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Mode - Les accessoires de mode sous l’Occupation, entre système D et politique

Exposition au Musée Jean Moulin

Turbans, chapeaux extravagants, chaussures à plate-forme, grands sacs à bandoulière : sous l'Occupation, les Parisiennes restent élégantes, mais leurs accessoires témoignent des difficultés de leur vie quotidienne et parfois de leurs convictions politiques.
Pour la première fois, une exposition leur est consacrée. Intitulée « Accessoires et objets, témoignages de vies de femmes à Paris 1940-1944 », elle se tient jusqu'au 15 novembre au Mémorial du maréchal Leclerc-Musée Jean Moulin, en association avec le Musée Galliera, musée de la mode de la ville de Paris.
Quelque quatre cents objets, presque tous inédits, plongent le visiteur dans la dureté de la vie durant cette période où le froid, la nourriture et les transports sont des préoccupations permanentes.
« Ces accessoires, c'est la dimension sociale et culturelle du Paris de ces années noires, sur fond d'absence de liberté, de restrictions », explique Christine Levisse-Touzé, directrice du mémorial-musée. Il y a « beaucoup d'inventivité, d'ingéniosité, de système D, d'ersatz ».
L'exposition insiste sur le contexte historique, avec des murs tapissés de grandes photos d'archives en noir et blanc et un film de propagande parcouru par un bandeau déroulant qui rappelle les événements dramatiques en cours, pour éviter toute ambiguïté.
Elle montre que, malgré tout, la mode garde ses droits, avec des objets créés par les grandes maisons ou fabriqués par les femmes elles-mêmes.
La présence de soldats français et alliés à Paris en 1939-40 se répercute sur les tendances. On note « une influence du costume militaire » et « l'écossais est à la mode », explique Marie-Laure Gutton, chargée d'études documentaires à Galliera. D'où ces bérets en lainage écossais, ces bijoux aux allures de décoration. Le tricolore bleu-blanc-rouge est aussi largement répandu, décliné en espadrilles de raphia, ou discret symbole d'une opposition patriotique sur des boutons.
Accessoire indispensable, le chapeau, petit bibi au début de l'Occupation, prend du volume au fil des années et finit par connaître « une surenchère de garniture », signe d'un « essoufflement de la créativité », explique Mme Gutton.
La mode s'adapte aux nouvelles conditions de vie, par exemple avec le turban : il tient chaud quand on circule à bicyclette et cache des cheveux qu'on ne peut plus entretenir aussi bien qu'auparavant.
Surtout, pénurie oblige, tout se récupère, de nouveaux matériaux sont utilisés et les femmes fabriquent souvent elles-mêmes leurs accessoires. « Avec 55 cm de drap, je fais ce sac », peut-on lire dans Marie-Claire en mars 1940. La maison Duvelleroy taille un sac dans un châle en cachemire ancien, une paire de bretelles en cuir se transforme en bandoulière pour un sac attribué à Jeanne Lanvin, Albouy propose des chapeaux en papier journal garnis de tulle, de rubans, de plumes, les semelles des chaussures se déclinent en bois, rhodoïd, liège, paille tressée.
Les accessoires présentés racontent une époque, mais aussi des histoires singulières, souvent tragiques. Comme ces chapeaux dessinés par Fanny Berger, alias Odette Fanny Bernstein, arrêtée en septembre 1942 et déportée en juillet 1943 à Auschwitz où elle meurt gazée.
Ils prennent parfois une dimension politique : on affiche son allégeance à la Révolution nationale du maréchal Pétain avec un foulard imprimé de son portrait, un carré Hermès célébrant « Le retour à la terre », une « broche francisque ».
Côté Résistance, les foulards s'impriment de cartes au millionième destinées aux agents alliés et les sacs se dotent d'un double fond.

Dominique SCHROEDER
Turbans, chapeaux extravagants, chaussures à plate-forme, grands sacs à bandoulière : sous l'Occupation, les Parisiennes restent élégantes, mais leurs accessoires témoignent des difficultés de leur vie quotidienne et parfois de leurs convictions politiques. Pour la première fois, une exposition leur est consacrée....

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