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Coupe du Monde - Articles - Demi-finale

Argentine vs Pays-Bas : l’ombre de 1978 plane sur le match

Ce soir (23h00 à Beyrouth), l'Albiceleste et les Oranje écriront un nouveau chapitre de leur grand « classique » et la bataille, qui sent déjà la poudre, s'annonce spectaculaire.

Le supersonique Arjen Robben et le quadruple Ballon d’or Lionel Messi se livreront un duel de titans aujourd’hui. Photo AFP

Néerlandais et Argentins se retrouvent aujourd'hui en demi-finale du Mondial à São Paulo, 36 ans après la controversée finale de la Coupe du monde de 1978, disputée dans une Argentine sous dictature militaire et un climat d'intimidation dénoncé par les Oranje. Le souvenir de ce match joué dans l'environnement hostile du stade Monumental de Buenos Aires est toujours aussi douloureux au plat pays, où l'on estime que la rencontre (comme l'ensemble du tournoi) ne s'était pas déroulée dans des conditions normales. L'Albiceleste s'était imposée 3-1 en prolongation grâce notamment à un doublé de Mario Kempes, meilleur buteur du tournoi. Aujourd'hui, Argentins et Néerlandais écriront donc un nouveau chapitre de leur grand « classique », qui a des répercussions sur la reine des Pays-Bas.
Le 25 juin 1978, le dictateur Jorge Videla levait les bras au ciel après le triomphe de l'Albiceleste devant des Néerlandais privés de Johan Cruyff, resté au pays par choix personnel. Les cris des 71 000 spectateurs présents au stade Monumental couvraient ceux des prisonniers enfermés secrètement à dix rues de là, dans l'École supérieure mécanique de l'armée (Esma), centre de torture emblématique de la dictature (1976-1983). Trente-six ans plus tard, l'histoire rattrape deux pays au destin lié : la reine des Pays-Bas, Maxima Zorreguieta, qui est née et a grandi à Buenos Aires, doit composer avec un père qui fut secrétaire d'État à l'Agriculture pendant la junte militaire, qui avait fait 30 000 disparus. En tant qu'ancien ministre de la dictature, Jorge Zorreguieta n'avait pas été autorisé à assister au mariage princier en février 2002, ni même à la cérémonie d'intronisation du nouveau roi Willem-Alexander, l'époux de sa fille, le 30 avril 2013.
Le régime militaire, malgré des appels au boycott précédant le tournoi, s'est servi de « son » Mondial pour améliorer l'image d'un pays plongé dans la terreur. Des médias étrangers, notamment néerlandais, ont tout de même réussi à lever une partie du voile qui masquait la réalité, avant que le monde ne découvre l'ampleur de la tragédie.

Marionnettes politiques
Une polémique secoue toujours l'Argentine : la fête qui a suivi le sacre de 1978 servait-elle de caution pour la dictature ou d'échappatoire pour une société accablée par la situation politique ? Dans le documentaire Mondial 78, l'histoire parallèle, Estela de Carlotto, la leader des Mères de la place de Mai (une association de mères de disparus), raconte qu'elle et son mari pleuraient la disparition de leur fille et d'un petit-fils pendant que sa famille célébrait les buts de l'Argentine. « Pendant que vous criez, vous étouffez les cris des torturés », disait-elle. En 2006, Maxima, encore princesse, avait rencontré à sa demande Estela de Carlotto, dont l'association a permis de retrouver 110 enfants disparus ou volés par les militaires. « C'était une rencontre très positive. Parce qu'elle a montré qu'elle n'était pas indifférente à la violation des droits de l'homme. Elle a une grande sensibilité et elle m'a paru très intelligente », a rapporté Mme Carlotto en 2013.
Sur un autre terrain, sportif celui-là, l'Argentine s'interroge encore aujourd'hui sur le rôle des joueurs pendant le Mondial controversé. « Il ne fait aucun doute que nous avons été utilisés politiquement, mais je ne me sens pas comme un acteur » de la dictature, dit Ricardo Villa, un des champions du monde. Son coéquipier Daniel Bertoni, auteur du dernier but en finale, reconnaît pourtant : « Nous les avons aidés, parce qu'avec nos victoires, ils sont restés un petit peu plus longtemps au pouvoir. »
Depuis la finale de 1978, l'Argentine n'a plus jamais gagné en Coupe du monde contre les Pays-Bas, qui l'a éliminée (2-1) en quarts de finale en 1998 avant de la neutraliser (0-0) en poules en 2006.

Robben-Messi, déjà une finale
L'affrontement entre les Pays-Bas et l'Argentine sent donc déjà la poudre et sera pimenté par le duel à distance entre deux des meilleurs joueurs de la planète, le supersonique Arjen Robben et le quadruple Ballon d'or Lionel Messi.
Qui de « Leo » ou de Robben restera au tapis ? C'est en filigrane l'un des enjeux de la lutte que vont se livrer les Oranje et l'Albiceleste. La bataille s'annonce spectaculaire. Côté argentin, Messi cherche à devenir l'égal du légendaire Diego Maradona en remportant l'unique titre qui manque encore à son prestigieux palmarès. Avec 4 buts inscrits, l'attaquant du FC Barcelone a jusqu'ici tenu à bout de bras sa sélection, assez quelconque depuis le début du tournoi. Comme « El pibe de oro » en 1986, il est la planche de salut à laquelle se raccrochent ses coéquipiers et son entraîneur Alejandro Sabella. Robben est quant à lui inarrêtable et devrait recevoir le soutien du public brésilien, traditionnellement très hostile aux Argentins. Alors que Robin Van Persie s'est éteint après le 1er tour (3 buts), l'ailier du Bayern Munich multiplie les rushs aux quatre coins du terrain. En plus de ses trois réalisations, il a effectué une passe décisive et a tenté neuf fois sa chance au but. Et ses dribbles (62 réussis depuis le début de la compétition) provoquent à chaque fois la panique dans la défense adverse.

Sur le banc de touche aussi
Le match se jouera également sur le banc de touche. Tout oppose Louis Van Gaal, tacticien hors pair et futur entraîneur de Manchester United, et l'austère Sabella. Le technicien néerlandais est qualifié de « plus grand entraîneur des Pays-Bas » par Dick Advocaat (l'un de ses prédécesseurs), depuis qu'il a réussi un fabuleux coup de bluff en quarts de finale contre le Costa Rica (0-0 a.p., 4-3 t.a.b) en changeant de gardien pour la séance de tirs au but. En adepte du tableau noir, Van Gaal devrait en tout cas réserver un traitement de choc à Messi. Le 3-4-3 de mise en quarts pourrait être reconduit, mais Louis « Van G(éni)aal », tel qu'il est désormais surnommé aux Pays-Bas, reste très secret sur ses intentions.
Le pragmatique Sabella espère de son côté marcher sur les traces de son mentor Carlos Bilardo, l'homme qui avait bâti une armée toute dévouée à Maradona en 1986 lors du dernier sacre mondial de l'Albiceleste, et refaire le même coup avec Messi pour décrocher enfin une 3e étoile. Mais une seule question l'obsède : sa défense tiendra-t-elle le coup face à la vitesse de Robben ?

(Source : AFP)

Néerlandais et Argentins se retrouvent aujourd'hui en demi-finale du Mondial à São Paulo, 36 ans après la controversée finale de la Coupe du monde de 1978, disputée dans une Argentine sous dictature militaire et un climat d'intimidation dénoncé par les Oranje. Le souvenir de ce match joué dans l'environnement hostile du stade Monumental de Buenos Aires est toujours aussi douloureux au...
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