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Culture - Rencontre

Hisham Jaber « ne veut pas changer le monde »

À trente-trois ans, Hisham Jaber est directeur artistique du Métro (al-Madina). Mais aussi metteur en scène, acteur et auteur dramatique. En tons très « baba cool », il livre ses confidences. Découverte et surprises.

Hisham Jaber : « Mon ambition est de m’amuser. » Photo Michel Sayegh

Cheveux courts et barbe noire comme un pâtre grec, yeux malicieux derrière des lunettes à montures rondes, tee-shirt jaune ras du cou, bermuda à gros carreaux et bien entendu des baskets, signe distinctif de la génération montante. Voilà pour l’allure décontractée.
Côté voix, basse, presque dans la barbe, avec un léger grasseyement inattendu, pour une discussion à bâtons rompus.
Petit branle-bas au sous-sol du Métro, cabaret-théâtre de poche d’al-Madina, où se donne la pièce al-Mourachah d’Edmond Haddad. Hisham Jaber en assure la mise en scène.
En toute hospitalité libanaise, le jeune metteur en scène prépare un « expresso » dans la machine et l’offre dans un... « shot » de vodka ! Café bohème et underground.
Et s’enclenche la discussion, non seulement avec un homme de théâtre actif et œuvrant pour un éclairage neuf, mais aussi un observateur de la société, vigilant et impartial.
Diplômé de l’UL en art dramatique, frayant avec le milieu théâtral depuis une bonne décade, se voulant loin des influences, équidistant de toute mode, un peu électron libre, Hisham Jaber a, par ailleurs, de l’intérêt pour plus d’un pôle. La lecture, par exemple. Mais rien de précis. La philosophie, avance-t-il, en lâchant un peu évasivement le nom de Heidegger. Il plonge souvent aussi, dit-il, dans les livres d’histoire, surtout celle du Liban.
Intérêt bien entendu aussi pour le théâtre. Il évoque en passant Issam Mahfouz ou Saadallah Wannous, tout en soulignant qu’il préfère « voir une pièce plutôt que de la lire ». Il ne manque pas non plus de s’interroger s’il y a vraiment au pays du Cèdre des auteurs en langue arabe pour l’univers des planches.
Quant à sa propre écriture théâtrale (en langue arabe, tout en avouant qu’il a, pour communiquer avec l’extérieur, une petite fenêtre sur l’anglais), il confie : « L’idée d’écrire un opus germe. Je fais des recherches et cela s’impose alors à moi... Le point commun de mes écrits pourrait être des personnages extrêmes qui frôlent l’hystérie. Je n’ai pas de recette pour écrire et j’use d’un parler quotidien. »
À son actif, outre des « stand up comedies » dans les pubs (IM Chill, Zicco House, Baromètre), cinq pièces de théâtre : « Des black comedies », précise-t-il.
Des comédies à l’humour noir, grinçantes, griffues, aux titres bien libanais et qui piquent aussi bien la curiosité que les valeurs trop bien assises : Cola, Barbir, Mathaf, Dora, Solo aw solo, Khoubz arabi (Pain arabe), Kessat maout Nagib Brax (l’histoire de la mort Nagib Brax) et Not for public (Pas pour le public)...
Brassage de thèmes tirés souvent des médias qui l’inspirent. « Pour moi, explique-t-il, les médias reflètent la mentalité d’une société. Une société qui n’est pas une société. Un pays qui n’est pas un pays. Notre pays est un creuset d’expériences et d’expérimentations. Et l’art, monopolisé, va vers un aspect tribal. Mon texte n’a rien de poétique et j’utilise une langue simple. J’ai eu parfois quelques petites anicroches au niveau du texte avec la censure mais cela passe... ».
Et en quoi reconnaît-on les mises en scène de Hisham Jaber ? « Je suppose que ce sont les personnages qui marquent mes mises en scènes. Pour moi tout est lié. Chaque élément, chaque détail est important. »
Pour un mordu des planches, qui a du cœur et de l’admiration pour Chouchou et Chaplin, où se place en définitive l’acteur dans cette expérience théâtrale ? « J’aime être sous les feux de la rampe et interpréter des rôles de composition... ».
Et l’ambition dans ce monde de théâtre, monde de divertissement, de dépassement des traditions, d’ouverture vers le rêve et l’imaginaire, de reflet d’une société, de représentation où se marient contestation, réflexion et témoignage ? « Mon ambition est de m’amuser. » Ceci est dit en toute gravité. Sans l’ombre d’un sourire. Et de poursuivre : « Je ne veux pas changer le monde... Ce qui est beau est beau... Et puis, dans ce pays, on n’a pas le luxe de l’ambition. On doit essayer et expérimenter jusqu’à en crever... ».
Cheveux courts et barbe noire comme un pâtre grec, yeux malicieux derrière des lunettes à montures rondes, tee-shirt jaune ras du cou, bermuda à gros carreaux et bien entendu des baskets, signe distinctif de la génération montante. Voilà pour l’allure décontractée.Côté voix, basse, presque dans la barbe, avec un léger grasseyement inattendu, pour une discussion à bâtons...

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