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Jeunes méditerranéens - Méditerranée

Maroun et son Liban

Fervent militant et activiste auprès d’un parti politique chrétien, Maroun a passé le plus clair de ses années universitaires, vers les années 2000, à militer au sein des groupes estudiantins.

Impliqué dans plusieurs conflits avec ses adversaires politiques du même campus universitaire, son engagement va lui coûter des années d’études ratées mais surtout des poursuites en justice. Arrestation pour distribution de tracts politiques, manifestations réprimées, implication dans des combats au sein de l’université, … Mais rien ne semblait l’arrêter. A 30 ans, Maroun a gardé des séquelles de son activisme, une cicatrice sur la joue droite reçue par un adversaire politique à l’université, mais surtout de nombreuses plaies que la médecine ne saurait guérir.

Même si aujourd’hui, les hostilités ont cessé, la haine lui aura longtemps empêché de tourner la page. «Certains définissent cette attitude de marginale, d’autres y perçoivent un engagement. A 18 ans, je n’avais qu’un seul objectif, dire non au statu quo politique qui dénigrait la jeunesse libanaise et l’empêchait de s’exprimer, de vivre librement dans son Liban.» Son Liban a lui sera bientôt sa raison de vivre. Sa vie sociale mise entre parenthèses, il s’adonnera, comme de nombreux jeunes Libanais, à cette cause. Il faudra 6 ans à Maroun pour obtenir sa licence en droit, dont deux ratées en trainant d’une manifestation à l’autre.

La fumée de sa cigarette en dit long sur son passé. «Je devais agir, au-delà de mes livres et de mes cours, je devais surtout comprendre comment le Liban en est arrivé là. Comprendre mais surtout refuser que les auteurs de la guerre civile soient toujours au pouvoir.» La guerre civile paraît pourtant bien loin mais ses séquelles lui reviennent tous les jours en pleine face. Le jeune homme se laisse porter par ses souvenirs. Replonger dans l’atrocité de cette guerre civile qui lui a coûté la perte de son père lui semble machinal, presque anodin. Pourtant, un rayon de joie illumine son regard dès qu’il prononce son nom. «Abou Maroun est un héros à mes yeux et aux yeux de plusieurs Libanais,»avance-t-il. Son regard se durcit aussitôt, «C’est cette impitoyable machine à tuer qui m’a privé de mon père», lance-t-il, en ébauchant un sourire nerveux. Elie, son père, était officier dans l’armée libanaise. Mort en 1988 sur le terrain, Elie laissera derrière lui une veuve et deux jeunes garçons dont l’aîné est Maroun. «Je me demande souvent si les belligérants de cette guerre ont parfois le sentiment d’avoir mal agi, s’ils ont sur la conscience des enfants désormais sans père ou des mères sans fils.» Une question à laquelle nul ne saurait répondre. Pourtant, Maroun a appris à vivre avec les profondes meurtrissures de la guerre civile. «L’homme que je suis aujourd’hui est le produit de mon histoire familiale, mais surtout de mon parcours politique à l’université.»

Depuis, Maroun est devenu avocat et volontaire à la Croix-Rouge libanaise. En juillet 2006, Maroun sera activiste auprès des associations et mouvements humanitaires accompagnant les réfugiés du Sud du Liban. «Notre génération a vécu 4 guerres, et même plus si on compte les conflits régionaux! On dirait que le Liban vit de ses guerres, je me demande parfois si le Liban est condamné à la guerre continuelle!».

Après la guerre, une autre guerre


L’assaut israélien sur le Liban en juillet 2006 replonge Maroun dans les années obscures de la guerre libanaise. La violence et l’horreur de cette offensive traceront une cicatrice de plus dans son cœur. «Les Israéliens n’ont pas fait la différence entre les cibles civiles et militaires, entre les hommes armés et les enfants ou les femmes.». Après la victoire libanaise sur l’armée israélienne, il suivra le flot des réfugiés retournant dans leur village. Maroun relate les scènes de destruction d’un sang-froid qui en dit long sur ce qu’il a pu voir ou vivre. «Dans Maroun el ras, devenue ville fantôme, j’avais l’impression encore d’entendre l’écho des souffles de missiles résonnant dans les vallées.» Une scène en particulier restera longuement gravée dans sa mémoire : «Je me souviendrai toujours de ce jeune garçon de 9 ans, Ali qui, en parcourant son village dévasté à la recherche des ruines de sa maison, me regarde et lance d’un optimisme percutant, «tu sais Maroun, ils ont réussi à détruire nos maisons, mais ils ne pourront jamais nous détruire !»

Devant les villages entièrement rasés et la volonté de reconstruction des habitants du Sud, Maroun puisera une nouvelle force. «Beaucoup de Libanais sont morts pour leur cause, pour leur Liban à eux, mais ce qui nous unit, c’est bien notre attachement à cette terre. Rejaillir de sous les cendres ? C’est tout à fait libanais!».

Impliqué dans plusieurs conflits avec ses adversaires politiques du même campus universitaire, son engagement va lui coûter des années d’études ratées mais surtout des poursuites en justice. Arrestation pour distribution de tracts politiques, manifestations réprimées, implication dans des combats au sein de...