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Liban

Le coaching professionnel en plein essor

Lié au milieu du sport jusque dans les années quatre-vingt, le coaching – ou mentorat, en français – a connu une petite révolution au cours des trente dernières années, s’étendant à de multiples domaines tels que la gestion et la finance. Au Liban, les entreprises semblent suivre la dynamique.

M. Samir Zehil.

Importé d’Amérique du Nord, le terme coaching reste aujourd’hui encore ce que l’on nomme communément un mot valise. « On y regroupe plusieurs types de pratiques : du coaching dans le milieu du sport, dans le monde de la finance, en termes de développement personnel », précise Samir Élias Zehil, coach en entreprise basé à Beyrouth. La Fédération internationale de coaching, première association internationale de coachs professionnels, définit cette pratique comme « une relation suivie dans une période définie qui permet au client d’obtenir des résultats concrets et mesurables dans sa vie professionnelle et personnelle. À travers le processus de coaching, le client approfondit ses connaissances et améliore ses performances. » Amalgame de plusieurs piliers théoriques, tels que la psychologie, la philosophie ou le management, le coaching en entreprise fait peu à peu son trou au pays du Cèdre.

« L’important est de vouloir changer soi-même »
À dissocier du training, par lequel le bénéficiaire de la formation reçoit directement du consultant les outils nécessaires pour agir, le coaching base son action sur la collaboration étroite entre le coach et son client pour que ce dernier « trouve lui-même les outils pour parvenir à évoluer, en utilisant des compétences qui lui sont propres. C’est la personne demandeuse qui doit faire émerger les solutions », soutient Roula Saba-Mouhanna, coach depuis près de six ans. Dans le milieu, les professionnels appellent cela les arts maïeutiques, théorisés par Aristote. Soit l’art d’accoucher les esprits : on ne dit pas à une personne ce qu’elle ne sait pas, mais on lui révèle ce qu’elle sait déjà.
Souvent d’anciens cadres d’entreprise eux-mêmes, les coachs s’inspirent de leur expérience passée pour faciliter le dialogue avec les cadres et employés d’une entreprise. En raison du flou qui entoure encore la profession et de la difficulté à harmoniser une formation qui doit être validée en dehors du pays faute de diplôme d’État, le métier commence tout juste à s’organiser au Liban. Roula Saba-Mouhanna, membre de l’Association des coachs libanais, souligne sur ce plan qu’ « il y a une abondance de professionnels dans le pays, mais il manquait une structure les réunissant tous. Régulièrement, j’apprends l’existence de nouveaux coachs libanais. »
Ceux-ci évoquent la mentalité d’entreprise longtemps spécifique au Liban, marquée par la volonté de régler les problèmes de l’entreprise en son sein, sans faire appel à une aide extérieure. « Ils disent parfois qu’ils ont besoin de consultants, pas de coachs. Dans certaines entreprises, on insiste sur le capital matériel et pas assez sur le capital humain. » Ainsi, à Mozart Chahine, l’entreprise spécialisée dans la vente d’instruments musicaux, les employés suivent des séances de coaching tous les ans. Le vendeur de la boutique située à Achrafieh explique que « ces séances servent à apprendre à gérer les situations de stress au travail, les clients difficiles. Ensuite, nous travaillons individuellement ces acquis tout au long de l’année ». C’est l’entreprise qui finance ces séances de coaching aux salariés, et qui conseille fortement d’y assister.

Un investissement humain pour l’avenir
 De nombreuses entreprises libanaises se tournent donc aujourd’hui vers le coaching pour lever les difficultés qui entravent leur marche en avant. Ces entreprises travaillent principalement dans la finance, les services ou la grande distribution. « On vit dans un siècle où l’on est en permanence en train de courir. Nous n’avons que trop rarement le temps de penser à ce que l’on aimerait réellement faire. La demande est très grande », insiste Roula Saba-Mouhanna.

Seulement 3 à 4 % de succès, selon certaines études
Ainsi, si depuis plusieurs années certains coachs libanais sont à créditer d’une bonne réputation au pays du Cèdre, voire au niveau international, c’est aussi parce qu’ils ont appris à tenir compte des particularités de leurs interlocuteurs : « Il existe dans l’espace méditerranéen une certaine sensibilité culturelle qu’il convient de s’approprier, pour que la formation soit pertinente en termes de gestuelle, de posture ou d’anecdote. Au Liban, en Suède ou aux États-Unis, la formation n’est bien évidemment pas la même », précise Samir Zehil. Les formations sont financées la plupart du temps par les entreprises et considérées comme un investissement humain pour l’avenir. Le prix d’une séance de coaching peut varier fortement : il oscille en général entre 40 et 300 dollars par personne, soit un certain investissement lorsque les formations sont collectives.
Pour autant, la dynamique ascendante du coaching connaît-elle quelques limites ? D’après Samir Zehil, « certaines personnes sont sujettes au changement, et d’autres non ». Le nombre de personnes qui ressentent réellement les bienfaits de la formation reste aujourd’hui « difficilement quantifiable », souligne Roula Saba-Mouhanna. Le chiffre de 3 à 4 % de succès est avancé par certaines études. Geneviève Guilhaume, maître de conférences à l’Université Michel de Montaigne de Bordeaux, a rédigé une thèse sur le sujet du coaching comme « violence euphémisée ». Selon ses dires, il convient de « dépasser les discours convenus sur les supposés bienfaits du coaching ».
Elle explique ainsi que la démarche d’accompagnement par le biais des séances de coaching se trouve, dans de nombreux cas, « imposée aux salariés et notamment aux managers dans un souci de rentabilité ». « Toutes les questions liées à la souffrance au travail (...) sont ainsi gommées, précise-t-elle. Le salarié, dans le management actuel au sein des entreprises, est considéré comme le seul acteur et responsable de sa réussite ou de son échec professionnel. » Le contexte organisationnel hostile dans lequel les employés sont parfois contraints d’évoluer est ainsi dissimulé. Reste à savoir si le coaching libanais, entreprenant mais encore balbutiant, saura éviter ces écueils pour proposer une offre de service au profit de la réussite de tous les salariés, non seulement en termes de productivité, mais également et surtout en ce qui concerne le bien-être au travail.
Importé d’Amérique du Nord, le terme coaching reste aujourd’hui encore ce que l’on nomme communément un mot valise. « On y regroupe plusieurs types de pratiques : du coaching dans le milieu du sport, dans le monde de la finance, en termes de développement personnel », précise Samir Élias Zehil, coach en entreprise basé à Beyrouth. La Fédération internationale de...

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