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Culture - Peinture

La terre des cent visages de Nazir Ismaïl

Sur toile, bois, papier, ou même papier de riz, en mixed media et collage, les « portraits » singuliers mais multiples de Nazir Ismaïl sont exposés à la galerie Art on 56th* jusqu’au 12 avril.

Horizontaux et verticaux , les visages forment un vocabulaire personnel.

Ils sont multiples, longilignes, émaciés, sans bouche, scindés en deux ou même effacés. Et si les yeux ne sont pas tracés avec précision, l’expression s’y lit quand même. L’artiste syrien Nazir Ismaïl a choisi de reproduire des visages, non pour leurs particularités morphologiques mais comme espace de compréhension de son art personnel et de la vision d’un monde incertain. Des visages de couleurs brune, ocre ou grise se détachent sur le bois, le papier ou la toile. Sur fond de teintes terre ou même ciel (mais Dieu que ce ciel est chargé!), ces figures éparpillées horizontalement et verticalement (comme les modules graphiques arabes) créent un monde silencieux. Se superposant et s’imbriquant l’une dans l’autre, elles vous regardent droit dans les yeux. Les portraits d’Ismaïl ne sont pas bavards, d’ailleurs ils n’ont pas de bouche. Seul un oiseau (mi-colombe, mi-corbeau) se pose sur leurs têtes créant le côté trouble à cet univers hermétique.

Un monde plus obscur que clair
Né à Damas, l’artiste qui a participé à diverses expositions, notamment à Genève, Paris ou Oman, remportant différents prix dont celui de l’«Intergraphic» de Berlin et la Biennale de Sharquah, a ses œuvres exposées dans de nombreux musées et instituts. Il n’est pas toujours beau son monde à Nazir Ismaïl, mais qui dit que l’art devrait être une simple reproduction esthétique de ce qui nous entoure? Par contre, il ouvre des fenêtres sur le passé et le présent reliant tout sur un espace intemporel. Ses visages n’ont pas d’âge, n’appartiennent à aucune époque et pourtant ils rappellent par moments les portraits du Fayoum ou d’autres figures antiques et iconiques. Dans certaines toiles, ils sont déchirés, brûlés. Ils s’étiolent, devenant ainsi le mirage d’eux-mêmes. Ils retracent non une période précise de troubles (rappelons que l’artiste est d’origine syrienne, établi encore dans ce pays de larmes), mais des pages d’humanité.
Ces visages qui se ressemblent de prime abord sont différents l’un de l’autre. Traversant son imaginaire, ils semblent surgir de la nuit des temps. Lugubres, voire morbides, ils sont l’expression de ce qu’endure l’homme dans sa vie quotidienne et son impuissance à faire part de sa douleur. Ils aimeraient pourtant parler, mais leurs lèvres sont comme scellées et leurs bouches closes. Seules les toiles parlent et les couleurs diluées, traitées comme dans un laboratoire de chimie, évoquent des questionnements. «Je travaille d’une manière expressive, dit Ismaïl en essayant de transmettre l’état émotionnel et psychologique par le biais de couleurs et lignes, ainsi que l’ambiance générale de l’art. Je ne veux pas raconter l’histoire d’un visage par ses détails complets. Je préfère ouvrir une fenêtre de conversation avec l’être humain.»

*Art on 56th (Gemmayzé). Tél. : 01/570331.
Ils sont multiples, longilignes, émaciés, sans bouche, scindés en deux ou même effacés. Et si les yeux ne sont pas tracés avec précision, l’expression s’y lit quand même. L’artiste syrien Nazir Ismaïl a choisi de reproduire des visages, non pour leurs particularités morphologiques mais comme espace de compréhension de son art personnel et de la vision d’un monde incertain. Des...
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