Hommages et drapeaux noirs

Son état de santé s’était détérioré depuis un an, mais l’annonce du décès de l’imposant ténor à la barbe noire, surnommé « Big Luciano », a suscité une grande émotion. Artistes, imprésarios, critiques, mais aussi des fans qui pouvaient à peine s’offrir des places pour assister à ses prestations, ont exprimé leur grande tristesse. – « Il est l’un des rares artistes à avoir touché la vie des gens de tous milieux à travers le monde », souligne dans un communiqué le Royal Opera House de Covent Garden, à Londres. « À travers les nombreuses émissions auxquelles il a participé, ses enregistrements et ses concerts, il a fait connaître l’extraordinaire puissance de l’opéra à des gens qui peut-être n’auraient jamais connu l’opéra ou le chant classique. En faisant cela, il a enrichi leurs vies », poursuit le communiqué de Covent Garden. – L’opéra de Vienne a hissé hier matin le drapeau noir, tandis que le directeur de l’opéra, Ioan Holender, déplorait le départ de « la plus belle voix de ténor » de notre temps. C’est un honneur inhabituel, réservé en temps normal aux membres honoraires, que la prestigieuse salle d’opéra a choisi de rendre à Pavarotti, qui y avait donné plusieurs représentations. Pour Holender, qui avait travaillé avec l’artiste, ce décès représente « la perte de la plus belle voix de ténor de notre temps, ainsi que celle d’un homme qui, par son art, avait la capacité de toucher les gens de manière extraordinaire et de donner énormément à son public ». – La directrice du Festival de Salzbourg, où Pavarotti avait chanté de nombreuses fois, a elle aussi parlé d’une perte majeure. « Pavarotti était l’un de ces artistes exceptionnels qui, dès la première note, peuvent envoûter le public et la presse », a déclaré Rabl-Stadler. Le palais du Festival de Salzbourg a également hissé un drapeau noir. De son côté, le chancelier autrichien Alfred Gusenbauer a déploré la mort d’un homme qu’il a décrit comme « le chanteur le plus important du XXe siècle ». – Le ténor espagnol José Carreras a salué en Luciano Pavarotti un des plus grands chanteurs d’opéra, un ami sûr, un fin cuisinier et un excellent joueur de poker. « Les meilleurs souvenirs sont ceux de l’intimité. Il avait une personnalité très amusante, a déclaré Carreras au journal suédois Expressen depuis Karlstad dans le centre de la Suède où il avait donné un concert la veille. « Nous devons nous souvenir de lui comme le grand artiste qu’il était, un homme avec un extraordinaire charisme », a ajouté Carreras qui avait formé avec Pavarotti et Placido Domingo le plus célèbre trio de l’histoire de l’opéra, les Trois Ténors. « Il était aussi accompli dans le domaine gastronomique qu’il aimait tant. Il était un très bon ami pour ses amis et un grand joueur de poker », a encore dit José Carreras. – Le ténor espagnol Placido Domingo, qui avait chanté aux côtés de Pavarotti et de José Carreras dans le cadre de la tournée des Trois Ténors retient, pour sa part, « sa voix divine » et son sens de l’humour. « J’ai toujours admiré la gloire divine de sa voix – ce timbre spécial reconnaissable entre tous dans tout le registre du ténor », a déclaré Domingo. – « Il y avait des ténors, et puis il y a eu Pavarotti », a souligné le réalisateur italien Franco Zeffirelli. « Il adorait la musique avec un sens aigu de la fête totale (...) Son plus grand mérite est d’avoir abordé la musique dans sa globalité, de la chansonnette au lyrique en passant par l’opérette », a déclaré Zeffirelli, qui a mis en scène de nombreux opéras. « C’est grâce à Luciano Pavarotti que la culture de l’opéra a pénétré les nouvelles générations comme si elle n’était pas différente des autres », a ajouté le cinéaste qui a travaillé à plusieurs reprises avec le chanteur. – La célèbre soprano italienne Mirella Freni a confié avoir perdu « un grand ami » en la personne de Luciano Pavarotti. « Nous avons perdu un grand ténor, un grand chanteur, mais moi j’ai perdu un grand ami », a-t-elle déclaré. – Le chef du gouvernement italien Romano Prodi a déploré « la disparition d’une très grande voix de la musique et de l’Italie ». Luciano Pavarotti « a porté à travers le monde l’image artistique la plus authentique de notre pays, suscitant des émotions et réveillant les passions », a ajouté le leader italien. – « Un géant du XXe siècle », a estimé le ministre italien de la culture Francesco Rutelli, dans un communiqué. « Luciano Pavarotti a été un géant du XXe siècle. Aujourd’hui, il laisse un vide impossible à combler pour tous les passionnés de grande musique italienne », a déclaré le ministre. « Sa puissance vocale imposante et sans pareil, ainsi que sa présence scénique ont fait de lui un des principaux protagonistes de la prestigieuse tradition italienne de l’opéra », a ajouté Rutelli, estimant que le ténor « a été et restera un mythe pour des générations ». – « Pavarotti a été un ambassadeur de notre musique, de notre culture et de nos traditions », a estimé pour sa part Silvio Berlusconi, l’ancien chef de gouvernement italien. « Sa voix restera la colonne sonore d’une époque, une émotion unique, la plus chaude voix de l’Italie dans le monde », a-t-il conclu. – « C’est un triste jour pour la culture de l’opéra en Europe », a déploré le président de la Commission européenne José Manuel Barroso. Luciano Pavarotti « a déployé la bannière de la musique européenne dans le monde entier. Sa disparition prive le monde, l’opéra et la culture européenne de l’un de ses artistes les plus aimés et respectés », a-t-il ajouté, en rendant hommage à son « talent exceptionnel » et à son « engagement social ». – Le groupe d’édition italien Poligrafici a annoncé hier une édition spéciale et gratuite de ses quotidiens – QN, Resto del Carlino, La Nazione, Il Giorno – consacrée au décès du grand ténor. – En Bulgarie, la radio nationale a annoncé qu’elle diffuserait des arias de Pavarotti tout au long de la journée.