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Moyen Orient et Monde - Révolte

Un cessez-le-feu en Syrie fragilisé par des violences meurtrières

Réactions internationales mitigées ; résolution à l’ONU aujourd’hui.

Le quartier Bab Dreib totalement détruit. Shaam News Network/AFP

Après son entrée en vigueur, le cessez-le-feu semblait difficilement tenir hier en Syrie et la prudence restait de mise, Kofi Annan demandant l’aide du Conseil de sécurité pour obtenir de Damas le retrait des soldats déployés dans les zones urbaines.

 

Cette disposition du plan de paix négocié par l’ancien secrétaire général des Nations unies n’a pas été respectée par l’armée syrienne. L’opposition comme les puissances occidentales y voient matière à douter de la sincérité du président Bachar el-Assad. « Toutes les parties ont l’obligation d’appliquer pleinement le plan en six points. Cela inclut à la fois les dispositions militaires du plan et l’engagement à aller vers un processus politique », a rappelé M. Annan dans un communiqué diffusé à Genève. Rendant compte de sa mission aux membres du Conseil de sécurité, le médiateur international a souligné que Damas ne s’était pas mis en totale conformité avec son plan de paix et que le régime devait retirer ses soldats et ses armes lourdes déployés dans les zones urbaines, a rapporté l’ambassadrice des États-Unis à l’ONU, Susan Rice, dont le pays préside ce mois-ci le Conseil de sécurité.

 

M. Annan a en outre estimé que techniquement, Damas n’avait pas respecté son plan de paix, mais que le fragile cessez-le-feu était « une chance à saisir ». Il a aussi demandé au Conseil d’autoriser le déploiement rapide d’une mission légère d’observateurs pour surveiller le cessez-le-feu, selon ces diplomates. Une proposition qui pourrait se réaliser dès aujourd’hui selon l’ambassadeur russe Vitali Tchourkine. Ce dernier a précisé qu’il s’agirait dans un premier temps d’un groupe de 20 à 30 personnes qui pourraient être sur place « au début de la semaine prochaine », ajoutant qu’une « mission en bonne et due forme prendra du temps à être déployée ». Une partie de ces observateurs pourrait être prise sur le contingent de la mission de l’ONU sur le Golan, a-t-il précisé. Selon le ministre français des Affaires étrangères Alain Juppé, un projet de texte élaboré par la France, les États-Unis et le Royaume-Uni devait être présenté au Conseil.

 

Erdogan et l’article 5 du traité de l’OTAN

Selon les projections faites par l’ONU, à terme ce sont quelque 250 observateurs non armés qui pourraient être déployés sous la protection de l’armée syrienne. Le général norvégien Robert Mood sera sur place aujourd’hui pour préparer l’arrivée des premiers observateurs, a annoncé le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. Ce dernier a par ailleurs souligné qu’il appartenait au gouvernement syrien de tenir ses engagements, d’autant que le cessez-le-feu semble fragile.

 

Lors d’un entretien téléphonique, le président américain Barack Obama et son homologue français Nicolas Sarkozy se sont mis d’accord pour intensifier leurs pressions sur le gouvernement syrien afin de le contraindre à cesser la répression contre son peuple et respecter « scrupuleusement » et « inconditionnellement » le plan de paix. M. Obama a estimé qu’en ne retirant pas ses forces des agglomérations, comme stipulé par le plan, le président était en mesure de reprendre à tout moment ses attaques contre l’opposition. La secrétaire d’État américaine, Hillary Clinton, a quant à elle estimé à Washington que le cessez-le-feu constituait un « pas important », à condition qu’il soit respecté. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a lui aussi jugé que Damas n’avait toujours pas rempli son engagement d’appliquer le plan Annan et a affirmé que son pays pourrait invoquer l’article 5 du traité de l’OTAN pour protéger sa frontière avec la Syrie.

 

Parallèlement, la France dispose « d’éléments de preuve » de crimes contre l’humanité commis par le régime Assad qui permettraient une éventuelle saisine de la justice internationale, a affirmé de son côté M. Juppé.

