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Actualités - CHRONOLOGIE

Société - Moscou compte 53 milliardaires, contre 19 en 2006 Les datchas de luxe, symbole de l’ultrarichesse russe

Les flèches d’un palais d’allure germanique tout droit sorti d’un conte de fées dominent un chantier boueux en périphérie de Moscou. Non loin de là, on aperçoit aussi une villa romaine et un manoir. Ces datchas opulentes sont du dernier chic à Moscou pour qui veut afficher sa réussite. À quelques mètres d’un village délabré dont la population se nourrit des produits de son jardin et manque d’eau courante, ces résidences secondaires illustrent de manière frappante le fossé grandissant entre riches et pauvres en Russie. « La Russie est aujourd’hui comme le reste du monde », se félicite Aras Agalarov, l’un des promoteurs immobiliers les plus ambitieux du pays, dont ce projet est le bébé. Agalarov a fait fortune en vendant des articles de luxe aux premiers « nouveaux riches », au début des années 1990. Il contrôle le centre commercial Crocus, haut de gamme, et organise chaque année une Foire aux millionnaires où sont présentés des produits qui leur sont destinés. « Dans d’autres pays, il y a des pauvres et des riches et maintenant, en Russie, nous avons aussi des pauvres et des riches », dit-il. Ces grandes demeures contrastent avec les datchas traditionnelles, petites maisons en bois nichées dans les forêts de bouleaux qui permettaient autrefois aux aristocrates et aux artistes russes de se retirer au vert, le week-end. Elles contrastent aussi avec les maisons de campagne au confort spartiate que possèdent les Russes vivant en ville. Le complexe d’Agalarov revendique 14 lacs artificiels, des milliers d’arbres plantés exprès, un terrain de golf, des hôtels et des terrains de sport. Chacune de ses 150 maisons peut coûter jusqu’à 30 millions de dollars. Énorme, entouré de murs, ce complexe écrase par son ambition et son coût les ensembles immobiliers du même acabit qui se multiplient autour de la capitale russe. De nombreux retraités vivent avec moins de 200 dollars par mois, soit le coût de l’un de ces beaux bouquets de fleurs régulièrement livrés à Moscou. Le revenu moyen officiel est de 500 dollars par mois, mais certains dépensent plus pour une bouteille de vin ou peuvent investir 777 000 dollars pour une limousine Maybach, l’un des signes extérieurs de richesse les plus prisés du moment. « Le fait est qu’il y a des revenus énormes et, en général, ceux qui étaient pauvres et touchent le jackpot sont tentés de dépenser, dépenser, dépenser », explique Chris Weafer, stratège en chef de la banque Ouralsib, à Moscou. « Nous devons nous rappeler qu’il y a seulement neuf ans ce pays était techniquement en faillite et au bord de l’abyme, or en neuf ans, on a assisté à une transformation basée sur 800 milliards de dollars de revenus du gaz et du pétrole. » Même si elle ne rivalise pas encore avec les États-Unis et l’Allemagne, la Russie compte 53 milliardaires, contre 19 en 2006, qui ont pour la plupart fait fortune dans le pétrole, les mines et les métaux, selon le magazine Forbes. D’après Forbes, Roman Abramovich est le plus riche, avec une fortune de 18,7 milliards de dollars dans le pétrole, l’acier, et le club de football anglais de Chelsea, ancien champion de la Premier League. Agalarov pense que les nouveaux riches russes n’hésiteront pas à dépenser beaucoup pour se côtoyer au golf ou bavarder d’un jardin à l’autre, entre soi. « Il y aura tellement d’acheteurs potentiels qu’il sera difficile de décider à qui je devrais vendre et à qui je ne devrais pas », dit-il. « Nous voulons faire en sorte que des gens normaux vivent ici, donc les gardes du corps ne seront pas autorisés à vivre avec les familles. Cela gâcherait l’atmosphère. » Le complexe comptera environ 150 maisons dont le prix commencera à deux millions de dollars. Agalarov estime à un milliard de dollars le coût de la construction et le prix de vente total à trois milliards, soit une marge assez confortable. Les maisons auront des sols en marbre et des cuisines souterraines, pour les domestiques. Dans le village voisin de Voronino, Natalia Andreïevna, 60 ans, tire son eau d’un puits creusé dans son jardin. La plupart des maisons sont petites, délabrées, et un bon coup de peinture serait nécessaire sur les encadrements de portes en bois. « Cela commence à ressembler à une prison ici », dit-elle. Elle vit au village la majeure partie de l’année, mais elle passe généralement l’hiver avec sa fille à Moscou. « Avant je pouvais marcher dans la forêt, maintenant ce n’est plus possible. Ils ont des vigiles là-bas et ils ne laissent personne passer. » Sa voisine se préoccupe peu, quant à elle, de savoir comment vivent les autres. « Je me fiche de ce qui se passe là-bas. Je n’ai pas le droit d’entrer », explique Galina Ivanovna, 70 ans, qui rassemble ses chèvres. « Je ne pense pas grand-chose des riches. Je suis occupée à survivre. »
Les flèches d’un palais d’allure germanique tout droit sorti d’un conte de fées dominent un chantier boueux en périphérie de Moscou. Non loin de là, on aperçoit aussi une villa romaine et un manoir. Ces datchas opulentes sont du dernier chic à Moscou pour qui veut afficher sa réussite.
À quelques mètres d’un village délabré dont la population se nourrit des...