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Alcool et protocole : quelques explications et précédents

Existe-t-il des règles protocolaires à ce sujet? Quels sont les précédents dans l'histoire de la diplomatie? L'Orient-Le Jour fait le point.

En haut, les présidents américain Barack Obama et russe Vladimir Poutine, un verre de vin à la main. En bas, l'ancien président iranien Mahmoud Ahmadinejad, le président syrien Bachar el-Assad et le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, autour d'une table où l'alcool n'est pas servi. Photos d'archives/Reuters

Le 17 novembre prochain, le président iranien Hassan Rohani doit rencontrer, à l'Élysée, son homologue français François Hollande. Ce dernier avait prévu de recevoir son hôte autour d’un déjeuner, mais la presse française a rapporté que le repas n’aura finalement pas lieu. Les raisons de cette possible annulation : l'alcool, dont il est prévu qu'il soit servi lors du déjeuner.

"Conformément aux valeurs et aux enseignements islamiques, les responsables de la République islamique ne participent pas à des cérémonies où de l'alcool est servi", avait déclaré, mercredi, un diplomate chargé du protocole au ministère iranien des Affaires étrangères, cité par l'agence de presse Isna.

Quels sont les usages protocolaires dans ce genre de dossier? Y a-t-il déjà eu des cas similaires dans l’histoire de la diplomatie ? L’Orient-Le Jour fait le point.

Pour Jean-Paul Pancracio, auteur de l’ouvrage Protocole et cérémonial de l’État, "le principe universel stipule que les règles et usages protocolaires du pays hôte soient appliqués lors de toute visite officielle". "De plus, explique-t-il à L’Orient-Le Jour, lors d'un déjeuner ou d'un dîner officiel à l’Élysée ou au Quai d'Orsay, il peut y avoir des dizaines d'invités dont la grande majorité est française et probablement non musulmane. Il n'y a aucune raison qu'ils soient privés d'un des plaisirs qu'offre une table française de haute gastronomie".

M. Pancracio indique toutefois que la France "fait très attention à ne pas servir de viande de porc ou tout autre met qui n'est pas dans les pratiques alimentaires de l'islam". "Sur ce point, il n'y a pas de problème puisque l'on peut toujours servir aux invités d'excellents plats", précise-t-il.

M. Pancracio, également auteur du Dictionnaire de la diplomatie, note que "d'autres pays musulmans, réputés pour pratiquer un islam assez rigoriste, comme le Qatar ou l'Arabie saoudite, se montrent plus accommodants dès lors que le vin n'est pas servi aux personnes de la suite du roi ou de l'émir". Dans ce cas, précise-t-il, le vin est servi dans des carafes opaques, seulement aux invités non musulmans.

 

 

Les précédents

En octobre 1999, le président iranien de l'époque, Mohammad Khatami a été reçu à l'Élysée par son homologue français Jacques Chirac. Archives/L'Orient-Le Jour.

 

Ce petit couac protocolaire autour du déjeuner élyséen n'est pas le premier entre la France et l'Iran. En 1999, rappelle Jean-Paul Pancracio, le président iranien de l’époque, Mohammad Khatami, devait rencontrer son homologue français Jacques Chirac au printemps. Mais l'Iran avait exigé qu’aucun alcool ne soit servi lors du déjeuner officiel à Élysée, et la France avait refusé. La visite avait finalement été reportée à octobre, et les deux présidents s'étaient entretenus autour d'un thé.
La même année, l’Italie avait, elle aussi, reçu Mohammad Khatami. La question du vin avait été réglée différemment : pas de bouteille à table, mais les serveurs servaient, au verre, du vin à ceux qui le demandaient.

La presse belge rapporte de son côté qu'en 2005, le président de la Chambre, Herman De Croo, voulait inviter à dîner le président de l'Assemblée consultative islamique d'Iran, Gholamali Haddad Adel, et sa délégation. Là aussi, la question du vin avait posé problème. En fin de compte, le dîner prévu avait été remplacé par une simple audience de routine.

