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La violence dans les médias : qu’en pensent les jeunes ?

Le public, gêné ou choqué jadis par des scènes violentes fictives, est inondé aujourd'hui de scènes semblables mais réelles. Comment réagissent les jeunes à la transmission massive d'images sanglantes par les médias ? Bribes de réponses.

Rim Barraj et Zeinab Khayat, étudiantes à l’AUST, sont toutes les deux contre la diffusion de vidéos violentes.

« La diffusion par les médias de photos et de vidéos montrant de vrais actes de violence, et leur partage sur les réseaux sociaux, est inacceptable », affirme Nancy Eid, avant d'avertir : « Il faut sonner l'alarme : cette transmission a des effets négatifs sur le public. »
Nombreux sont les jeunes, à l'instar de Nancy, qui dénoncent la diffusion de l'horreur et de la brutalité par les médias. Pour Yasmina Moghniyeh, étudiante à l'AUST, « ces scènes génèrent la peur, l'anxiété et des troubles psychologiques chez le public ». Nour Jarrous, étudiante en audiovisuel à l'Alba, partage l'avis de Yasmina : « Les enfants, qui surfent sur les réseaux sociaux ou qui regardent la télé, risquent d'être exposés à des scènes qui pourraient les traumatiser à vie. » Rim Barraj, elle, refuse de voir ou de partager ces scènes. Selon l'étudiante en gestion, la transmission de ces faits encourage la violence dans la société. Elle affirme : « C'est un cercle vicieux, la brutalité médiatisée engendre des réactions agressives chez le public et sème en lui des idées criminelles. »
Ces propos sont appuyés par le docteur Georges Karam. Le psychiatre, se basant sur différentes études, révèle que « l'exposition à la violence, qu'elle soit réelle ou filmée, passive ou recherchée, augmente le taux d'agressivité chez le spectateur ». Et de préciser : « Sur 100 personnes qui regardent un acte atroce, 10 vont devenir plus bagarreuses même si, à la base, elles ne sont pas violentes. »
Zeinab Khayat, étudiante à l'AUST, évoque une autre conséquence de la violence médiatisée. « À force d'y être exposé, le public est devenu habitué à ces sauvageries », se plaint-elle. Le Dr Karam explique ce phénomène : « Les études récentes ont montré que la récurrence de la violence sur les médias rend les spectateurs désensibilisés, indifférents et moins empathiques. » Et d'ajouter : « Suite à l'exposition répétitive, les personnes auront besoin d'être exposées à un taux accru de brutalité pour leur conférer la même sensation, comme dans l'addiction aux drogues. »

Transmettre pour sensibiliser ?
Par contre, d'autres étudiants soutiennent la diffusion de vidéos violentes. Ahmad Cherri estime que « les médias sont le miroir de la société, leur devoir est de transmettre l'actualité, aussi monstrueuse qu'elle soit. Il ne faut pas donc les accuser de promouvoir la violence puisqu'ils ne font que refléter l'horrible réalité. » Et d'ajouter : « Ce sont les actes qui doivent être condamnés et non pas les médias qui les transmettent. » Lydia Chalhoub acquiesce. La future architecte, qui n'hésite pas à partager des scènes violentes sur les réseaux sociaux, ajoute : « Quand on ne diffuse pas ces faits, c'est comme s'ils n'ont pas eu lieu. Le public a le droit de prendre conscience de ce qui se passe autour de lui et dans le monde. »
Pour Yara Ajami, étudiante en audiovisuel à l'Alba, « diffuser ces actes est nécessaire pour les dénoncer, d'une part, et pour sensibiliser le public afin qu'il se révolte et qu'il trouve des solutions, d'autre part ». Elle donne un exemple : « La diffusion des photos de victimes de la violence conjugale a suscité l'indignation d'un grand nombre de citoyens et cela a aidé à faire progresser la loi. » Mais Farès Joseph Matta, son collègue, trouve que ce résultat est relatif au type de violence en question. « On est tous dégoûté, effrayé et révolté en regardant les crimes commis par l'État islamique. Mais on n'y peut rien changer » ! s'exclame-t-il.
Le Dr Karam estime qu'il est « grave de dire que le peuple ne s'indigne pas contre un acte atroce que s'il le voit de ses propres yeux ». Une simple information sans image ne serait-elle donc pas suffisante pour transmettre la nouvelle ?
Une diffusion partielle
et équilibrée
Le Dr Karam souligne que dans les pays industrialisés, les médias respectent les règles de déontologie. « Il faut rappeler ces protocoles aux médias libanais et les obliger à limiter les scènes de violence, bien que cela soit difficile puisqu'ils cherchent à augmenter leurs audiences à travers ce genre de scoops inutiles pour la société », affirme-t-il.
Les jeunes, que suggèrent-ils ? Maria Hajji, étudiante en audiovisuel, propose que les médias avertissent clairement et d'avance les spectateurs de la présence de scènes violentes « lorsqu'ils sont obligés de les transmettre, comme lors d'une diffusion en direct ». Lara Ghattas, quant à elle, affirme que ces actes doivent être diffusés d'une manière partielle. La future architecte explique : « Cela permettra de dévoiler leur atrocité sans obliger le public à les voir de près. »
Zeinab Khayat ajoute : « Les médias – outils de réforme dans une société – doivent effectuer une autocensure et filtrer leurs émissions, pour éviter des répercussions négatives sur le peuple. » Salim Naffah, pour sa part, suggère d'établir une réglementation qui interdit le téléchargement et le partage arbitraire de vidéos et de photos violentes sur les réseaux sociaux, d'une part, et, d'autre part, d'établir des limites d'âge pour le visionnage et le partage de telles images.
Tara Rahmé, étudiante à l'Alba, réclame, au lieu d'effectuer un matraquage médiatique sur les actes de violence, d'établir un équilibre médiatique entre les sujets couverts, que cela soit de la part des médias ou sur les réseaux sociaux. Patricia Ferzli va encore plus loin : « Au lieu de se préoccuper par ces faits, les médias doivent transmettre des événements culturels et artistiques organisés par les jeunes. » Elle conclut : « Ne serait-il pas plus fructueux de mettre en relief ces nouvelles, plutôt que celles d'une violence qui nous rend anxieux ? »

« La diffusion par les médias de photos et de vidéos montrant de vrais actes de violence, et leur partage sur les réseaux sociaux, est inacceptable », affirme Nancy Eid, avant d'avertir : « Il faut sonner l'alarme : cette transmission a des effets négatifs sur le public. »Nombreux sont les jeunes, à l'instar de Nancy, qui dénoncent la diffusion de l'horreur et de la brutalité par...

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