont adopté un même accord (de Paris), reconnaissant qu'elle est la menace la plus dangereuse pour l'humanité ? S'il le fait, il y aura des conséquences catastrophiques. Nous espérons pouvoir le convaincre, et convaincre ses conseillers, que ce n'est pas un acte responsable. »

Quelles seraient les conséquences d'un éventuel retrait américain sur l'Accord de Paris en lui-même ?

« Cela signifiera tout simplement que les États-Unis ne seront plus une partie de cet accord, que ce pays ne devra plus présenter des rapports pour rendre compte de ses actions en vue d'honorer ses engagements dans le cadre de cet accord, mais le reste du monde poursuivra sur cette même voie comme lorsque le président George W. Bush avait retiré son pays du Protocole de Kyoto (NDLR: accord sur une réduction des émanations de gaz à effet de serre, voté en 1997 et entré en vigueur en 2005, concernant principalement les pays développés) », souligne l'expert.

Cette décision du président Bush avait cependant grandement affecté la bonne marche de Kyoto...

« Ce n'est pas exactement vrai, le reste du monde a décidé de poursuivre la mise en place de ce protocole, dit-il. Et là encore, les pays du monde ont clairement fait savoir qu'ils mettront en place l'Accord de Paris, avec ou sans les États-Unis. »

Pour infléchir la trajectoire des trois degrés

Interrogé sur ce à quoi il s'attend d'ici à la clôture de cette COP de Marrakech, le militant américain dit espérer « une décision forte pour que soit complétée une feuille de route claire concernant l'application de l'Accord de Paris, ainsi que la liste des règles propres à cet accord ». Il évoque également « la nécessité de prendre une décision spécifique sur les manières d'instaurer le dialogue d'harmonisation entre les pays d'ici à 2018, à la COP 24 ». « C'est en effet au cours de ce sommet-là que seront discutés les moyens d'augmenter les ambitions des pays (dans la réduction des gaz à effet de serre) et de réduire l'écart entre les engagements nationaux et ce qui est vraiment demandé pour maintenir la température de la terre dans les limites de 1,5 degré de plus que l'ère préindustrielle, poursuit-il. En effet, selon le Programme des Nations unies pour l'environnement (Pnue), si nous nous en tenons aux engagements actuels des pays, nous serons toujours sur une trajectoire de 2,9 à 3,4 degrés de réchauffement de la terre, d'ici à la fin du siècle. C'est de loin supérieur à l'objectif défini dans l'Accord de Paris, qui est de moins de 2 degrés, et le plus proche possible de 1,5 degré. »
Il conclut : « Nous avons encore beaucoup de travail à faire pour réduire cet écart entre les engagements des pays et les objectifs pour sauver la planète, et il faut que nos efforts commencent tout de suite. Nous espérons des engagements forts des pays d'ici à la fin de la semaine prochaine. »


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commentaires (3)

UN GAMIN PARIS M,A DIT A L,OREILLE... SI... ET SI... ET SI...

JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

17 h 36, le 14 novembre 2016

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Commentaires (3)

  • UN GAMIN PARIS M,A DIT A L,OREILLE... SI... ET SI... ET SI...

    JE SUIS PARTOUT CENSURE POUR AVOIR BLAMER GEAGEA

    17 h 36, le 14 novembre 2016

  • On arriverai même à nous faire croire que Trump serait justiciable du tpi cpi xcbn tsl ou quelque chose comme ça. Bon ! A quand des sanctions embargos boycott des usa etc... hahahahahaahahahaah. ...

    FRIK-A-FRAK

    13 h 56, le 14 novembre 2016

  • Un seul commentaire : Trumps n'a que faire de "conséquences"... Il ne subira rien, puisque rien ne semble le toucher. F. MALAK

    Rotary Beyrouth

    11 h 33, le 14 novembre 2016

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