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La loi électorale - La loi éléctorale adoptée à Doha

Le compromis sur la loi électorale : D’enfer en purgatoire

C’est un compromis forcément bancal qui a fini par être adopté par les protagonistes à Doha au sujet du découpage électoral de la capitale.
Il est bancal car il ne va pas sans quelques petites anomalies, accumulées au fil des marchandages et des concessions de part et d’autre. Comme par exemple l’énorme disparité entre les tailles des circonscriptions et l’attribution de deux sièges aux Arméniens à Beyrouth I (un arménien-orthodoxe et un arménien-catholique) alors même que les inscrits de cette communauté dans cette circonscription sont moins nombreux que les grecs-orthodoxes, ces derniers ne disposant que d’un siège.
C’est néanmoins un compromis qui tient compte des équilibres confessionnels dans la capitale, dans la mesure où il ne pénalise aucun des grands groupes qui forment l’électorat beyrouthin. Et cet acquis est bien entendu fondamental.
Initialement, le problème se posait dans la configuration de la deuxième circonscription, où se trouve concentré le poids arménien, à Medawar. À la différence du découpage en vigueur sous le régime de la loi de 1960, ce quartier a été détaché de la circonscription de Beyrouth I (Achrafieh-Rmeil-Saïfi, 5 sièges). Dans l’esprit de la majorité, il est clair que cette séparation a pour objectif de libérer la majorité chrétienne non arménienne à Beyrouth I de l’emprise du puissant Tachnag. En 1972, le chef des Kataëb, Pierre Gemayel, avait dû céder aux injonctions de ce parti et sacrifier l’un des siens, le protestant Samir Ishac, pour offrir le siège attribué à cette communauté à un arménien protestant. Pour cheikh Pierre, c’était cela ou bien perdre les élections.
Initialement, le projet de la majorité était de fondre Medawar dans une circonscription à majorité sunnite, afin de garantir une issue favorable aux élections. Mais cela comportait une injustice flagrante envers la communauté arménienne, qui aurait ainsi été pénalisée à cause de l’alliance actuelle du Tachnag avec le Hezbollah.
L’opposition, en particulier le général Michel Aoun et le représentant du Tachnag à Doha, Hagop Pakradounian, se sont élevés contre cette injustice. Se présentant en défenseur de la représentation chrétienne, le chef du CPL a plaidé pour le rétablissement de l’ancien Beyrouth I, une circonscription qui serait dotée de 8 sièges, tous chrétiens.
Cependant, à y voir de plus près, on constate clairement que les intentions purement électoralistes l’emportaient chez le général – aussi bien que chez tout le monde – sur le souci pur et désintéressé d’améliorer la représentation chrétienne. En effet, en se basant sur la configuration politique actuelle, un Beyrouth I avec Medawar serait à n’en pas douter plus favorable à des candidats du CPL qu’un Beyrouth I sans Medawar. Comme le Metn avec Bourj-Hammoud et sans Bourj-Hammoud.
Le compromis trouvé par la création d’une circonscription formée de Medawar, Port et Bachoura, et dotée de quatre sièges, a l’avantage d’offrir deux acquis : d’une part, l’injustice est levée tant en ce qui concerne les Arméniens que les chiites, ces derniers étant majoritaires à Bachoura ; de l’autre, les desseins visant à améliorer la situation de l’opposition à Beyrouth I ont été mis en échec.
Si les alliances ne changent pas d’ici à un an, la configuration de Beyrouth 2, formée grosso modo d’un tiers sunnite, un tiers chiite et un tiers arménien, sera avantageuse pour l’opposition. En cas de recentrage du Tachnag, toutes les options seraient alors ouvertes.
Reste la troisième circonscription de Beyrouth, la plus grande avec dix sièges. Fief haririen par excellence, cette circonscription allant de Mazraa à Aïn el-Mreyssé ne devrait pas être le théâtre d’une véritable bataille.
Au total, le Courant du futur aura donc accepté de rétrocéder près de la moitié des sièges de Beyrouth (9 sur 19) à un électorat non dominé par des sunnites. Il faut hélas constater que le CPL, si prompt pourtant à s’affirmer comme le défenseur des intérêts chrétiens, n’a rien obtenu de tel ailleurs de la part de ses alliés au sein de l’opposition, à supposer qu’il ait cherché à obtenir quelque chose.
On a surtout voulu se cacher sous l’illusion triomphale de la loi de 1960. Pourtant, si l’on examine de près cette loi, on constate qu’elle est aujourd’hui loin d’être avantageuse pour les chrétiens, en raison de l’évolution démographique survenue depuis près d’un demi-siècle.
Toute la discussion à Doha n’a porté que sur Beyrouth, comme si le découpage dans le reste du Liban était au-dessus de tout soupçon. Pourquoi par exemple le général Aoun ne demande-t-il pas au Hezbollah, au nom du nécessaire rééquilibrage en faveur des chrétiens, d’ôter sa mainmise sur le siège maronite à Baalbeck et de le transposer à Bécharré, dans la mesure où il existe notoirement une parenté entre les habitants de ce caza et les localités maronites de Baalbeck, comme Deir el-Ahmar, Chlifa et Aïnata ?
Bien évidemment, le CPL n’a nullement l’intention d’offrir ce cadeau à Samir Geagea. C’est d’ailleurs son droit le plus strict. Mais alors il faudrait qu’il ait l’honnêteté d’avouer franchement que sa politique consiste à travailler pour le compte de l’opposition – ce qui est loin d’être scandaleux en soi – plutôt qu’au service des chrétiens. Ou bien, pour être plus précis, qu’il sert les intérêts des chrétiens… lorsqu’ils n’empiètent pas sur ceux de l’opposition.
En réalité, au-delà de ce qu’en pensent les uns et les autres, un rééquilibrage en faveur des chrétiens s’impose aujourd’hui comme une urgence non seulement pour les chrétiens, mais pour tout le monde dans ce pays. Après ce qui vient de se passer à Beyrouth et dans la Montagne, y a-t-il encore quelqu’un qui souhaiterait continuer dans le terrible face-à-face sunnito-chiite ?
Ce rééquilibrage est d’autant plus nécessaire que l’on pourra constater, au cours des prochains moins, combien l’aspect de la bataille électorale sera différent, selon qu’on soit en zone chrétienne ou musulmane. Électoralement parlant, les régions à nette dominante sunnite et chiite ne sont plus que des glacis, d’ores et déjà acquis, les premiers au Courant du futur et les seconds au Hezbollah (avec quelques miettes pour Nabih Berry).
En revanche, en « terre » chrétienne, la bataille sera vive, féroce et déterminera le sort du scrutin. C’est un signe de vitalité démocratique que l’on voudrait bien voir généralisé
C’est un compromis forcément bancal qui a fini par être adopté par les protagonistes à Doha au sujet du découpage électoral de la capitale.Il est bancal car il ne va pas sans quelques petites anomalies, accumulées au fil des marchandages et des concessions de part et d’autre. Comme par exemple l’énorme disparité entre...