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Sport

Michel Joseph : « On exagère l’effet des tenues »

Directeur recherche et développement d'Arena depuis plus de 30 ans, Michel Joseph estime que les combinaisons révolutionnaires ne sont qu'un des nombreux facteurs qui expliquent l'avalanche de records du monde de natation enregistrés depuis 2008.

Q - Vous êtes fabricant de combinaisons et affirmez pourtant qu'elles ne sont pas aussi décisives que ce que l'on dit souvent. Vous voulez tuer la poule aux œufs d'or ?
R - « Parallèlement à l'arrivée des combinaisons, la natation a beaucoup évolué. Il y a des piscines plus rapides, c'est un fait reconnu, les méthodes et rythmes d'entraînement ont beaucoup changé. Tout ce qui est préparation est complètement différent, la musculation a évolué très vite... Phelps par exemple invente un nouveau style de nage avec un mouvement très spécial du bras et vient d'ailleurs de battre un record du monde (100 m papillon) avec seulement le short d'une combinaison, certes équipé de plaques. Bref, on ne peut pas tout mettre sur le dos des combinaisons. On en exagère l'effet. »

Q - Vous iriez jusqu'à dire qu'il est parfois psychologique ?
R - « Vous donnez une combinaison quelconque à un nageur, il a déjà un handicap mental. Souvenez-vous de Manaudou. Elle nous disait "Moi, je veux la combi à plaques, sinon je change de sponsor". Elle a changé pour Speedo et les plaques à l'occasion de Pékin, et vous voyez ce que ça a donné. Sa rivale, Pellegrini, a elle couru avec trois combinaisons l'une sur l'autre. C'est dans la tête et, psychologiquement cette surenchère est extrêmement mauvaise. »

Q - La combi comme un placebo.
R - « Non. Tout n'est pas dans la tête. Mais les combinaisons nivellent. Elles en ont aidé certains qui n'étaient pas de très bons nageurs. Aux championnats de France de Montpellier, certains ont gagné leur qualification en n'étant pas les meilleurs de leur catégorie, mais parce qu'ils avaient la combinaison. Avec elle, on gagne en glisse et on obtient une plus grande compression des muscles. La compression régulière empêche les mauvais mouvements comme la rotation du bassin. »

Q - Et la fameuse flottabilité, l'air-trapping, qui serait la principale qualité de la tout polyuréthane...
R - « Il n'y a pas autant d'effet flottabilité qu'on peut l'entendre. Vous vous rendez compte combien de newtons il faudrait pour maintenir un corps en flottaison ! En revanche, il y a un effet sur les muscles qui, comprimés, adoptent une position plus haute dans l'eau. »

Q - Que répondez-vous à ceux qui ne voient dans la surenchère qu'une affaire de gros sous entre marques ?
R - « C'est tout sauf ça. Ça nous a coûté très cher de développer trois combinaisons en un an (le modèle de base 2008, le modèle à plaques pour répondre à Speedo, le modèle tout polyuréthane pour répondre à Jaked, NDLR). »

Q - La FINA annonce un retour en arrière en 2010. Croyez-vous à un retour au slip de bain ?
R - « Non, je ne crois pas, mais il risque d'y avoir des règles strictes. Certaines fédérations ont édicté leurs propres règles appliquées pendant les compétitions nationales. En Australie, par exemple, on n'a rien en dessous du genou et les femmes ont le dos ouvert. Il faut refermer les portes que l'on a ouvertes, sinon demain on peut avoir n'importe quoi. »

Q - Il y a 35 ans, vous participiez à la conception du maillot de Mark Spitz, c'était déjà aussi compliqué ?
R - « Pour Mark Spitz, qui a signé chez Arena après ses 7 médailles des Jeux de Munich, on avait inventé pour la première fois un tissu en chaîne et trame, pas en maille, une matière hyperlégère qu'on a baptisée le Skin Fit. Son maillot restait invisible dans une main fermée. C'était la première matière technique. Depuis, la recherche a été incessante. »
Directeur recherche et développement d'Arena depuis plus de 30 ans, Michel Joseph estime que les combinaisons révolutionnaires ne sont qu'un des nombreux facteurs qui expliquent l'avalanche de records du monde de natation enregistrés depuis 2008.Q - Vous êtes fabricant de combinaisons et affirmez pourtant qu'elles ne sont pas aussi décisives que ce que...

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