Le chef des Marada, le député Sleiman Frangié, a entamé hier soir son entretien télévisé très attendu avec Marcel Ghanem en balayant tout doute possible sur le maintien de sa candidature à la présidentielle. « Je ne me retirerai pas de la course présidentielle, et nous sommes prêts, psychologiquement et politiquement, à gagner ou à perdre », a-t-il déclaré.
Il a jugé en outre improbable que le compromis Aoun « sauve le pays », et a souhaité qu'il ne nous mène pas vers « une étape incertaine et obscure ». L'historique du fondateur du Courant patriotique libre, joint à celui des Forces libanaises, alimenterait son scepticisme. « Les noms de Michel Aoun et de Samir Geagea, ainsi reliés, n'ont jamais été synonymes de stabilité », a-t-il dit, revenant sur des étapes-clés de l'histoire du pays. Il a ensuite remonté les étapes de sa relation personnelle avec le général Michel Aoun, de manière à déconstruire les accusations « d'ingratitude » lancées contre lui par le camp aouniste. Il a notamment révélé que « la seule concession » que lui ait proposée le général Aoun a été le portefeuille des Télécommunications, qui a fini par être confié au ministre Gebran Bassil. Le leader des Marada a dit l'avoir décliné par souci de maintenir une indépendance par rapport au bloc du Changement et de la Réforme. Il aurait été surtout importuné par l'attitude de Michel Aoun à son égard lorsque c'était lui qui avait bénéficié de l'appui de Saad Hariri. « Après mon entretien avec Saad Hariri à Paris, j'ai été voir Michel Aoun pour lui dire que je rentrais avec ce soutien mais qu'il continuerait à avoir mon appui s'il maintenait sa candidature. Je lui ai ensuite demandé s'il ferait de même pour moi, c'est-à-dire s'il se retirerait et m'appuierait si les chances étaient en ma faveur, il m'a répondu : "Non. Tu es encore jeune, et chaque maronite ambitionne la présidence. Bon courage" », a révélé Sleiman Frangié, rappelant que cette conversation avait eu lieu après un an et demi de vacance présidentielle.
Mais ce sont surtout des messages à peine voilés au Hezbollah que le député de Zghorta a adressés hier. S'il a dit ne rien reprocher au parti chiite, et juré que « Sleiman Frangié est dans le cœur de Hassan Nasrallah », il a néanmoins déploré le fait que « les porte-voix du 8 Mars m'ont accusé de trahison pour avoir scellé une entente avec Saad Hariri sur la présidentielle, ces mêmes porte-voix qui clament aujourd'hui la victoire de Michel Aoun, lequel a scellé une entente similaire ».
« Je ne soutiendrai pas Hariri si... »
Le leader des Marada s'est ainsi étalé sur les circonstances de l'adhésion du courant du Futur à sa candidature, laissant entendre que le 8 Mars n'avait rien à craindre. « Je connais mon poids politique et ce n'est pas sans concertation préalable avec le Hezbollah que j'ai évoqué avec Saad Hariri la présidence du Conseil », a-t-il assuré. Il a révélé pour la première fois la teneur du premier entretien qu'il avait eu avec Saad Hariri à Paris. « Cela devait être une rencontre de prise de contact. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle débouche sur un accord, après trente minutes de conversation politique sérieuse. Je me souviens de la première question que Saad Hariri m'a posée alors : irais-tu en Syrie si tu étais élu président ? J'ai répondu par l'affirmative, en précisant toutefois que je prendrais en compte ses réserves et trouverais des issues médianes lorsque le cas se présenterait. La deuxième question a porté sur la loi électorale, qui était toujours examinée en commissions à l'époque. Il m'a dit qu'il tenait à la loi de 1960, de crainte que le Hezbollah ne cherche à réduire son bloc parlementaire par le biais d'une nouvelle loi. Je lui ai dit que j'étais disposé à approuver une nouvelle loi garante d'une juste représentativité, c'est-à-dire qui lui ferait justice à lui. La question de la nomination du commandant en chef de l'armée a également été soulevée, et nous nous sommes entendus sur le fait qu'il s'agit d'un poste maronite devant faire l'objet d'une entente nationale, c'est-à-dire, à mon sens, qui reconnaisse la résistance. Il m'a ensuite demandé si j'avais une idée sur la raison pour laquelle les responsables saoudiens avaient tellement d'estime pour moi. Il m'avait demandé si j'étais disposé à visiter l'Arabie éventuellement, j'ai répondu par l'affirmative. Cela allait de soi puisque la partie saoudienne devait être l'un des parrains régionaux du compromis, contrairement au cas présent (le compromis Aoun n'a toujours pas d'encadrement régional visible, NDLR) », a expliqué Sleiman Frangié.
« Je n'ai cessé de répéter à tous mes interlocuteurs, y compris le président François Hollande, que l'étape préalable à ce compromis restait d'en convaincre le général Michel Aoun, en sa qualité de candidat du 8 Mars. L'on projetait un ou deux mois de pourparlers avec lui pour régler l'affaire. Le Hezbollah était ouvert à l'idée, mais c'est l'appui ultérieur de Samir Geagea à Michel Aoun qui a poussé le Hezb à se rétracter et à durcir sa position », a relevé Sleiman Frangié, rejetant l'argument selon lequel le Hezbollah ne voulait pas de président à l'époque. « La perspective d'une séance électorale prochaine a prouvé le contraire », a-t-il dit.
Il a stigmatisé en outre « les tentatives de Samir Geagea de se trouver un rôle dans l'élection de Michel Aoun », et estimé que l'élection de celui-ci ne sera une victoire « ni pour les uns ni pour les autres », et atténuant l'avis selon lequel cette élection serait comparable à la cohabitation Émile Lahoud-Rafic Hariri. Néanmoins, Sleiman Frangié a dit clairement qu'il ne soutiendrait pas la désignation de Saad Hariri à la présidence du Conseil, si le président de la Chambre le lui demandait...
commentaires (2)
"SI LE PRÉSIDENT DE LA CHAMBRE LE LUI DEMANDAIT" IL N'A MÊME PAS HONTE IL L'ANNONCE CARRÉMENT QUE SON RÔLE SE LIMITE À SERVIR BERRI ET ASSAD. UN VRAI GRAND MERCENAIRE ET FIER DE L'ÊTRE. C'EST BIEN ÇA LES FRANGIÉ.
Gebran Eid
15 h 24, le 25 octobre 2016