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Repères : vers une intervention militaire étrangère en Syrie - Trois questions à

"Un bombardement à distance ne brisera pas les forces terrestres" d'Assad

Philippe Migault, directeur de recherche à l'Institut de Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) et spécialiste des questions militaires.

Le président américain Barack Obama lors du sommet du G20 à Saint-Pétersbourg. AFP PHOTO/G20RUSSIA

1- Paris et Washington ont annoncé leur volonté de "punir" le régime syrien pour l'utilisation d'armes chimiques. Existe-t-il des précédents historiques de frappes "punitives", sans véritable entrée en guerre ni volonté de renversement de régime?

Oui. Le bombardement de Gènes en 1684 par la flotte de Louis XIV est clairement une expédition punitive et était annoncée comme telle... La France envahit l'Algérie en 1830 dans la foulée de ce qui devait être une simple expédition punitive. Mais la décolonisation est passée par là, les moeurs ont évolué, les règles de la diplomatie aussi, donc le concept d'expédition punitive est largement tombé en désuétude.

 

 

2- Quel sera, selon vous, l'impact de frappes limitées, ciblées et annoncées à l'avance par les Etats-Unis sur le régime syrien en particulier et le Moyen-Orient en général?

L'impact militaire sera faible si l'on en reste à cette configuration annoncée d'un bombardement à distance par missiles de croisière dans la mesure où ce n'est pas ça qui brisera les forces terrestres du régime syrien. Celui-ci -pour lequel, je le précise, je n'ai pas la moindre sympathie- va pouvoir se prévaloir dans une partie du monde arabe d'être victime d'une nouvelle agression du "Grand Satan" et d'un des "petits Satans" qui l'accompagnent habituellement. Circonstance aggravante ce "petit Satan", une fois n'est pas coutume, n'est pas le Royaume-Uni mais la France, l'ancienne puissance colonisatrice en Syrie. Dans ce cadre, l'usage du verbe "punir" sera bien entendu récupéré par les partisans de Bachar el-Assad pour souligner que Paris se comporte encore vis à vis de Damas comme une nation supérieure donneuse de leçons... Ce dérapage sémantique malheureux aura de l'écho dans tout le Moyen-Orient. En définitive cette frappe risque d'attirer plus de sympathies que d'ennuis à Bachar.

 

 

3- Le concept de "frappe punitive" annoncée et définie à l'avance a-t-il un sens militairement parlant?

Aucun, surtout lorsque cette frappe punitive, clairement, n'est pas destinée à renverser la balance des forces sur le terrain mais à marquer strictement la désapprobation d'un ou de plusieurs Etats quant à une violation du droit international. Et cette volonté répétée à plusieurs reprises de ne pas envoyer de troupes au sol, de ne pas s'engager dans une guerre longue sera interprétée dans tout le Moyen-Orient comme un signal clair : les leçons de l'Irak et de l'Afghanistan ont été retenues par les chancelleries occidentales qui désormais ne se risqueront plus à affronter les moudjahidines dans quelque pays que ce soit.

 

 

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