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Entre Khartoum et Juba, une course- poursuite pour empêcher la guerre - Éclairage

Quel Soudan derrière les destructions du site pétrolier de Heglig ?

Juba est le suspect principal des dégâts de la raffinerie à la frontière entre les deux États, selon des experts.

Un inspecteur soudanais évaluant les dégâts dans une raffinerie endommagée de Heglig et essayant de déterminer le responsable de ces dommages. Ashraf Shazly/AFP

Dix jours d’occupation par les troupes de Juba, des bombardements de Khartoum en représailles : la question de la responsabilité des dégâts causés au site pétrolier de Heglig, à la frontière contestée entre les deux Soudans, reste posée. Les combats dans la zone de Heglig, le mois dernier, avaient fait monter d’un cran les tensions entre le Soudan et le Soudan du Sud qu’une guerre civile a opposés entre 1983 et 2005, faisant près de deux millions de morts.
Juba et Khartoum se sont mutuellement accusés des importants dommages subis par le site, qui assurait à Khartoum la moitié de sa production nationale (soit entre 50 000 et 55 000 barils par jour) jusqu’au 10 avril, date de sa capture par des troupes sudistes.
Lors de son occupation de Heglig, l’armée sud-soudanaise avait affirmé que Khartoum bombardait « aveuglément » la zone et qu’une frappe aérienne avait touché l’usine de traitement, qui avait pris feu, ce qu’avait démenti le Nord. Un oléoduc a également été endommagé pendant les dix jours d’occupation. Et le 20 avril, Khartoum avait annoncé avoir repris Heglig, Juba affirmant de son côté s’en être retiré à la demande de la communauté internationale.
Un diplomate africain, qui a participé à une visite organisée par le gouvernement soudanais à Heglig après sa « libération », estime que les dégâts ne semblent pas être le fait de bombardements aériens. Il a indiqué qu’une explosion sous le site de la centrale électrique avait laissé des affaissements dans le sol et que le toit s’était envolé, ce qui ne peut être le cas avec un raid aérien. Le diplomate, qui a requis l’anonymat, a indiqué qu’une odeur d’explosif était encore présente sur le site et qu’il voyait donc plutôt Juba être derrière l’attaque. « Je ne vois pas comment le Soudan se serait infligé lui-même ce genre de choses », dit-il. « C’était bien pensé, bien exécuté (...) juste assez pour mettre hors service l’installation, au moins pour un temps. »
Le Soudan a annoncé la semaine dernière avoir recommencé à pomper du pétrole dans son principal champ pétrolifère, mais une source proche de l’industrie pétrolière a indiqué que des mois pourraient être nécessaires avant une reprise totale de la production. En outre, selon un économiste étranger, les recettes pétrolières du Soudan ont diminué de 20 % depuis que Heglig a été touchée par les violences. Des pertes qui plombent encore davantage l’économie soudanaise, déjà en crise depuis la sécession en juillet 2011 du Soudan du Sud, où gisent près de 75 % des réserves de l’ancien Soudan unifié. Juba reste cependant tributaire des oléoducs soudanais pour exporter son pétrole. Parmi les nombreux différends à régler entre Juba et Khartoum figure la question des frais de passage. Khartoum a décidé de se payer en prélevant du pétrole sud-soudanais, à la fureur de Juba qui a stoppé sa production en janvier.
De plus, le Soudan a interdit aux journalistes de se rendre à Heglig lors des affrontements et ne les a autorisés à y aller brièvement, sous la bonne garde des forces gouvernementales, qu’une fois les Sudistes partis. « Ils ne voulaient pas qu’ils puissent se rendre compte des dommages », estime le porte-parole de l’armée sud-soudanaise Philip Aguer. « Quelle que soit l’histoire que donne Khartoum, c’est un mensonge. C’est leur propre bombardement. C’est leur propre destruction », dit-il. Magdi el-Gizouli, chercheur au Rift Valley Institute, pense de son côté que dans la mesure où Heglig constituait une zone de combats, « les deux parties ont contribué aux dommages ».
Dans une résolution le 2 mai, l’ONU a exhorté les deux parties à cesser leurs combats sous peine de sanctions et à reprendre les négociations d’ici au 16 mai, notamment au sujet du pétrole. Les Nations unies ont en outre appelé à une enquête impartiale pour établir le montant des dégâts occasionnés par les violences et recenser les conséquences sur le plan humanitaire à et autour de Heglig.

            (Source : AFP)
Dix jours d’occupation par les troupes de Juba, des bombardements de Khartoum en représailles : la question de la responsabilité des dégâts causés au site pétrolier de Heglig, à la frontière contestée entre les deux Soudans, reste posée. Les combats dans la zone de Heglig, le mois dernier, avaient fait monter d’un cran les tensions entre le Soudan et le Soudan du Sud qu’une...