Un visiteur du « Musée du pouvoir » devant un tableau du peintre Konstantin Altunin représentant le président russe Vladimir Poutine et le Premier ministre Dmitry Medvedev en sous-vêtements féminins. Olga Maltseva/AFP
Alertée « par un citoyen qui a estimé que les tableaux exposés étaient en infraction avec la législation russe », la police a saisi mardi quatre œuvres du petit établissement privé baptisé « Musée du pouvoir », a indiqué le porte-parole de la police, Viatcheslav Steptchenko. Les policiers étaient venus au musée armés de kalachnikov, a raconté Alexandre Donskoï, fondateur de l’établissement inauguré à la mi-août sur la perspective Nevski, en plein centre de l’ancienne capitale impériale. Le musée est désormais sous scellés et le peintre Konstantin Altounine, auteur des toiles, a fui la Russie et se trouve en France, a ajouté M. Donskoï, ex-maire d’Arkhanguelsk passé à l’opposition qui avait été poursuivi et emprisonné après avoir fait état de ses ambitions présidentielles à l’élection de 2008.
« Les experts examinent actuellement » les toiles saisies, a précisé M. Steptchenko sans préciser quelles lois russes cette exposition aurait pu violer. La loi évoquée pourrait être celle, controversée, interdisant toute propagande homosexuelle devant des mineurs. Elle a récemment été promulguée par le président Poutine et qualifiée en Occident d’homophobe et de discriminatoire.
L’un des tableaux saisis intitulé Travestis représente Vladimir Poutine en nuisette coiffant Dmitri Medvedev, qui porte, quant à lui, un soutien-gorge. Un autre montre le député Vitali Milonov, auteur de la loi controversée pénalisant la propagande homosexuelle, devant des mineurs se tenant debout devant un drapeau aux couleurs arc-en-ciel, symbole de l’homosexualité. Un troisième, qui s’intitule Le Parti communiste de l’Union soviétique dans l’Église orthodoxe, montre le visage du patriarche russe Kirill tatoué sur le corps d’un criminel à côté d’un autre tatouage à l’effigie de Staline.
Le fondateur du musée Alexandre Donskoï a accusé le député Milonov d’être à l’origine de la fermeture du musée. « Il a visité l’exposition il y a quelques jours puis est revenu hier (mardi) soir avec la police », a déclaré M. Donskoï. Cité par les médias locaux, le député Milonov a expliqué qu’il ne voulait pas être peint « avec un drapeau brandi par des pervers et des sodomites séropositifs ». Interrogé par la radio Echo de Saint-Pétersbourg, M. Milonov a estimé qu’il avait ainsi « sauvé » l’administration du musée de ceux qui voulaient « leur casser la gueule ». « Il y a trop de punaises, il est temps de les exterminer », a-t-il ajouté faisant allusion aux libéraux et aux homosexuels.
« On nous accuse d’extrémisme. Les policiers nous ont recommandé de ne pas faire de bruit autour de cette histoire à la veille du sommet du G20 » qui aura lieu à Saint-Pétersbourg début septembre, a souligné M. Donskoï. « C’est scandaleux, l’art n’a rien à voir avec la politique », a-t-il poursuivi.
Alexandre Borovski, expert en art contemporain au Musée russe de Saint-Pétersbourg, s’est étonné de la manière dont l’exposition a été fermée. « Le député Milonov a le droit de critiquer l’exposition en tant que visiteur, mais il ne doit pas s’exprimer en tant que procureur », a-t-il souligné.
(Source : AFP)