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Actualités - OPINION

Les réactions à l’émission de France 2 « Liban, pays des esclaves »

La leçon à retenir Tous les soirs ou presque, aux nouvelles des chaînes françaises, il est question de rapt d’enfants, de pédophilie, d’agressions sexuelles sur enfants. Verrions-nous nos journaux titrer : La France pays des pédophiles ou La France pédophile ? Les histoires relatées dans le reportage sont malheureusement vraies et réelles dans beaucoup de foyers. Certains bureaux de placement sont des tortionnaires, tout autant que certains employeurs. Notre législation est primaire et notre attitude souvent raciste. Le scandale commence d’abord par cette fameuse législation qui octroie (moyennant corruption parce que très juteuse) des permis d’« importation » de main-d’œuvre étrangère, chaque ministre favorisant sa clientèle sans contrôle de la moralité du bénéficiaire ou du bon usage du permis. De plus, le laxisme des ambassades des pays d’origine les rend tout aussi complices de ces mauvais traitements. Que chaque femme se rappelle comment elle a accueilli à l’aéroport la jeune fille promise, parquée pendant des heures avec une dizaine d’autres jeunes filles dans un cagibi rappelant plus une chambre de quarantaine qu’un hall d’aéroport. Imaginez nos protestations si nos jeunes enfants, la prunelle de nos yeux, partis faire leur avenir à l’étranger, étaient reçus ainsi aux États-Unis, en Europe, au Canada, en Australie ou dans les pays du Golfe. Œuvrons chacun à sa manière à endiguer cette marginalisation, en commençant chez nous par faire attention aux petits détails qui soulageraient la vie quotidienne de ces jeunes filles. Aurions-nous le courage et la force physique d’effectuer leurs tâches, si elles venaient à nous quitter ? Rappelons-nous notre désarroi quand elles s’en vont pour des vacances ou quand leur contrat vient à expiration. Le respect de l’autre est l’essence de nos religions déistes. En nous libérant des tâches ménagères fastidieuses et ingrates, ces jeunes filles méritent toute notre affection et surtout notre respect. Et n’oublions jamais que nous partageons avec elles la mission de nous occuper du plus précieux de nos biens : nos enfants. Traitons-les comme nous souhaiterions qu’elles traitent nos enfants. De ce reportage, c’est la seule leçon à retenir. Jamale RASSI Ne pas trop s’en faire Il ne faut pas trop s’en faire en ce qui concerne l’opinion de ceux qui réagissent violemment contre le Liban sur un blog consacré à cette affaire, car ces personnes ne voient pas plus loin que le bout de leur nez et ne savent même pas où, ni comment bien s’informer. Leur opinion ne pèse vraiment pas lourd. Si seulement on pouvait leur adresser par exemple la réaction de Mme Liliane Masri (L’Orient-Le Jour du mardi 23 octobre 2007), ils se sentiraient tellement petits ! Richard G. KHALIFÉ Le dernier recours J’ai lu avec beaucoup d’intérêt les différentes réponses des lecteurs à propos du reportage d’Envoyé spécial et de l’article du Monde sur les employées de maison au Liban. Je dois avouer que j’ai été plutôt surpris de la réaction de certaines personnes face à un problème qui existe quand même depuis plusieurs dizaines d’années. Il est inacceptable qu’on refuse de regarder la vérité en face et qu’on s’indigne quand un étranger met le doigt sur la plaie, quand on a été des années plus que complaisant. Ayant quitté le Liban il y a plus de dix-huit ans, je connais beaucoup de cas similaires dont j’ai été témoin dans le passé et qui continuent à être traités de la même façon. De plus, une expérience personnelle avec un collègue de travail français en Égypte m’a définitivement convaincu que l’esclavagisme existe chez nombre de mes compatriotes. En effet, ce collègue a reçu un beau jour la visite de l’employée de maison étrangère de son voisin libanais qui a demandé tout simplement « l’asile ». Elle était maigre et disait qu’il lui était interdit de manger, de téléphoner et qu’elle travaillait de 6h à 23h et ne pouvait évidemment pas sortir. Pris de compassion et ne voulant pas tout de suite faire appel à la police, mon collègue demande au voisin libanais des éclaircissements. Quelle ne fut sa surprise de se voir répondre que cela ne le concernait pas et que « de toute manière, il l’avait achetée et pouvait donc en faire ce qu’il voulait » (textuel). La police est intervenue, l’employeur libanais a comparu devant la justice et a été obligé de quitter le pays avec son employée. Il est grand temps que l’on appelle un chat un chat. Évidemment, je ne jette pas la pierre à tous mes compatriotes qui ont des employées de maison et la plupart traitent les leurs de manière convenable. Mais quand il y a une minorité non négligeable qui se permet de ternir l’image de tout un peuple, il est grand temps d’agir, et l’article et le reportage, d’où qu’ils viennent, sont