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Actualités

Le Liban, cette mosaïque…

La lecture de l’actualité libanaise me met souvent en colère. Elle me fait tantôt m’arracher les cheveux, tantôt elle déclenche en moi un rire nerveux difficile à contrôler. Je vous rassure tout de suite, les moments de franche rigolade sont quasi inexistants. L’actualité des derniers jours, cependant, ne m’a pas mis en colère. Elle ne m’a pas du tout fait rire. Elle m’a simplement donné la nausée. Une agence non gouvernementale, Human Rights Watch, est montrée du doigt suite à un rapport défavorable sur la conduite du Hezbollah durant la guerre de l’été 2006. Jusqu’ici, tout va bien. On peut accuser une organisation, quelle qu’elle soit, de partialité, si les faits sont avérés. Il se trouve cependant que cette même organisation a publié un rapport autrement plus accablant sur la conduite de l’armée israélienne au cour de cette même guerre. Inutile de rappeler ici les pertes humaines, les destructions massives et l’exode de toute une population, nous en portons encore les stigmates dans notre chair et dans notre cœur. Mais il faut croire que l’impartialité ne suffit pas au Hezbollah. Le Parti de Dieu a besoin de dévots, d’admirateurs et de zélotes. Tout le reste est inutile. Passe encore de traiter les membres de cette organisation d’« agents du sionisme ». C’est une appellation tellement commode qu’on ne peut pas la leur reprocher. Passe encore que le gouvernement lui-même prenne fait et cause pour le Hezbollah, dans une mystérieuse cuisine interne dont lui seul a le secret, ou peut-être dans un syndrome de Stockholm revendiqué et entretenu. Même quand HRW déclare « traiter le Hezbollah comme tout autre gouvernement... », nous ouvrons grands les yeux, mais nous ne sommes plus à ça près. On pourrait croire que tous les moyens sont bons pour rectifier le tir, dans un monde où la bataille des ondes et de l’opinion est au moins aussi importante que la bataille sur le terrain, ce qui est sans doute vrai. Mais le Hezbollah s’est empressé d’utiliser la seule arme vraiment moralement prohibée et qui risque de se retourner contre lui : l’antisémitisme. Je cite : « D’ailleurs, HRW compte parmi ses membres de nombreux juifs qui peuvent être sous l’emprise du sionisme... ». Fort heureusement, l’auteur de ces lignes nous rassure en rajoutant : « Le respect du judaïsme est une obligation que j’observe. » Avouez que les juifs l’ont échappé belle ! Naturellement, fait aggravant dans toute cette histoire, l’un des membres de HRW s’appelle Goldstein. Franchement, a-t-on idée de s’appeler Goldstein ? Tout cela a commencé il y a bien longtemps. « Une minorité agissante, que l’on ne saurait confondre avec les fidèles de la vénérable religion juive... ». Posons-nous clairement la question : est-ce que tout est permis, dans les moyens et dans les objectifs, dans la lutte légitime contre l’État d’Israël ? Répondre par la positive, selon Edward Saïd, « c’est une preuve de méconnaissance fondamentale de l’histoire du monde dans lequel nous vivons, un signe d’incompétence et d’échec à mener une bataille digne ». Parce que oui, l’antisémitisme a une longue histoire, douloureuse et tragique. Prétendre l’ignorer sous prétexte qu’elle s’est déroulée sous d’autres cieux est une manière stupide de se décrocher du monde. Le point culminant de l’antisémitisme européen, la destruction des juifs d’Europe, selon le titre de Hillberg, n’est pas un crime européen contre les juifs, c’est un crime de l’humanité contre elle-même. Ne pas tenir compte de la « singularité » d’Auschwitz, l’ignorer, ou pire encore, la nier en grande pompe, comme cela a récemment été le cas à Téhéran, est une insulte à l’humanité tout entière. Naturellement, cette lourde histoire ne doit nullement nous empêcher de combattre dignement l’État d’Israël dans sa forme actuelle, et surtout le sionisme triomphant de Jabotinsky, devenu son idéologie dominante. Elle ne doit pas non plus nous dispenser d’un droit de critique sur certaines exagérations, comme celle d’un Elie Wiesel : « Il y a un État, et il est différent de tous les autres. Il est juif, et pour cela il est plus humain que n’importe quel autre », sans qu’une main charitable lui foute une tarte à la crème dans la figure. Je voudrais enfin rappeler qu’il y a, qu’il y avait au Liban une communauté juive, qui n’a jamais démérité, qui a été dispersée au gré des événements aux quatre coins de la planète, de moins en moins ronde, que le Liban est une mosaïque, et dans une mosaïque, tous les carreaux, si petits soient-ils, sont indispensables. Sacha ABOUKHALIL Chirurgien-dentiste
La lecture de l’actualité libanaise me met souvent en colère. Elle me fait tantôt m’arracher les cheveux, tantôt elle déclenche en moi un rire nerveux difficile à contrôler.
Je vous rassure tout de suite, les moments de franche rigolade sont quasi inexistants.
L’actualité des derniers jours, cependant, ne m’a pas mis en colère. Elle ne m’a pas du tout fait rire....