Selon PressTV.ir, le président Hassan Rohani n'avait pas non plus pris part au déjeuner organisé par le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, en marge de la 68e session de l'Assemblée générale en septembre 2013, parce que de l'alcool était servi à table. Selon des sources informées, ce scénario s'est répété cette année : lors du déjeuner organisé à l'occasion de la dernière Assemblée générale de l'Onu, en septembre dernier, certains leaders iraniens étaient absents. Contacté par L'Orient-Le Jour, le porte-parole adjoint de l'Onu, Farhan Haq, indique qu'à l'occasion des rencontres entre le secrétaire général et des personnalités politiques ou religieuses, "des arrangements protocolaires appropriés sont mis en place". "Pour un leader musulman, cela implique des repas halal", précise-t-il. Mais lorsque Ban Ki-Moon reçoit plusieurs leaders mondiaux, "différentes options de menus sont proposées aux invités".

 

L'Iran n'est pas le seul pays à se braquer sur la question de l'alcool lors de déjeuners ou dîners entre hauts responsables.

En mai 2009, le Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, alors en visite officielle en France, devait déjeuner à l’Élysée. Mais lorsqu’il apprend que du vin figure au menu, son chef de cabinet demande que l'alcool ne soit pas servi, ce que les Français refusent. M. Maliki annule le déjeuner.

 

 

Qu'en est-il du Liban?

Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad au palais de Baabda, en 2010.
Archives/L'Orient-Le Jour

 

"Au Liban, en matière de protocole, la question de l'alcool n'est pas un problème. Quand il est clair que nos invités, pour de raisons religieuses, ne vont pas boire d'alcool, nous ne servons que des boissons non-alcoolisées. C'est pour nous une question d'éthique et nous ne voulons pas importuner nos invités", explique à L'Orient-Le Jour une source qui a été impliquée dans les questions protocolaires au plus haut niveau. Elle cite à titre d'exemple le sommet arabe qui s'est tenu en 2002 à Beyrouth et lors duquel l'alcool n'a pas été servi. Autre exemple, la visite, en 2003, du président iranien Mohammad Khatami et celle du président iranien Mahmoud Ahmadinejad en 2010. "Il n'y avait ni vin, ni femmes lors des rencontres au sommet", indique la source. 

Commentant le cas français, la source estime que "Rohani étant un cheikh, un homme religieux, il faut prendre cela en considération. Il faut respecter les souhaits de la personne que l'on reçoit". Et de souligner : "En termes protocolaires, une visite d’État se prépare en accord entre les deux parties, on ne peut imposer un programme".

 

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commentaires (4)

Mais on s'en contrefout ! il se contentera donc d'un petit pain au chocolat et d'un café pour un petit-déjeuner et qu'il foute la paix aux Français !

ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

16 h 43, le 13 novembre 2015

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Commentaires (4)

  • Mais on s'en contrefout ! il se contentera donc d'un petit pain au chocolat et d'un café pour un petit-déjeuner et qu'il foute la paix aux Français !

    ANTOINE-SERGE KARAMAOUN

    16 h 43, le 13 novembre 2015

  • Moralité ...ceux qui ne boivent pas d'alcool tant pis pour eux ...! les hommes célèbrent leurs fêtes païennes ,religieuse et etc. depuis 8000 ans avec un/des verres de vin ...! même que, les Pharaons 7000 ans avant J.C , avaient leurs propre brasseurs de bière au sorgo ...et l'héritage qu'ils ont laissé à l'histoire est sublime....

    M.V.

    16 h 15, le 12 novembre 2015

  • Il n'est malheureusement pas de moeurs plus ou moins archaiques que d'autres . Des esprits , oui ! Mais des moeurs tout court et un service protocolaire ou chacun fait part de ses traditions , et ou on s'accorde la dessus . Tel est le sens de la diplomatie . Une chose qui ne se dira pas , c'est quand un dirigeant juif est invite a diner ou dejeuner , est ce que le protocole francais peut se permettre de servir des cochonailles ? Cet article a pris trop facilement le pretexte d'invites musulmans pour eluder cette question , quelle est la reponse ? Je me marre d'avance .

    FRIK-A-FRAK

    15 h 57, le 12 novembre 2015

  • IL PEUT BOIRE DE LA LIMONADE ET MANGER DU HALAL... MAIS IL NE PEUT PAS IMPOSER AUX AUTRES SES MOEURS ARCHAÏQUES !!!

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 38, le 12 novembre 2015

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