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Moyen Orient et Monde - Syrie

La bataille d’Alep, une question de vie ou de mort pour les rebelles

Les forces du régime ont pilonné hier la ville de Raqqa, tuant au moins 31 jihadistes.

La ville de Raqqa, contrôlée par les membres de l’EI, pilonnée par les forces du régime. Stringer/Reuters

La rébellion syrienne soutenue par les Occidentaux joue sa propre survie face à l'avancée à la fois des jihadistes et des troupes de Bachar el-Assad vers ses bastions dans la région septentrionale d'Alep, selon analystes et opposants.
« Plus que jamais, la rébellion est prise en tenaille entre le régime et l'EI », affirme Karim Bitar, directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). « Il y a aujourd'hui un vrai risque qu'elle vienne rapidement à manquer de l'oxygène nécessaire à sa survie », estime ce spécialiste du Proche et Moyen-Orient.


En effet, l'EI, groupe ultraradical qui sème la terreur en Syrie et en Irak, où il contrôle de larges pans de territoires, mène depuis mercredi une offensive éclair dans la province d'Alep, principal bastion des rebelles, pour couper leur route d'approvisionnement à partir de la Turquie voisine. Samedi, ces jihadistes impitoyables, qui décapitent, crucifient et lapident leurs ennemis, ont annoncé leur « détermination à libérer la province septentrionale et à en chasser les rebelles ». En trois jours, ils ont pris une dizaine de villages et localités, et menacent maintenant les deux principaux bastions de la rébellion, Marea et Aazaz, que les rebelles défendaient toujours hier. Or, une prise d'Aazaz et de Marea pourrait porter un coup fatal à la rébellion. « Les rebelles considèrent qu'il s'agit d'une des plus importantes batailles contre l'EI (...) il n'est pas question de la perdre », a déclaré Abou Omar, porte-parole du « conseil révolutionnaire » de Marea qui y représente rebelles et militants. « Les rebelles ont envoyé beaucoup de renforts et d'armes aux alentours et à l'intérieur de Marea », selon ce porte-parole, contacté via Internet, qui a précisé que les combats se déroulaient à « 10 km de la localité ».

 

« Situation très grave »
Parallèlement, l'armée syrienne resserre son étau sur la périphérie nord de la ville d'Alep, menaçant d'asphyxier les quartiers est tenus par les insurgés. « La rébellion en Syrie est à un tournant, même si la situation à Alep peut traîner pendant des mois », explique de son côté Aron Lund, spécialiste de la rébellion syrienne. Si les forces loyalistes parviennent à reprendre la ville d'Alep, « Assad contrôlera la grande majorité de ce qu'on appelle la Syrie utile », avec « la capitale Damas, Alep, la côte, Homs, Hama ainsi que la frontière libanaise », selon M. Lund.
« La situation est très grave », juge de son côté le colonel rebelle Abdel Jabbar al-Oqaidi, un des principaux officiers ayant lancé à l'été 2012 la bataille d'Alep, divisée depuis entre régime et rebelles.
Une perte de la province « signifierait une perte du principal réservoir humain » de la rébellion, explique cet officier contacté via Internet. « Si l'EI réussit à couper les approvisionnements des rebelles à partir de la Turquie (...), toute la rébellion à l'intérieur de la Syrie sera complètement isolée », renchérit Samir Nachar, membre de la Coalition nationale syrienne, l'opposition en exil.
Celle-ci a appelé samedi les pays occidentaux, États-Unis en tête, à intervenir en Syrie « de la même manière qu'ils le font dans le Kurdistan irakien » contre l'EI, estimant que « l'ennemi est le même ».


En effet, en voyant les Américains frapper l'EI en Irak depuis une dizaine de jours, rebelles et opposants syriens ne cachent pas leur amertume. « Il y a un sentiment de colère car, depuis trois ans, le régime syrien massacre le peuple et commet des crimes contre l'humanité. Et le monde est resté les bras croisés », s'indigne le colonel Oqaidi. « L'hésitation de la communauté internationale à mener des frappes en Syrie va pousser beaucoup d'insurgés à se jeter dans les bras de l'EI », met en garde M. Nachar. Toutefois, d'après les analystes, un scénario à l'irakienne en Syrie reste incertain. Washington considère que « la crise syrienne ne fait pas peser de menaces sur les intérêts vitaux des États-Unis », selon M. Bitar. Pour Aron Lund, tout dépendra de ce que veut l'administration Obama : contenir l'EI uniquement en Irak ou détruire complètement le groupe. M. Nachar signale que Washington a été « informé du danger que représente la situation à Alep ». Mais « aucune réponse n'est encore parvenue ».

 

Les positions de l'EI à Raqqa pilonnées
Enfin, l'aviation et l'artillerie des forces loyales à Bachar el-Assad ont pilonné hier la ville de Raqqa, bastion des jihadistes de l'État islamique dans le nord-est de la Syrie, rapporte l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). Au moins 31 combattants islamistes ont été tués et des dizaines d'autres ont été blessés par les bombardements, indique l'OSDH, précisant que l'aviation syrienne a mené 43 raids dont 28 dans la seule province de Raqqa et dans ses environs dans la seule journée d'hier.
En fin de soirée, l'agence de presse turque Anatole a cité des sources rebelles qui affirment que l'aviation américaine a lancé plusieurs raids contre les positions de l'EI à Raqqa. Toutefois, ces informations n'ont pas pu être vérifiées par d'autres sources.

 

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commentaires (2)

S'il est vrai que "les ennemis de mes ennemis sont mes amis", la collusion que l'on soupçonne entre l'EI et le pouvoir semble de plus en plus probable.

Yves Prevost

07 h 26, le 18 août 2014

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Commentaires (2)

  • S'il est vrai que "les ennemis de mes ennemis sont mes amis", la collusion que l'on soupçonne entre l'EI et le pouvoir semble de plus en plus probable.

    Yves Prevost

    07 h 26, le 18 août 2014

  • WAW un miracle ! La dictature la plus cynique de la planète sort soudain de son "amnésie" et se rappelle où se trouvent ses immeubles à Raqqa, occupés fébrilement par sa complice Daech depuis bientôt deux ans. Elle avait oublié même la localisation de son palais du gouvernement, quartier général de Daech, dans cette capitale provinciale. Voilà "pourquoi" ses avions n'ont jamais bombardé ce palais et les autres immeubles gouvernementaux de la ville. Soudain elle localise de nouveau et attaque ces immeubles pour montrer à Obama le lâche, qui bombarde certaines positions de l'EI (Daech) face au Kurdistan irakien, qu'elle mène le même combat que lui "contre le terrorisme". Cela tout en "prenant en tenailles avec l'EI (Daech) la rébellion à Alep", comme dit le directeur de recherche à l'IRIS, Karim Bitar.

    Halim Abou Chacra

    05 h 49, le 18 août 2014

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