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Lifestyle - Objets et histoire

Sacher... manger !

Au printemps 1880, Édouard Sacher, cuisinier et fin gastronome, propriétaire de l'hôtel de l'Opéra au « 4 de la Augustinerstrabe », la place la plus élégante et fréquentée de Vienne, venait d'avoir 39 ans quand il épousa Anna Fuchs, âgée de 21 ans. La très coquette et très résolue madame Sacher s'adapta très vite à son nouvel emploi et devint bientôt le soutien indispensable de son Édouard.
Grâce à l'excellente cuisine, à l'atmosphère délicatement feutrée de la maison, ainsi qu'à la maîtresse des lieux qui s'occupait des hôtes de manière exemplaire, l'hôtel devint un pôle d'attraction. Il comptait parmi ses clients les plus hauts représentants de l'aristrocatie austro-hongroise. On y appréciait l'art culinaire d'Édouard Sacher et, surtout, la fameuse tarte Sacher. Cette tarte était l'invention du père d'Édouard, Franz, lui-même cuisinier ayant travaillé derrière les fourneaux de grandes maisons. Certains jours, l'hôtel de l'Opéra expédiait à Paris, Londres ou Berlin plus de quatre cents tartes. L'impératrice Élisabeth (Sissi) elle-même commanda une de ces fameuses tartes au chocolat et à la confiture d'abricot. C'était en 1891.
En 1892, Édouard décéda de manière inattendue, laissant à Anna une entreprise florissante. Personne ne douta un instant qu'Anna Sacher allait reprendre seule la direction de l'hôtel de l'Opéra, devenu hôtel Sacher. Pourtant, du vivant de son mari, elle tenait déja les rênes, mais les débuts furent difficiles : le brevet ainsi que le label « fournisseur de la cour », indispensable pour la publicité, étaient établis au nom de son époux, il fallait les mériter de nouveau. Avec son énergie, elle y parvint et devint pour les Viennois une figure inoubliable, toujours entourée de plusieurs bull-terriers, invariablement un cigare à la bouche, lançant des ordres rapides d'une voix grave ou bavardant avec amabilité.
Mais madame Sacher avait aussi un grand sens des relations publiques : elle savait le pouvoir d'attraction qu'exerçaient certains objets cultes sur les hôtes. Il y avait par exemple la chambre du roi Milan, que le roi serbe occupait chaque fois qu'il séjournait à Vienne, et la chambre du prince héritier Rudolf, dont le mobilier provenait du château de chasse Mayerling. Elle collectait également sur une nappe les autographes d'invités particuliers dont on pouvait ensuite broder le nom en couleur sur damas blanc ; on peut encore admirer la nappe en question avec au milieu le paraphe de l'empereur Francois-Joseph.
Pour rester à la première place, il fallait ne jamais ménager ses efforts. Elle était présente à toute heure. Elle se montrait généreuse avec les fils de bonne famille qui avaient peu d'argent de poche. Quand un jeune prince était à cours d'argent, elle faisait passer ses factures impayées en pertes et profits avec la certitude que les « jeunots du Sacher » seraient, une fois adultes, des clients financièrement intéressants. Les étudiants de l'Académie des arts, auxquels elle offrait un repas gratuit à midi, représentaient une autre forme d'investissement : beaucoup d'entre eux la remerciaient plus tard avec un tableau.
Les années de succès, où la splendeur de la monarchie avait permis à l'hôtel Sacher de vivre une époque fastueuse, prirent brusquement fin avec la Première Guerre mondiale ; et au lieu d'archiducs et de princesses, l'on vit affluer dans le hall de l'hôtel Sacher toute une clientèle de nouveaux riches...
Anna mourut le 25 février 1930 à l'hôtel. Le jour de ses funérailles, des milliers de personnes étaient présentes. Toutes étaient en deuil de l'une des plus célèbres Viennoises et, avec elle, d'une époque révolue...
L'hôtel, lui, est toujours aussi prestigieux, et il est impossible de visiter Vienne sans faire une escale à l'hôtel Sacher pour goûter à son chocolat chaud et son inégalable Sachertorte. « La véritable tarte ne se mange qu'ici », explique fièrement le directeur de l'hôtel, Reiner Heilman. La recette secrète, gardée dans notre coffre-fort, n'a jamais été révélée. Nos concurrents ont cherché à nous imiter, mais sans succès. D'ailleurs, en 1955, l'hôtel a dû mener une guerre sans merci dans les tribunaux contre le café Démel, qui revendiquait la paternité de la tarte. Cet événement fut connu sous le nom de « la Guerre de sept ans doux ». Finalement, il fallut qu'un décret soit voté par la Cour suprême, en 1962, pour donner l'authenticité du gâteau original à l'hôtel Sacher...

Sources principales :
courrierinternational.com
Femmes d'affaires mythiques
(C. Lanfranconi)
latimes.com
Au printemps 1880, Édouard Sacher, cuisinier et fin gastronome, propriétaire de l'hôtel de l'Opéra au « 4 de la Augustinerstrabe », la place la plus élégante et fréquentée de Vienne, venait d'avoir 39 ans quand il épousa Anna Fuchs, âgée de 21 ans. La très coquette et très résolue madame Sacher s'adapta très vite à son nouvel emploi et devint bientôt le soutien...

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