« La Chine salue la décision (de cessez-le-feu) du gouvernement syrien, qui va permettre de diminuer la tension et qui représente une étape importante vers une solution politique de la crise », a jugé pour sa part le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Liu Weimin, ajoutant que « la Chine appelle en même temps l’opposition syrienne à respecter un cessez-le-feu immédiat ». Le Premier ministre britannique David Cameron a, lui, demandé à la Russie et à la Chine de se joindre à la communauté internationale pour « resserrer l’étau » autour du régime, qui a « délibérément bafoué » le plan Annan.

 

Dans le même temps, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a appelé à donner du temps au plan, intimant aux pays arabes et occidentaux de cesser d’encourager, selon lui, l’opposition. « L’objectif est d’amener tous les Syriens à la table de négociations. Assad nous dit qu’il y est prêt, on peut dire pour le moins que personne n’a encore vérifié cette déclaration », a-t-il déclaré. Le chef de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, a de son côté salué les « développements positifs en Syrie ».

 

18 morts

Sur le terrain, malgré le cessez-le-feu et la promesse des rebelles de s’« engager à 100 % » à le respecter et de ne pas répondre aux « provocations » du régime, selon le porte-parole de l’Armée syrienne libre (ASL), des violences ont quand même fait 18 morts, selon la chaîne de télévision satellitaire al-Arabiya. Cinq civils ont ainsi été tués par les forces de sécurité ou les milices prorégime à Homs, dans la province de Hama (centre) et dans celles de Damas et d’Idleb. En outre, un officier de l’armée a péri dans l’explosion d’une bombe à Alep, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) et l’agence officielle SANA, qui a évoqué une attaque « terroriste ».

 

Parallèlement, des milliers de Syriens ont manifesté, selon des militants, après que le chef du Conseil national syrien (CNS) a appelé à des défilés le jour de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Des manifestations ont ainsi eu lieu dans les province d’Idleb, Homs, Deraa, Raqa, Damas et Deir ez-Zor, la plus grande s’étant déroulée à Alep, la deuxième ville dans le nord du pays, selon des vidéos mises en ligne par des militants. « Au moins 5 000 personnes ont participé à des funérailles qui se sont transformées en manifestation réclamant la chute du régime » à Alep, a affirmé un militant sur place, faisant état de tirs. « Nous appelons le peuple à manifester et à s’exprimer car c’est un droit absolu, les manifestations étant un point essentiel du plan » de Kofi Annan, avait auparavant affirmé Burhan Ghalioun, le chef du CNS. « Le cessez-le-feu n’a aucune valeur s’il ne permet pas au peuple de manifester et le plan Annan n’a aucune valeur s’il ne permet pas la transition du pays vers un gouvernement démocratique pluraliste », a dit M. Ghalioun. « Le vrai test sera vendredi, pour voir si les forces du régime vont tirer sur la foule », a indiqué de son côté à l’AFP Moaz, un militant des Comités locaux de coordination (LCC), qui animent la contestation sur le terrain.

 

Le test aujourd’hui

De leur côté, des militants prodémocratie ont d’ailleurs appelé à manifester à nouveau aujourd’hui, journée hebdomadaire de mobilisation depuis plus d’un an en Syrie, sous le slogan « La révolution pour tous les Syriens », sur leur page Facebook « Syrian Revolution 2011 ». Sur une autre page Facebook, Sham News Network (SNN), des militants ont appelé à la mobilisation dans une vidéo, déclarant : « Vous qui hésitez, sortez de votre silence ou taisez-vous à jamais. » Affirmant que « toutes les religions et tous les courants participent à la révolution contre le pouvoir autoritaire et répressif », ils ont diffusé des images montrant des victimes issues des différentes communautés, sur lesquelles ils ont écrit : « Le sang est toujours rouge. »

 

Ces appels semblent être un moyen de tester les intentions du régime de Bachar el-Assad, dont les troupes, toujours déployées en force dans les hauts lieux de la contestation, ont toujours réprimé les manifestations hostiles au pouvoir. Le ministère de l’Intérieur syrien a rappelé quant à lui que les manifestants devaient demander une autorisation officielle avant d’organiser tout rassemblement.

 

Par ailleurs, après l’annonce de l’arrêt des opérations militaires, le ministère de l’Intérieur a appelé au retour des dizaines de milliers de Syriens réfugiés dans les pays et promis une amnistie pour les hommes armés n’ayant pas du « sang sur les mains ».

 

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