L’ancêtre métallique ...
13 avril 1975.
Un bus transportant des militants palestiniens est la cible de tirs nourris dans le quartier de Aïn el-Remmaneh : 27 personnes sont tuées et 19 autres ont été blessées. Les Libanais (les simples citoyens du moins) ignorent alors qu’une guerre civile s’apprête à dévaster leur pays durant les quinze années à venir. Quinze ans de sang, de poudre, de plomb et d’épuration ethnique feront de « bostet Aïn el-Remmaneh » l’un des symboles phares de cette tragédie, mais, ironiquement aussi, l’un des rares traits d’union de l’histoire libanaise.
Trente-sept ans plus tard, la guerre est terminée en principe, mais le bus est toujours là, gisant, criblé de balles, rongé par la rouille, dans une aire d’exposition appartenant à l’ONG UMAM, à Haret Hreik.
En ce 13 avril 2012, UMAM veut nous prouver que l’intensité de ce symbolisme perdure dans le fond de notre conscience en lançant hier son initiative « Et si le bus pouvait parler... voyage au cœur de la mémoire du Liban et des Libanais ». Soutenue par le programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et par l’Union européenne, l’ONG a choisi de passer le flambeau du symbole à un nouveau bus plus adapté et contemporain. Stationné dans les locaux d’UMAM, le nouveau véhicule, un « descendant » de la bosta d’origine, semblait attendre patiemment le début de sa mission. Un intérieur équipé de matériel multimédia diversifié détonne avec la simplicité de l’extérieur. La nouvelle mission : sillonner le Liban dans le but d’informer et de prévenir les Libanais des horreurs de la guerre, toutes les guerres. Afin de mieux accomplir cette tâche, cet ancien retraité de la ligne Beyrouth-Saïda, sera bourré d’archives laborieusement rassemblées par UMAM sur le conflit interlibanais.
« Le Liban ne pourra pas tourner la page de la guerre sans d’abord la lire et la comprendre », a annoncé Lokman Slim, directeur de l’ONG, à une foule qui comptait dans ses rangs le ministre des Affaires étrangères, Adnane Mansour, le représentant du PNUD au Liban, Robert Watkins, et le représentant de l’Union européenne, Diego Escalona Paturel.
« Étant donné que toute bonne lecture est une lecture diversifiée, il est de notre devoir d’inviter les Libanais à mieux comprendre les différents points de vue qui se complètent pour éclairer les tenants et les aboutissants de cette guerre », a-t-il ajouté avec insistance.
Le nouveau bus a réussi à dessiner de petits sourires sur le visage des quelques personnes qui y sont entrées. Histoire de guérir les plaies et les maux d’une génération et d’un peuple traumatisé, ce bus et ses accompagnateurs tenteront d’expliquer aux Libanais cette guerre qui est sortie en principe par la porte, mais qui rentre parfois le bout de son nez par la fenêtre.
Malgré ses équipements high-tech, le nouveau bus de Aïn el-Remmaneh a focalisé l’attention de tous les présents. Les pages Facebook de ceux qui se sont pressés pour le prendre en photo en témoigneront probablement.
Au moins nous sommes d’accord sur un point (de départ) de notre histoire.
Nos lecteurs ont la parole
Une guerre qui ne veut pas dire son nom, par Bahjat RIZK
Comment s’est opérée au Liban la modification des influences régionales depuis 1975, par Riad JREIGE
Un bus transportant des militants palestiniens est la cible de tirs nourris dans le quartier de Aïn el-Remmaneh : 27 personnes sont tuées et 19 autres ont été blessées. Les Libanais (les simples citoyens du moins) ignorent alors qu’une guerre civile s’apprête à dévaster leur pays durant les quinze années à venir. Quinze ans de sang, de poudre, de plomb et d’épuration ethnique feront de « bostet Aïn el-Remmaneh » l’un des symboles phares de cette tragédie, mais, ironiquement aussi, l’un des rares traits d’union de l’histoire libanaise.
Trente-sept ans plus tard, la guerre est terminée en principe, mais le bus est toujours là, gisant, criblé de balles, rongé par la rouille, dans une aire d’exposition appartenant à l’ONG UMAM, à Haret Hreik.
En ce 13 avril 2012, UMAM veut nous...
En 1975, il n’y avait que quelques tours pour les tireurs embusqués. Aujourd’hui, ils ont l’embarras du choix. Nos très chers patriotes ministres et députés seront toujours fiers de donner aux étrangers des droits que les Libanais eux-mêmes n’auront certainement pas. Chômage, maigres salaires, horizons bouchés pour nos jeunes diplômés, condition sociale nulle, pas d’eau ni d’électricité… Tant de causes justes qui déboucheront sur un avril 1975, celui-là même qui, dans le temps et au nom des opprimés, a fait sauter tous les verrous. Sauf que, cette fois, la bataille sera plus âpre, avec un séisme démographique cruel. Antoine Sabbagha
05 h 59, le 13 avril 2012