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À La Une - Villes

« Un accès égal à des ressources propres »

Florian Lennert est directeur associé de la « London School of Economics », et « visiting fellow » au LES Grantham Research Institute for Climate and Environment. Il est associé à un projet de développement urbain durable dans un campus en plein Berlin.

Florian Lennert est directeur associé de la « London School of Economics »

OLJ. Quelle est la définition d’une ville intelligente ?
F.L. Il y a plusieurs définitions suivant l’angle adopté. Les premiers à avoir parlé de « smart cities » avaient en tête une approche plutôt informatique, décrivant le flux d’informations qui parcourt une ville grâce aux nouvelles technologies. À mon avis, cette approche est quelque peu réductrice car elle évoque l’information sans toucher à la réalité physique de la ville. Voilà pourquoi, par le terme de villes intelligentes, nous signifions désormais une ville durable, qui utilise l’énergie de manière rationnelle et minimise la dégradation de son environnement et de ses ressources. Il est important de travailler sur l’aspect technologique pour rendre, par exemple, les bâtiments plus économiques en plaçant des détecteurs de mouvements qui fermeraient les fenêtres automatiquement après une certaine durée. On peut l’appliquer aussi au transport, aux feux rouges, pour faire en sorte que les voitures s’arrêtent moins souvent, donc émettent moins de CO2. Mais il faut aussi réfléchir aux différentes parties de la ville de manière plus globale. Une cité « intelligente » est celle qui assure
un équilibre entre les aspects énergétiques, environnementaux et sociaux.

Comment est-ce que cela se reflète sur la qualité de vie ?
On peut comprendre l’effet de telles mesures sur la qualité de vie en observant, a contrario, les effets néfastes d’une gestion « inintelligente » d’une ville : les pots d’échappement des voitures, la pollution sonore... Il faut considérer les effets bénéfiques de la bonne gestion des espaces verts d’une ville sous l’angle de la réduction de la pollution de l’air, la rationalisation de l’utilisation de l’eau afin que les ressources hydrauliques restent suffisantes, le traitement des eaux usées et de l’eau, le recyclage des déchets... Ce sont des fonctions qui peuvent être conçues plus intelligemment si l’on pense d’une manière qui transcende les barrières sectorielles.

Quels sont les arguments qui pourraient le mieux convaincre le public et les autorités de se lancer dans une approche de cité intelligente : l’intérêt économique, la protection de la santé, ou la préservation de l’environnement ?
Différents publics sont sensibles à différents arguments. L’argument économique est utile parce qu’il traverse tous les aspects de la question. Mais le cœur du problème reste la qualité de l’environnement, les données révélées par les indicateurs environnementaux : combien de particules dans l’air, combien de polluants, la quantité d’énergie consommée, quelle superficie de sol asphaltée, etc. Enfin, il faut voir comment rendre tout cela applicable dans une cité. Il est important d’assurer un accès égal à ces ressources pour tous les citoyens. C’est une décision liée à la gouvernance : voulons-nous une approche commerciale ou préférons-nous assurer un accès équitable aux ressources, quels que soient les moyens financiers de l’abonné ?
À titre d’exemple, n’est-il pas absurde qu’à Nairobi on paye son eau plus cher qu’à Berlin ? Il est vrai que la ressource est plus rare dans la première ville que dans la seconde, mais si on part du principe que l’accès à une eau propre est un droit humain de base, la situation devrait être différente.

Quel lien avec la démocratie ?
Je crois que le lien est très étroit. Toutes les institutions qui ont trait à l’exploitation des ressources doivent être gérées par le secteur public, selon moi. Une ville peut décider de rester propriétaire de l’eau, mais charger des sociétés privées de la gérer efficacement dans l’intérêt du public. Mais une ville, pour rester durable, devrait, selon moi, demeurer propriétaire de son infrastructure d’électricité et d’eau. L’eau, l’énergie ou l’éducation ne sont pas des produits, ce sont des ressources à gérer.

Quel avenir pour les villes vertes ?
Il est certain que l’on ne peut pas transformer les villes d’un jour à l’autre. En Allemagne, la question que nous nous posons est de savoir si nous pourrons un jour dépendre à 100 % des énergies renouvelables. Cela prendra de toute évidence 20 à 30 ans. Mais ce que nous devons décider, c’est la manière de s’y prendre pour effectuer cette transformation. Il existe des solutions technologiques, des questions sociales, des aspects économiques... L’affaire est complexe. Il faut voir comment se mettre sur la bonne voie, comment créer un appui populaire, comment faire en sorte que le coût de cette transformation reste supportable et divisé de manière équitable entre les différents acteurs. Pour mieux visualiser ce changement, nous avons pensé qu’il valait mieux construire une cité modèle, qui deviendra une référence pour les gens. Nous avons donc décidé d’appliquer ces concepts sur un campus actuellement en voie de développement économique, en plein Berlin, pour y installer des énergies renouvelables et des systèmes durables. Il servira à montrer au public l’intérêt économique de l’application de telles solutions. De plus, il s’agira d’un endroit habité, donc d’un laboratoire vivant qui nous permettra d’identifier les failles et de les corriger. Notre institution est scientifique et publique à la fois, mais le projet est géré par un partenariat public-privé.
OLJ. Quelle est la définition d’une ville intelligente ? F.L. Il y a plusieurs définitions suivant l’angle adopté. Les premiers à avoir parlé de « smart cities » avaient en tête une approche plutôt informatique, décrivant le flux d’informations qui parcourt une ville grâce aux nouvelles technologies. À mon avis, cette approche est quelque peu réductrice car elle évoque...

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