peut-être le dernier recours pour faire ouvrir les yeux à ceux qui ne veulent pas voir. Chahine NOUJEIM Une lettre de l’ULCM Quarante-huit heures avant la diffusion de l’émission d’Envoyé spécial, l’Union libanaise culturelle mondiale (ULCM) tirait la sonnette d’alarme auprès de l’autorité de tutelle en France et le télégramme suivant était adressé à France 2, dont copie était envoyée à la presse locale. « À l’aimable attention de Mme Guilaine Chenu – copie à Mme Arlette Chabot. « Nous avons lu avec la plus grande attention l’article paru dans Le Monde du 11 octobre 2007 sur le Liban, préparé dans le cadre de votre émission d’Envoyé spécial. Si l’on peut être légitimement choqué par les agissements de certains employeurs de jeunes étrangères au Liban, il est inacceptable d’y inclure tout le Liban et tous les Libanais et de juger que le Liban pratique l’esclavage. Nous vous proposons de tirer les choses au clair sur le sujet par le biais d’un jugement, qui serait porté par des personnes de notoriété reconnue et dont les analyses font autorité auprès de la presse, tel que M. Antoine Sfeir. » Antoine MENASSA Vice-président de l’Union libanaise culturelle mondiale NB – Suite à notre intervention et à deux entretiens, la veille, avec France 2, Mme Guilaine Chenu n’a pas souhaité, le matin de l’émission, la présence de M. Antoine Sfeir, ni de tout autre journaliste libanais aux côtés de Torrès, et ce afin d’éviter un débat qu’elle ne jugeait pas lieu d’être. Remettre l’ouvrage sur le métier Je te nommerai esclavagiste et je prendrai sur toi tous les droits de mon métier de journaliste. Les esclavagistes, je les vomis. Libanais soient-ils ou autres. Un « peuple esclavagiste », c’est vrai, vous n’avez jamais prononcé cette expression, mais votre reportage pousse à le croire. C’est là que le bât blesse. Entre ce que vous montrez, ce que vous dites et l’objectivité du journaliste – j’entends par là le farouche respect de l’éthique journalistique –, la réalité historique, sociale et humaine du Liban sort abusée. En effet, vos propos seraient outrageants à l’égard de toute une nation quand bien même elle eut compté parmi ses familles des esclavagistes, libanais ou autres. Et j’en connais. Vous comprenez qu’il est insupportable qu’un travail journalistique soit sombre. Un journaliste travaille pour éclairer. Combien j’aurais souhaité ranger ce reportage sous la rubrique « efficace », car objectif et défenseur des libertés. Nabil W. HOBEIKA Soyez indulgent Je dois dire qu’en tant que française adoptée par le Liban, ce qui m’avait choqué lors de mon premier séjour au Liban c’est le cas de la domesticité. Il faut dire qu’en France une telle notion appartient à un autre temps ou à une classe sociale, très privilégiée. En bonne trentenaire, fille de soixante-huitards qui se respectent, ce phénomène m’était complètement étranger. C’est pourquoi j’étais choquée, car je découvrais un pays très brillant à tous les points de vue : littéraire politique (de par le contexte géopolitique), artistique, et je voyais ces femmes et hommes tous étrangers placés et classés dans une seule fonction : domestique. Ce reportage n’est pas faux, le « problème » existe bel et bien, mais est-ce vraiment un problème ? Le problème du Liban dans son entier : là est l’amalgame et là est l’erreur ! Car comme l’ont déjà dit d’autres lecteurs, tous les Libanais sont logés à la même enseigne. Malheureusement ! Le salaire moyen est aussi bas que celui des « bonnes ». Certains n’en ont même pas autant et, si la solidarité familiale n’existait pas, ces gens-là seraient dans la rue moins bien logés encore. Le Liban doit régler beaucoup de chose et le monde est trop pressé. Bien sûr il faut respecter les droits de l’homme, mais le Liban n’est pas encore maître de ça ; il n’est pas libre et lui-même n’est-il pas sous tutelle ? La liberté, ah oui la liberté ! Nous la cherchons tous d’ailleurs. Certains viennent au Liban pour la trouver, préférant y être « esclaves » plutôt que d’être rien dans leur propre pays. C’est là qu’il faut intervenir, leur permettre de travailler dans de bonnes conditions. Mais tout ne se règle pas avec un article. La colère peut être un moteur pour dénoncer, mais elle est mauvaise conseillère quand elle ne prend pas en compte la globalité. Il est bien plus grave de savoir qu’en France, tout cela existe et parfois dans les mêmes conditions, mais la France a des lois (quoique…). Le Liban est un pays démocratiquement jeune. Alors soyez indulgent ! Muriel BOULOS
La leçon à retenir


Tous les soirs ou presque, aux nouvelles des chaînes françaises, il est question de rapt d’enfants, de pédophilie, d’agressions sexuelles sur enfants. Verrions-nous nos journaux titrer : La France pays des pédophiles ou La France pédophile ? Les histoires relatées dans le reportage sont malheureusement vraies et réelles dans beaucoup de foyers....