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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - « Le malentendu » d’Albert Camus au Monnot Fuir, fuir, là-bas…

Une pièce sombre, tragique, oppressante, Le malentendu d’Albert Camus, adaptée, traduite en arabe sous le titre Souk Tafahom et mise en scène au petit théâtre de poche du Monnot par Lucien Abou Rejeily. Un univers étriqué et étouffant, où deux femmes criminelles, une mère et sa fille, dévalisent et tuent tous les pensionnaires qui ont le malheur de venir un soir dans leur auberge isolée en bord de mer… Avec des rêves de vie meilleure pour la fille, Martha, célibataire desséchée et acariâtre, et une grande lassitude pour la mère, lourde déjà par un âge avancé et taraudée par l’accumulation de tant de crimes innommables. Jusqu’au jour où, fatale rencontre et ironie du hasard, pointe un fils disparu depuis une éternité… Obscur pressentiment de la vieille et amère raideur de la sœur, qui persiste dans ses funestes et assassins plans meurtriers. Mort du jeune homme sans avoir eu le temps de décliner son identité, mais révélation de son passage grâce à un passeport égaré… Douleur et regret quand même de la mère, et glaçante indifférence de la fille, tandis que la femme de l’époux ne comprend rien à cette histoire de folles et entame une danse (absolument déplacée !) encore plus démente… Dans cette atmosphère lugubre de psychopathes, entre volonté de défense du féminisme, dénonciation du machisme et insipide quotidien d’une vie ratée, on retrouve les idées « camusiennes » de la prise de conscience de l’absurde de la condition humaine. À travers ces petits destins contrariés par la difficulté de vivre, un horizon bien bas et un pays morcelé et meurtri (c’est la libanisation de la pièce !), Le malentendu, dans cette production avec décor minimaliste et espace en corridor, reste ici une œuvre dramaturgique expérimentale pour jeunes acteurs (Sabine Ejeil, Maya Sebaali, Nazha Harb, Raffi Feghali et Lucien Abou Rejeily) perdus et maladroits devant un texte et des situations qui les dépassent… Prononciation et articulations inaudibles, jeu froid ou inutilement emphatique, mise en scène compassée (avec ces risibles passages de danse après des morts atroces !), tout cela fait de cette œuvre noire et grave une approche guindée et inefficace. Pourtant, Le malentendu de Camus fut admirablement exploité, dans une langue arabe impeccablement maîtrisée, par le couple Antoine et Latifé Moultaka, à l’âge d’or du théâtre libanais d’avant-guerre. Un vrai moment scénique, où les personnages interprétés avaient la force de tétaniser le spectateur et de le pétrifier devant tant de profonde noirceur dans la nature humaine et son pitoyable besoin de rêve et d’évasion… Une vraie leçon de dramaturgie qui aurait dû servir de référence aux jeunes d’aujourd’hui… Edgar DAVIDIAN
Une pièce sombre, tragique, oppressante, Le malentendu d’Albert Camus, adaptée, traduite en arabe sous le titre Souk Tafahom et mise en scène au petit théâtre de poche du Monnot par Lucien Abou Rejeily. Un univers étriqué et étouffant, où deux femmes criminelles, une mère et sa fille, dévalisent et tuent tous les pensionnaires qui ont le malheur de venir un soir dans leur...