S’opposant à une « capitulation », le président du Soudan du Sud, Salva Kiir (au centre), a refusé de signer l’accord de paix et demandé un délai de 15 jours pour « consultations ». Tiksa Negeri/Reuters
S'opposant à une « capitulation », le président du Soudan du Sud, Salva Kiir, a refusé de signer le projet d'accord de paix, présenté lundi à Addis-Abeba par la médiation internationale pour mettre fin à 20 mois de guerre civile, a affirmé hier le gouvernement de Juba.
« Ce document nous a été présenté, et nous l'avons contesté (...) en faisant valoir qu'il contenait des dispositions litigieuses et qu'il restait des sujets en suspens devant être négociés et faire l'objet d'un accord », a expliqué Michael Makuei, porte-parole du gouvernement sud-soudanais. « Ce document ne peut sauver le peuple du Soudan du Sud. C'est une capitulation et nous ne l'accepterons pas », a martelé à l'aéroport de Juba M. Makuei, de retour en compagnie de M. Kiir de la capitale éthiopienne, où il dirigeait l'équipe de médiation du gouvernement. « Le gouvernement a décidé de ne pas signer l'accord malgré les pressions exercées, a poursuivi M. Makuei. Le gouvernement ne représente pas que lui-même, mais la volonté du peuple sud-soudanais. » « Nous sommes venus consulter (...), si vous – peuple du Soudan du Sud – dites d'aller signer, alors nous le ferons, mais je doute que le peuple dirait cela », a-t-il ajouté, sans préciser comment la population serait consultée. Salva Kiir a, lui, quitté l'aéroport sans faire de commentaires.
Washington menace
La communauté internationale, excédée par plus de 18 mois de négociations stériles à Addis-Abeba, n'ayant abouti qu'à une série de cessez-le-feu jamais respectés, avait donné jusqu'au 17 août (lundi) aux belligérants pour conclure un accord, sous peine de sanctions « ciblées ». Lundi toutefois, Salva Kiir avait refusé de signer le document soumis par la médiation, à la différence du chef de la rébellion, Riek Machar, son ancien vice-président qui le combat depuis décembre 2013. M. Kiir avait ainsi demandé un délai de 15 jours pour « mener des consultations au Soudan du Sud », en raison de « réserves » sur le document, avait expliqué lundi soir le chef des médiateurs de Juba, Seyoum Mesfin.
Lundi soir également, Washington a sommé M. Kiir de signer l'accord sous les 15 jours réclamés, sous peine « d'augmenter le prix à payer pour cette intransigeance ». « Les États-Unis regrettent profondément que le gouvernement sud-soudanais ait choisi de ne pas signer un accord qui avait le soutien de tous les États de l'Igad (médiation de pays d'Afrique de l'Est), de la troïka (États-Unis, Royaume-Uni et Norvège), de la Chine, de l'Union africaine et des Nations unies », a fustigé le porte-parole du département d'État, John Kirby. Il a, au contraire, salué la signature de l'accord de paix par le « dirigeant de l'opposition Riek Machar ».
Le Soudan du Sud, plus jeune État du monde, a proclamé son indépendance en juillet 2011 après 30 ans de conflit avec Khartoum. Les États-Unis ont largement contribué à la création de cet État, né de la partition du Soudan donc. Depuis que la guerre civile a éclaté en décembre 2013, Washington réclame en vain la fin des hostilités, et le secrétaire d'État, John Kerry, a même joué les médiateurs entre le président Kiir et son ex-vice-président Machar. Mais les menaces de sanctions, d'embargo sur les armes, d'interdictions de voyager ou de gel d'avoirs n'ont eu aucun effet. Il faut dire que l'administration américaine est accusée d'être divisée sur la réponse à apporter à ce conflit, qui, marqué par des massacres et des atrocités contre les civils, a fait des dizaines de milliers de morts et plus de deux millions de déplacés.
(Source : AFP)