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Moyen Orient et Monde - Violences

L’Irak se lance dans une guerre... des chiffres

Les bilans des attentats ne sont pas identiques pour les autorités, les médias et l’ONU.
Les autorités irakiennes, qui peinent à mettre fin à la dernière flambée de violences en date dans ce pays en proie aux attaques meurtrières depuis des années, sont également engagées dans une bataille des chiffres sur les bilans des attentats. Alors que la violence a atteint des niveaux jamais vus en Irak depuis 2008, le gouvernement minimise le nombre de victimes dans ses bilans officiels et met en doute les informations « dangereuses » publiées par les médias à ce sujet. L’ONU estime par exemple que plus de 4 000 personnes ont péri dans les violences depuis début 2013. Or, un décompte effectué par l’AFP, à partir des 1 700 communiqués publiés cette année par les ministères de l’Intérieur et de la Défense, archivés sur leurs sites, montre que seule une petite partie de ces morts a été publiquement annoncée. Le ministère de l’Intérieur évoque dans ses communiqués 120 civils et membres des forces de sécurité tués dans des attaques en 2013. Le ministère de la Défense, lui, évoque un nombre encore plus bas, mentionnant la mort de 30 Irakiens depuis le début de l’année.
Le gouvernement est de toute évidence soucieux de la façon dont sont perçues les violences. Le ministère de l’Intérieur a donc publié un communiqué en août déplorant ce qu’il a qualifié d’« actualités créées de toutes pièces et statistiques fausses ». Selon ce ministère, les « attaques médiatiques malintentionnées (...) ne sont pas moins dangereuses que les attentats eux-mêmes ». « La façon dont certains organes de presse adoptent » ce langage des chiffres « encourage el-Qaëda à continuer de prendre pour cibles des civils irakiens », a expliqué son porte-parole, le général Saad Maan. « Les communiqués des ministères de la Défense et de l’Intérieur ne comprennent pas le nombre total des victimes d’attaques terroristes », a pour sa part affirmé un haut gradé de l’armée irakienne sous couvert d’anonymat. En revanche, « il y a des ordres venant de la hiérarchie pour mettre en avant les activités des forces de sécurité et le fait qu’elles tuent des terroristes », explique cet officier. Le porte-parole du gouvernement Ali Moussawi a démenti cette information, assurant : « Nous n’avons jamais donné l’ordre de diminuer ces chiffres. »

Statistiques privées
Le gouvernement élabore cependant en privé des statistiques bien plus complètes. Selon ces données non publiées mais transmises aux journalistes, les violences en Irak ont fait 2 472 morts depuis janvier. Les communiqués du ministère ne donnent pas systématiquement des bilans plus bas que les autres sources, mais l’écart est parfois énorme. Le 15 août par exemple, le ministère de l’Intérieur a annoncé que des bombes à Bagdad avaient tué trois personnes, tandis que d’autres sources faisaient état de 24 morts dans la capitale. Et le 11 août, le ministère a rapporté 21 morts dans des attaques la veille, alors que d’autres sources mentionnaient 74 personnes tuées ce jour-là...
Pour ses bilans, l’AFP s’appuie soit sur une source crédible et identifiée, soit deux sources crédibles s’exprimant sous le couvert de l’anonymat. Le ministère de la Défense a de son côté multiplié les communiqués en août sur des opérations de grande ampleur contre des insurgés, ayant entraîné selon lui l’arrestation de 900 personnes et la mort de plus d’une douzaine d’insurgés. Mais aucun des communiqués étudiés n’a mentionné des morts parmi les militaires irakiens, tandis que l’AFP a dénombré 50 soldats tués ce mois-ci. « Le fait de ne pas publier les bilans est une tentative de montrer la situation sous un jour autre que la réalité », estime Essam al-Fayli, professeur d’histoire politique à l’université Mustansariyah de Bagdad, ajoutant qu’« annoncer les véritables chiffres affaiblirait la position politique » des principaux partis politiques.
(Source : AFP)
Les autorités irakiennes, qui peinent à mettre fin à la dernière flambée de violences en date dans ce pays en proie aux attaques meurtrières depuis des années, sont également engagées dans une bataille des chiffres sur les bilans des attentats. Alors que la violence a atteint des niveaux jamais vus en Irak depuis 2008, le gouvernement minimise le nombre de victimes dans ses bilans...
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