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Campus - Témoignages

Le don d’organes : qu’en pensent les étudiants libanais ?

Les jeunes Libanais constituent 42 % des donneurs d'organes au pays du Cèdre et près de 32 % des receveurs de greffes. À l'occasion de la Journée mondiale du don d'organes, ce 17 octobre, Campus est allé à la rencontre des étudiants pour recueillir leurs avis et positions sur ce sujet.

Des étudiants de la LAU soutenant NOD Liban lors du marathon de Beyrouth en 2015.

Ils avaient respectivement 18 et 17 ans, Nicolas Sleiman et son frère Andy, lorsqu'un accident de la route a arrêté brutalement le cours de leur vie. Andy est décédé sur le coup. Une semaine plus tard, Nicolas a été déclaré en état de mort cérébrale. Peu de temps avant cette tragédie, les deux jeunes étudiants avaient décidé de s'inscrire comme donneurs d'organes potentiels auprès de l'Organisation nationale pour le don et la greffe des organes et des tissus (NOD Liban). Un geste qui a permis d'éviter d'autres drames dans d'autres familles. « Six personnes vivent aujourd'hui grâce aux organes de Nicolas. Son cœur bat dans le corps d'un père de famille, deux personnes aveugles voient à travers ses yeux, ses reins ont sauvé deux individus de la douleur de la dialyse, et son foie a permis à quelqu'un d'autre de mener une vie normale », indique Élie Sleiman, le père de Nicolas.
Les jeunes au Liban représentent 42 % des donneurs d'organes et près de 32 % des receveurs de greffes selon NOD Liban. Pourtant, beaucoup hésitent encore à appuyer cette cause. « Il m'est difficile de porter un avis sur le don d'organes en l'absence d'informations sur la question », lance Mira Abou Zaki, 20 ans, étudiante en gestion à l'Université La Sagesse. Élodie Khoury partage le même point de vue. La jeune étudiante en droit s'interroge sur les règles qui régissent le don d'organes au Liban.
Nombreux sont les jeunes qui, à l'instar de Mira et d'Élodie, se disent incapables de se prononcer en faveur du don d'organes par manque de connaissance sur ce sujet. Mais si certains jeunes hésitent, d'autres se prononcent clairement contre le don d'organes. Élias Mokbel, 22 ans, et Perla Ghoulam, 21 ans, étudiants en forensic science à l'AUST, refusent le don d'organes car à leur avis la mort cérébrale suite à laquelle la greffe est pratiquée n'est pas une « mort finale ». Carole Abdo (21 ans), étudiante en biochimie à l'Université libanaise, estime que cette pratique est une forme d'euthanasie. Toujours dans le même camp, à l'AUST, Mohammad Arafat, étudiant en gestion de 19 ans, et Anna-Maria Tannoury, 20 ans, étudiante en forensic science, se disent contre le don d'organes car ils ont peur du commerce illégal d'organes.
Certains étudiants, par contre, ont exprimé clairement leur soutien au don d'organes. Georges Araa, 22 ans, encourage le don d'organes « car il permet à des personnes gravement malades de survivre ». Michelle Waked, étudiante en finances, acquiesce : « Il faut être empathique et penser à ces personnes qui risquent leur vie parce que d'autres refusent de leur offrir leurs organes qui seront putréfiés peu de temps après leur mort. »

Du côté de NOD Liban
Le professeur Antoine Stéphan, vice-président de NOD Liban, explique : « Le don d'organes est une activité volontaire, gratuite et anonyme, exercée dans le cas de mort cérébrale d'un donneur potentiel. Au Liban, ce donneur peut sauver la vie de six personnes (deux reins, un cœur, un foie, deux cornées). » Concernant la nature irréversible de la mort cérébrale, le professeur Stéphan, qui est enseignant à la Lebanese American University (LAU) et néphrologue à l'hôpital Rizk, souligne : « Il y a deux façons de mourir, soit par arrêt cardio-respiratoire (mort classique), soit par arrêt total et irréversible des fonctions vitales contrôlées par le cerveau. La circulation et l'oxygénation des organes dans ce cas sont artificiellement maintenues pour préserver leurs fonctions. » Il a été observé, précise le Pr Stéphan, que jamais un patient chez lequel on a diagnostiqué une mort cérébrale n'a survécu, ce qui implique que la mort cérébrale représente la mort de l'individu. Et en réponse aux jeunes qui associent à tort le prélèvement d'organes chez les patients atteints de mort cérébrale à l'euthanasie, le professeur Stéphan rappelle que, à l'inverse de l'euthanasie, « la mort cérébrale n'est jamais provoquée ni même facilitée. De plus, les personnes qui s'occupent de la réanimation du malade ne font pas partie de l'équipe de greffe ». Et de préciser : « La mort cérébrale est diagnostiquée d'une façon indubitable, à la suite de trois examens médicaux approfondis pratiqués par trois spécialistes différents à 6 heures d'intervalle, ainsi qu'un test confirmatoire exigé par la loi libanaise. Ce n'est qu'après la mise en application de cette procédure qu'elle est déclarée. »
Quant au commerce des organes, le professeur Stéphan affirme que « grâce à une position ferme du ministère de la Santé et à la coopération des hôpitaux concernés, NOD Liban a réussi à éliminer ce commerce ». « Les patients en quête d'un organe subissent au préalable un examen médical psychologique approfondi, ajoute-il. S'ils s'avèrent être de bons candidats à la greffe, ils s'inscrivent sur la liste d'attente nationale. Cette liste se trouve exclusivement à NOD Liban et comprend aujourd'hui 550 personnes. Ces individus fournissent par la suite un échantillon de sang, qui sera préservé au laboratoire central affilié à NOD Liban, afin de permettre à l'organisation de trouver le donneur le plus adéquat parmi les donneurs potentiels décédés. Ces derniers sont recensés dans une vingtaine d'hôpitaux libanais engagés en faveur de la promotion du don d'organes. »
Mme Haïfa Sadeq, responsable de communication auprès de NOD Liban, affirme que l'organisation organise régulièrement des campagnes de sensibilisation sur le don d'organes ciblant les jeunes, participe à des événements universitaires et donne des conférences sur ce sujet. Les étudiants sont également invités à aider l'organisation dans certaines de ses activités à titre de bénévoles. « Des étudiants de la LAU et de l'Université Haïgazian ont coopéré avec NOD Liban lors du marathon de Beyrouth en 2015 afin de promouvoir le don d'organes. Les premiers ont collaboré au stand de NOD Liban et les seconds ont couru pour cette cause », ajoute Mme Sadeq qui invite les jeunes à rejoindre NOD Liban au Grand Cinemas à ABC Achrafieh, le 19 octobre, pour assister à l'avant-première de Film Améréké Tawil (Long film américain) de Ziad Rahbani. Un événement qui servira à collecter des fonds pour l'organisation qui compte sur les jeunes afin de changer la situation actuelle au Liban où il y a encore une grande réticence au don d'organes.

Ils avaient respectivement 18 et 17 ans, Nicolas Sleiman et son frère Andy, lorsqu'un accident de la route a arrêté brutalement le cours de leur vie. Andy est décédé sur le coup. Une semaine plus tard, Nicolas a été déclaré en état de mort cérébrale. Peu de temps avant cette tragédie, les deux jeunes étudiants avaient décidé de s'inscrire comme donneurs d'organes potentiels...

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