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À La Une - Liban-La situation

Le mot de passe a circulé : prorogation d’un an du mandat de la Chambre

Le président de la Chambre, Nabih Berry. Photo d'archives/AFP

Prorogation d’un an du mandat de la Chambre, à compter du 30 juin, telle est la teneur de l’accord de principe passé hier entre le président de la Chambre, Nabih Berry, et le chef du bloc du Futur, Fouad Siniora (voir par ailleurs). C’est en tout cas autour de cette tête de chapitre que les concertations se déroulaient dans la nuit d’hier à la Maison du Centre, au sein du bloc du Futur et du 14 Mars, ainsi qu’à Rabieh, où Ali Hassan Khalil a rencontré de nuit Michel Aoun.
Si tout se passe bien, et si le projet est assuré d’une majorité à la Chambre, il sera soumis au vote et approuvé vendredi, à l’expiration de la session ordinaire de la Chambre. D’ores et déjà, il bénéficie de l’approbation du tandem Amal-Hezbollah, du bloc de Walid Joumblatt, du courant du Futur et, semble-t-il, des Kataëb, assurent des sources informées. Michel Aoun, lui, assisterait au vote, c’est-à-dire ne provoquerait pas de défaut de quorum, mais s’abstiendrait. L’attitude des Forces libanaises était hier soir une inconnue, mais ce parti pourrait finir par se solidariser avec ses alliés.


Un page tumultueuse de la vie parlementaire sera ainsi tournée, après des semaines d’essais infructueux de parvenir à une nouvelle loi électorale, sachant que la loi actuelle, celle de 1960, est rejetée par le patriarcat maronite et les Forces libanaises, et que la loi dite orthodoxe est jugée contraire au pacte de vie commune à la base du Liban.

 

(Repère : Loi électorale, délais, scrutin... Quelques repères pour tenter d'y voir plus clair)



Personne n’y croyait plus...
Comment est-on parvenu à cette décision ? Dans les milieux politiques proches des négociations, on précise qu’en tout état de cause, il n’y avait plus de temps pour organiser des élections sur base de la loi de 1960, à laquelle, d’ailleurs, plus personne ne croyait, et qu’une prorogation était donc indispensable pour éviter le vide institutionnel. Du reste, le problème particulier de la loi de 1960 a été résolu quand Bkerké l’a clairement rejetée une fois de plus, et que Samir Geagea a estimé que son maintien équivaudrait à une trahison. Son acceptation du bout des lèvres par Michel Aoun, après ça, ne faisait plus le poids.


Que restait-il, sinon une prorogation ? Selon les milieux politiques cités, le président de la Chambre disposait encore d’une option : celle de soumettre au vote les trois ou quatre projets de lois électorales qui ont circulé dans les milieux parlementaires au cours des deux derniers mois. Toutefois, tous les forcings exercés sur Nabih Berry sont restés sans suite. Renonçant à poursuivre une chimère qui s’éloignait comme l’horizon, le président de la Chambre a décidé de ne pas soumettre ces projets avortés au vote pour épargner aux Libanais de nouvelles impasses, de nouveaux vetos et de nouveaux défauts de quorum.


Mais, ajoutent les sources citées, dans la décision de renoncer aux élections et de s’engager dans la voie de la prorogation, c’est autant la stérilité des débats parlementaires de ces derniers mois qui est en cause, que la dégradation subite de l’état de la sécurité consécutive à la décision du Hezbollah de s’engager totalement aux côtés des troupes régulières syriennes.

 

(Repère :Loi électorale : petit guide à l’usage de l’électeur libanais perplexe)

 


Réalisme et pragmatisme
La décision de prorogation sert-elle donc les intérêts du Hezbollah ? Oui, mais pas exclusivement. Elle sert aussi les causes de la modération et de l’unité des musulmans, a dit Fouad Siniora à l’issue de sa longue réunion, hier, avec Nabih Berry. Le courant du Futur, qui était en principe hostile à une prorogation de deux ans, que souhaitait le Hezbollah, a fini par se ranger à cette idée, à condition que sa durée soit ramenée à un an. « La demande émanant du Hezbollah était insistante », a précisé une source parlementaire.


On souligne, dans les milieux concernés, que le courant du Futur, qui semble céder au Hezbollah, fait aussi preuve de réalisme et de pragmatisme, et qu’il ne pouvait rester insensible aux « signes » d’une dégradation sécuritaire qui s’accélère et qui pourrait aller crescendo si des acteurs régionaux entraient en scène. On pense à la levée de l’embargo sur les armes à destination de l’ASL prise par l’Europe, à la polémique opposant Israël à la Russie au sujet du système de défense antiaérienne que Moscou veut livrer à Damas, aux incidents possibles sur le Golan, à l’attaque contre l’armée à Ersal, aux embrasements sporadiques à Tripoli, aux menaces adressées par l’ASL au Hezbollah, sans oublier la bataille de Qousseir, qui est cruciale pour tous.


« Dans ce climat, il était justifié de différer l’organisation des élections, affirme-t-on dans les milieux concernés. Nous avons été mis au pied du mur. Continuer d’avancer en direction des élections, c’était faire preuve d’aventurisme. »

 

(Notre dossier : Les électeurs libanais ont la parole)



Mauvaise passe
Dans ces mêmes milieux, on juge aussi qu’en tout état de cause, une prorogation d’un an du mandat de la Chambre vaut mieux que des élections sur la base de la loi de 1960, qui aurait ramené les mêmes figures à la Chambre... mais pour quatre ans.
Dans les milieux musulmans cette fois, on estime que la décision de prorogation s’imposait « logiquement », et qu’elle détendra l’atmosphère et permettra de ralentir la montée de la tension dans le pays.


Que va faire le Premier ministre désigné dans ce cas ? M. Siniora a été très franc à ce sujet, à l’issue de son entretien avec M. Berry. « On n’en a pas parlé, a-t-il dit. Il sera bien temps de le faire une fois la prorogation faite, a-t-on ajouté hier soir de source informée. Il va de soi qu’en l’absence d’élections, un gouvernement Tammam Salam devra répondre aux mêmes exigences d’équilibre politique que le gouvernement démissionnaire. Bonjour donc les complications. Mais au moins on dénouera chaque nœud tout seul, sans la pression de délais et d’échéances immédiates. Quant à l’élection d’un nouveau chef de l’État, en mars prochain, il sera toujours temps d’y penser. Franchissons d’abord cette mauvaise passe. »

 

 

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