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Économie - Éclairage

Les idées de l’altermondialisme « récupérées », mais rarement mises en œuvre

Les propositions des altermondialistes « pour la souveraineté alimentaire » ou « contre l'opacité financière » ne sont plus décriées comme de simples chimères, mais si des politiques les ont récupérées, ils les ont rarement mises en œuvre.
Dix ans après le premier rassemblement pour « un autre monde » à Porto Alegre (Brésil), des revendications « jugées hier par certains comme de pures utopies » ont « fait leur chemin dans l'opinion publique », constate Bernard Pinaud, dirigeant de la première ONG française de développement, le CCFD-Terre solidaire (Comité catholique contre la faim et pour le développement).
Elles se retrouvent même « sur la table des propositions des politiques », dit-il, en énumérant toute une série d'idées qui se sont popularisées en une décennie : « Annulation de la dette, taxes sur les transactions financières, régulation de la finance, lutte contre les paradis fiscaux, régulation des marchés agricoles, remise en cause du PIB comme seul indicateur de richesse. »
« C'est là peut-être le défi du mouvement altermondialiste. Victime de son succès, ses propositions sont récupérées sans lui reconnaître la paternité, et pas vraiment mises en œuvre », écrit M. Pineau dans un texte publié à l'occasion du 11e Forum social mondial (FSM) qui a lieu à Dakar.
Au début des années 2000, « l'économie libérale semblait encore incontestable. Je me souviens que des journalistes américains décrivaient nos forums comme de simples événements festifs », dit à l'AFP le Malien Ibrahima Coulibaly, président de la Coordination nationale des organisations paysannes (CNOP).
« Mais avec la succession de crises - financière, énergétique, alimentaire, climatique -, les gens ont réalisé que le système en place était fou. Aujourd'hui, nos idées sont reprises, mais dénaturées », assure-t-il.
Selon lui, « bien des chefs d'État se sont mis à parler de "souveraineté alimentaire", concept diffusé par le mouvement international Via Campesina pour la protection des agricultures locales et le soutien aux petits paysans. Dans les faits, le modèle des grosses entreprises et la mécanisation à marche forcée restent favorisés. C'est extrêmement grave parce qu'au Mali, c'est l'agriculture familiale qui crée jusqu'à 75 % de l'emploi ».
M. Coulibaly n'aime plus trop parler d'un sujet qu'il qualifie de « douloureux » : la longue et difficile lutte diplomatique engagée en 2001 par le Tchad, le Burkina Faso, le Mali et le Bénin, pour la survie du coton africain, qui demandent, en vain, à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) la suppression des aides massives que les États-Unis et l'Union européenne (UE) attribuent à leurs producteurs.
« Les pays développés se donnent toujours le droit de continuer à subventionner leur coton et nos pays ne pèsent rien dans ces négociations », constate M. Coulibaly, « sans pour autant baisser les bras ».
De son côté, l'ancienne magistrate franco-norvégienne Eva Joly, députée européenne des Verts, semble plus engagée que jamais dans « le combat contre les transferts illicites de capitaux » à travers le monde.
C'est « sous la pression des mouvements tiers-mondistes que la dénonciation de l'opacité financière est devenue du domaine commun », a-t-elle dit à Dakar.
« Les gouvernements ont de plus en plus de mal, par exemple, à justifier leur soutien aux paradis fiscaux », ces territoires où les impôts sont très bas ou inexistants et où les multinationales peuvent se domicilier sans y avoir d'activité économique réelle.
Par ailleurs, « voir que les biens du président tunisien déchu Ben Ali ont été saisis dans les pays de l'UE, dix jours après sa fuite, c'est une grande nouveauté, un signal fort à l'attention des dictateurs "kleptocrates" ! », se félicite l'ancien juge anticorruption.

Les propositions des altermondialistes « pour la souveraineté alimentaire » ou « contre l'opacité financière » ne sont plus décriées comme de simples chimères, mais si des politiques les ont récupérées, ils les ont rarement mises en œuvre.Dix ans après le premier rassemblement pour « un autre monde » à Porto Alegre (Brésil), des revendications « jugées hier...

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