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Beyrouth : les enjeux d’une nécessaire réconciliation

Il ressort des discussions qui ont eu lieu au cours du week-end à Doha que la majorité – ou du moins le Courant du futur – propose, selon une version extrême donnée par la presse, le découpage de la capitale en trois circonscriptions, une dominée par les chrétiens non arméniens et deux à claire majorité sunnite. Elles sont réparties comme suit : Beyrouth 1 : Achrafieh, Rmeil, Saïfi. Fief du 14 Mars (principalement FL) s’il en est, cette circonscription comprend près de 25 000 inscrits grecs-orthodoxes, 21 000 Arméniens, 17 000 maronites, 13 000 grecs-catholiques, 11 000 chrétiens minoritaires et 2 000 protestants, soit quelque 89 000 chrétiens (dont 67 000 non-Arméniens) contre uniquement 8 000 musulmans, surtout sunnites. Beyrouth 2 : Medawar, Port, Zokak el-Blatt, Mina el-Hosn, Aïn el-Mreyssé et Ras Beyrouth. Dans cette circonscription hybride, la répartition est la suivante : près de 65 000 inscrits sunnites, 26 000 chiites et 2 500 druzes d’un côté, et de l’autre 37 000 Arméniens, 10 000 minoritaires (dont plus de 5 000 juifs toujours inscrits mais en quasi-totalité à l’étranger), 8 000 gr-orth, 6 500 maronites, 5 000 gr-cath et 4 500 protestants. Beyrouth 3 : Bachoura, Mazraa, Mousseitbé. Il s’agit d’un océan sunnite d’où émergent quelques minorités, dont les chiites (majoritaires à Bachoura) : près de 137 000 inscrits sunnites, 40 000 chiites et 2 500 druzes, ainsi que 11 500 gr-orth, 8 000 minoritaires, 3 000 maronites, 3 000 Arméniens, 2 000 gr-cath et 1 000 protestants. Il est clair que cette proposition, qui s’est heurtée à un refus catégorique du représentant arménien aux discussions de Doha, le député du Metn Hagop Pakradounian, relève de la première conception évoquée ci-dessus. Pourquoi ? Parce que le Courant du futur, fidèle à son alliance avec le Ramgavar arménien, rechigne à abandonner ses amis (les quatre députés arméniens actuels de Beyrouth) face au Tachnag, qui reste dominant au sein de la communauté arménienne. Il est clair que le problème se pose essentiellement dans la deuxième circonscription proposée, où le poids arménien que représente le quartier de Medawar est noyé dans une mer sunnite. Une variante de cette proposition consiste à retirer Ras Beyrouth de cette circonscription et d’y adjoindre Bachoura. Le cas échéant, on resterait dans la première conception et on l’aggraverait même, puisqu’on aurait alors créé un équilibre entre sunnites d’un côté et chiites-Arméniens de l’autre, comme si on voulait offrir une concession à l’opposition dans son ensemble et non au seul Tachnag. Si le 14 Mars opte pour la deuxième conception, il lui faudra alors consentir à des sacrifices, à Beyrouth comme ailleurs, par exemple dans le Metn et à Zahlé. Ces sacrifices pourraient certes apparaître cyniques aux yeux de certains. Mais si, en échange, on parvenait de cette manière à dissocier définitivement le Tachnag, Michel Murr, Élie Skaff et d’autres du giron du Hezbollah, le jeu n’en vaudrait-il pas la chandelle ? Ce qui était possible du temps de Rafic Hariri ne l’est plus aujourd’hui. Une réconciliation à Beyrouth entre le Courant du futur et le Tachnag (et plus généralement entre le 14 Mars et le Tachnag) s’impose si l’on veut donner à la révolution du Cèdre un avantage décisif face à la machine implacable du Hezbollah et même modérer quelque peu les ambitions personnelles du général Michel Aoun. Il faut aussi tout faire pour empêcher que le conflit réel, authentique et vif entre la culture du 14 Mars et celle du Parti de Dieu ne soit de plus en plus réduit à la dimension d’une querelle confessionnelle sunnito-chiite. Voilà pourquoi il est de l’intérêt du Courant du futur de contribuer à élargir et à renforcer autant que possible l’assise chrétienne de l’alliance. Bien entendu, cela ne signifie nullement qu’il faudra s’aplatir devant les exigences de l’opposition, prompte à reparler du projet de découpage de Sleimane Frangié, en 2005, qui avait taillé à Beyrouth une circonscription chiito-arménienne sans continuité géographique avec comme objectif sournois d’y « voler » pas moins de neuf sièges à Rafic Hariri. Ou bien du découpage prévu par le projet Boutros qui, en adjoignant Medawar à Achrafieh, Saïfi et Rmeil, replace la plupart des sièges chrétiens de Beyrouth à la merci du Tachnag, encore davantage que dans le Metn. Des solutions médianes existent. On pourrait par exemple diviser Beyrouth en quatre ou cinq circonscriptions : une à majorité chrétienne non arménienne (Achrafieh-Rmeil-Saïfi), une à dominante arménienne (Medawar-Port-Mina el-Hosn), deux majoritairement sunnites (Mazraa et Mousseitbé-Ras Beyrouth-Aïn el-Mreyssé) et éventuellement une à égalité sunnito-chiite (Bachoura-Zokak el-Blatt). Un autre cas de figure serait de maintenir trois circonscriptions dans la capitale, mais de détacher Medawar de Beyrouth et Bourj Hammoud du Metn et de les réunir en une seule unité électorale. Certes, cette circonscription serait à cheval entre deux mohafazats, ce qui constituerait une première au Liban. Les unités électorales et les divisions administratives n’ayant en principe rien à voir les unes avec les autres, cela ne devrait pas être impossible. En outre, cette unité ne serait pas aussi petite qu’on pourrait le croire, car elle compterait un nombre d’inscrits supérieur à celui de la circonscription de Bécharré, du Koura, du Batroun ou de Saïda. Enfin, si elle revêt un aspect méchamment confessionnel, elle ne diffère pas de ce point de vue de nombreuses autres circonscriptions du pays et aurait l’avantage de satisfaire beaucoup de monde : le Tachnag, car il serait « chez lui », autant que les chrétiens du 14 Mars à Beyrouth et dans le Metn, enfin libérés du « joug arménien ». E. F.
Il ressort des discussions qui ont eu lieu au cours du week-end à Doha que la majorité – ou du moins le Courant du futur – propose, selon une version extrême donnée par la presse, le découpage de la capitale en trois circonscriptions, une dominée par les chrétiens non arméniens et deux à claire majorité sunnite. Elles sont réparties comme suit :
Beyrouth 1 :...