Bienvenue au monde des « Utopies »

Le commissaire de cette large manifestation n'est autre que Jany Bourdais, attaché culturel et audiovisuel près l'ambassade française qui, entouré de son équipe, a réussi à concocter cet événement. «Utopie fait partie des rêves réalisables», affirme Bourdais. En effet, si étymologiquement en grec le mot signifie «en aucun lieu» ou «nulle part», cela permet néanmoins de construire quelque chose à partir de ce même nulle part. «Un lieu de bonheur?» Probablement, car la définition évoque également ce sens.
Mais comment est né ce projet d'«Utopies» et pourquoi? «D'abord parce que le sujet nous intéresse tous et fait partie de nos cultures diverses, dit Bourdais, et parce que le Liban illustre un peu ce concept utopique.» «C'est Thomas More, ajoute-t-il, qui a largement développé cette forme d'utopie dans son "court traité sur la meilleure forme de gouvernement" en brossant le portrait d'un monde imaginaire.» «Mais la programmation est d'autant plus intéressante, précise Jany Bourdais, qu'elle est le fruit d'efforts conjugués et qu'elle aborde différents domaines. Nous n'avons pas de solutions définitives à proposer, mais nous invitons des personnes qui offrent à voir leurs propres utopies.»

Un programme pluridisciplinaire
En effet, comme ces utopies sont indissociables de la création artistique, les arts plastiques et de la scène, le cinéma et la littérature occupent une place de choix dans ce programme panaché.
Le programme est inauguré par une large exposition, «Voyage en utopie», qui se déroulera jusqu'au 4 juin dans la salle d'expositions et qui confronte les travaux de trois plasticiens français, Claude Closky, Nicolas Moulin et Nicolas Prache, avec ceux de quatre autres artistes libanais, Rabih Mroué, Bernard Khoury, ainsi que Joanna Hadjithomas et Khalil Joreige.
Dans les arts de la scène, c'est le collectif «aïe aïe aïe» qui présente les 6 et 7 mai, à 20 heures et 21 heures, au Théâtre de Beyrouth (un autre lieu mythique et utopique), la pièce Mon œil. Deux représentations seront assurées pour les scolaires la matinée du jeudi 6 mai. L'entrée est libre, mais sur réservation uniquement.
D'autre part, un autre personnage traduit ce rêve d'un État ou d'un empire. Le programme «Utopies» ne pouvait que s'attarder sur «l'empereur Michel 1er et dernier de Nowheristan» (à savoir, Michel Éléftériadès) qui donne une conférence de presse le 11 mai, à 18h30, au théâtre Montaigne, sur le thème d'«Utopie d'aujourd'hui, réalité de demain». Il aura également carte blanche dans le cadre des activités cinématographiques. À cette occasion, il a choisi le film Bunker Palace Hotel d'Enki Bilal qui sera projeté à la suite de la conférence de presse, à 20 heures.
Le volet cinéma est également largement représenté dans cet événement puisqu'à part le film d'inauguration À l'origine de Xavier Giannoli, le théâtre Montaigne projette le mardi 18 mai Les amants réguliers. Un clin d'œil à Eric Rohmer avec Les amours d'Astrée et Céladon (le mardi 25 à 20 heures) et c'est enfin au tour de Monsieur Tati d'avoir son propre hommage au Métropolis Empire Sofil du 25 mai au 2 juin.
Ce programme sera clôturé le vendredi 4 juin avec une réflexion sur le thème «Les utopies existent-elles vraiment?» et ce n'est autre que le philosophe Michel Onfray qui assurera le débat; un dialogue avec l'audience qui sera retransmis en différé par la chaîne nationale de radio 96.2.
«Une carte du monde qui ne comporte pas l'Utopie ne vaut rien, même pas qu'on y jette un coup d'œil car elle néglige le seul pays auquel l'Humanité sans cesse aborde» , dit Oscar Wilde, qui poursuit plus loin que «le progrès est la réalisation des utopies».
Espoir et rêve sont donc les deux faces que tentera d'explorer ce quatrième volet de «Regards croisés», et cet espace rêvé, projeté à travers un prisme de visions différentes par toute l'équipe du CCF, ouvrira certainement quelques fenêtres et permettra à plusieurs axes de se ramifier. C'est pour mieux traduire cette liberté d'expression et cet imaginaire débridé et sans contraintes que le programme d'«Utopies» a été réalisé graphiquement par «PenguinCube» sous formes de cases blanches invitant chacun à créer son propre îlot d'utopie.