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Lifestyle - Rencontre

Haïfa al-Mansour et sa gamine à vélo...

Elle a présenté « Wajda », son premier long-métrage de fiction dans le cadre du Festival international du film de Dubaï. Haïfa al-Mansour est la première femme réalisatrice dans le royaume wahhabite, et son film une belle œuvre émouvante et pleine de charme.
Dans la « green room » de Madinat Jumeira, elle accueille les journalistes un à un avec le sourire et sans aucun signe de fatigue. C’est que Haïfa al-Mansour est fière. Fière de son premier né qui lui a nécessité cinq ans de travail. De l’idée de scénario jusqu’à Venise où elle l’a présenté dans le cadre de la compétition « Orizzonte » qui lui a valu une ovation debout, que de chemin parcouru. Ici encore à Dubaï, le public l’a acclamée chaleureusement et le charme était au rendez-vous. Haïfa al-Mansour et sa Wajda émeuvent, touchent et distillent avec subtilité et intelligence un message, ô combien humble mais efficace. « Élever ma voix et ne pas rester en back stage de l’humanité, tels sont mes objectifs, dit-elle. Dans un milieu qui ne possède pas la culture de la cinématographie – « parce que, en Arabie saoudite, le privé ne doit pas s’afficher comme le public » –, la tâche était dure mais la réalisatrice a réussi à se tailler une place au soleil et, comme elle le dit si bien, à trouver sa voi(x)e.

Créer la controverse ?
Comment est-elle arrivée au-devant de la scène en brisant certains tabous, elle qui est née dans un milieu traditionnel ? « Depuis mon jeune âge, je m’amuse à faire des films avec une bande de copains. J’ai toujours aimé le cinéma et mon père ne m’interdisait pas d’en voir. Ainsi, quand j’en ai eu l’occasion, j’ai réalisé un premier court-métrage et l’ai envoyé aux Émirats qui l’ont bien accueilli. Ceci m’a confortée dans mon choix et m’a encouragée à poursuivre cette voie. »
L’étudiante en littérature à l’Université américaine du Caire va poursuivre son cursus de cinéma à Sydney. Après s’être fait remarquer avec plusieurs courts-métrages et un documentaire primé, Women without Shadows, elle aborde son grand projet Wajda qui obtiendra d’abord un soutien de la part de l’Allemagne (production), ensuite de Dubaï (financement). « C’était mon seul et unique souci. J’appréhendais le financement de ce projet qui me tenait à cœur, surtout de ne pouvoir arriver en postproduction, avoue-t-elle. D’ailleurs, même si mon pays n’a pas encore été apprivoisé par le cinéma, il ne m’a pas refusé l’autorisation pour tourner. » Elle signale néanmoins qu’il lui est quand même arrivé de se cacher dans le camion de la production dans des quartiers conservateurs, qui n’admettent pas qu’une femme réalisatrice travaille en côtoyant des hommes.

Une fille... un rêve
C’est donc en plein cœur de Riyad que Haïfa al-Mansour va tourner Wajda, l’histoire d’une petite fille de 12 ans qui rêve de s’acheter une bicyclette et qui, pour arriver à ses fins, va participer au concours de la meilleure récitation des versets du Coran organisée par son école. Le film reflète le regard que portent les enfants sur le monde. « Je n’ai pas voulu encore une fois parler des femmes victimes dans le milieu arabe. De plus, je pense que les enfants représentent le renouveau et la vie. Ils portent en eux les espoirs de tous. »
Pour la cinéaste saoudienne, il ne s’agit pas de révolte mais de révolution intérieure. « Tout commence par soi, précise-t-elle, comme si elle voulait bien expliquer son intention. Un travail qu’on effectue sur soi-même pour devenir une meilleure personne. D’ailleurs, je n’aime pas les mots trop ronflants et tonitruants qui parlent de liberté. Ils ont tendance à souvent sonner creux de nos jours. » En effet, Haïfa al-Mansour ne veut pas créer le buzz ou choquer. « Je respecte les codes et les règles de ma société, mais pas au point de m’y fondre et de m’annihiler. D’ailleurs, en choisissant mes personnages, je tenais à ce qu’ils soient du tissu organique de la société et non isolés et loin de la réalité. » De la maman, interprétée par Reem Abdallah, à la petite Wajda (Waad Mohammad), ce sont les différents profils de la femme qui y sont représentés. « Il est important que la femme ait foi dans sa propre personne pour pouvoir s’imposer », dit la cinéaste.
Wajda n’est pas un énième film de révolution. Il ne compte pas non plus moraliser ou prêcher mais exprimer un triomphe sur soi. Tourné à la manière des néoréalistes des années 1960, il véhicule, tout comme sa bicyclette (qui devient à son tour un personnage), ces images symboliques qui ont traversé le 7e art, notamment Le Voleur de bicyclette de Vittorio de Sica ou Le Gamin à vélo des frères Dardenne, « mais aussi, ajoute la cinéaste, le travail de Jafar Panahi. Je sui fière que mon œuvre ramène à l’esprit toutes ces impressions, car pour moi, ces réalisateurs sont des maîtres ». Et s’il arrive de lui demander si elle a jamais craint la controverse, elle n’hésite pas à répondre en esquissant ce sourire timide : « La controverse ne me fait pas peur car elle est un phénomène de bonne santé. »
Le film Wajda sera distribué par Rotana dans les pays du Moyen-Orient. En la quittant (à regret !), on lui demande à quand est prévue la sortie internationale de son œuvre : « Elle est déjà assurée en Italie (décembre), en France (février), à Londres (avril) et puis aux États-Unis », répond-elle. Qu’en est-il de l’Arabie saoudite ? Alors, Haïfa al-Mansour s’empresse de dire : « Bientôt, bientôt, dans les salles de théâtre. »
Dans la « green room » de Madinat Jumeira, elle accueille les journalistes un à un avec le sourire et sans aucun signe de fatigue. C’est que Haïfa al-Mansour est fière. Fière de son premier né qui lui a nécessité cinq ans de travail. De l’idée de scénario jusqu’à Venise où elle l’a présenté dans le cadre de la compétition « Orizzonte » qui lui a valu une ovation...

commentaires (1)

Bravo à Madame Haïfa Al-Mansour, " NON CHEZ ELLE " car, HÉLAS ! " CHEZ ELLE " l'écho sa voix... se perdra dans les dunes du désert...

SAKR LEBNAN

03 h 52, le 15 décembre 2012

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Commentaires (1)

  • Bravo à Madame Haïfa Al-Mansour, " NON CHEZ ELLE " car, HÉLAS ! " CHEZ ELLE " l'écho sa voix... se perdra dans les dunes du désert...

    SAKR LEBNAN

    03 h 52, le 15 décembre 2012

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