Trois événements se sont déroulés ces derniers jours et risquent de marquer la période à venir dans la région. Les médias se sont d'ailleurs contentés de les décrire sans se risquer encore à en analyser toute la portée. Il y a eu d'abord l'annonce officielle de la reprise des négociations directes entre l'Autorité palestinienne et le gouvernement israélien sous l'égide des États-Unis, le début du retrait des troupes américaines d'Irak et enfin le lancement de la centrale nucléaire de Bouchehr en Iran. Ces trois événements n'ont peut-être aucun lien entre eux, mais dans une région aussi perturbée, qui concentre désormais les tensions internationales, les coïncidences sont rares.
Une source diplomatique libanaise exprime d'ailleurs son inquiétude au sujet des développements régionaux au cours des prochains mois. Depuis quelque temps, il était question d'un automne chaud, et nous y voici presque avec de bonnes raisons, estime cette source, de craindre des retombées négatives pour le Liban. Autant, selon cette source, la nouvelle du lancement avec l'aide de la Russie de la centrale nucléaire de Bouchehr en Iran peut être considérée comme un développement positif, autant la reprise des négociations israélo-palestiniennes, elle, peut être porteuse d'indices négatifs.
Selon cette source, la Russie n'aurait pas aidé l'Iran à mettre en marche sa centrale nucléaire sans un feu vert tacite américain. Elle précise ainsi que ce qu'on appelle vaguement l'Occident aurait décidé de renouer le dialogue avec l'Iran, sans pour autant renoncer aux moyens de pression à sa disposition. Aussi bien l'Iran que l'Occident seraient donc désormais en train de chercher à accumuler des cartes, pour les jouer l'une après l'autre, à partir du jour où le dialogue reprendra officiellement. Le lancement de la centrale de Bouchehr constituerait ainsi un changement stratégique dans l'attitude de l'Occident par rapport à l'Iran. La communauté internationale serait donc désormais convaincue qu'elle a besoin dans la région d'un partenaire fort, en mesure de l'aider à résoudre les problèmes en suspens qui sont en train de se transformer en bourbiers, notamment en Afghanistan et en Irak. Du temps de l'administration Bush, les États-Unis pensaient pouvoir traiter les dossiers à la carte, mais l'Iran de son côté a toujours voulu un menu global. Aujourd'hui, il semble de plus en plus évident que l'Iran a un rôle-clé à jouer en Irak, en Afghanistan et au Pakistan. Mais c'est dans le dossier arabo-palestinien que la partie reste la plus serrée, car si l'administration américaine s'est plus ou moins inclinée devant le rôle incontournable de l'Iran dans les dossiers irakien et afghan, au Moyen-Orient, elle a dû surtout tenir compte de son encombrant allié Israël, qui n'a fait aucune concession, mais a quand même remporté la manche en obtenant la reprise des négociations directes avec l'Autorité palestinienne, sans engagement de sa part à l'arrêt des colonisations.
C'est d'ailleurs ce point qui risque d'avoir les conséquences les plus négatives pour le Liban. Apparemment, l'administration américaine est déterminée à parvenir à un accord dans un délai d'un an et les négociations directes devraient se faire en quatre temps, d'abord pour étudier le dossier sécuritaire et celui des frontières, ensuite pour le problème des réfugiés et enfin pour décider du statut de Jérusalem. L'idée est donc de commencer par les points les moins compliqués et de laisser les plus difficiles pour la fin.
Si les deux premiers sujets ne devraient pas poser de graves problèmes, les deux parties s'étant déjà plus ou moins entendues sur un échange de territoires, le troisième et le quatrième restent litigieux. Pourtant, des responsables jordaniens auraient déclaré récemment que l'implantation des Palestiniens au Liban est inéluctable et ce qui s'est passé au Parlement libanais la semaine dernière serait un prélude satisfaisant. C'est ainsi qu'on revient au dossier libanais, qui reste la scène la plus propice au règlement des conflits régionaux. La source diplomatique libanaise révèle ainsi qu'avec la publication annoncée de l'acte d'accusation et son implication éventuelle de membres du Hezbollah, la situation deviendrait suffisamment confuse au Liban pour faire passer l'accord possible entre les Palestiniens et les Israéliens aux conditions israéliennes sans la moindre protestation. D'ailleurs, relève la même source, depuis que les pronostics au sujet du contenu de l'acte d'accusation ont commencé à se multiplier, le commandement du Hezbollah y consacre une grande partie de son temps, détournant les yeux de ce qui se passe sur la scène palestinienne. En un mot, l'Iran est occupée par les sanctions et par les perspectives d'un dialogue avec la communauté internationale, le Hamas est encerclé et le Hezbollah est pris par la scène interne. Quelle meilleure configuration pour régler un vieux contentieux aux meilleures conditions pour Israël et liquider ainsi en quelque sorte la cause palestinienne ?...