MOMENTS INSOLITES - Toilettage pour chiens, un métier mais surtout une vocation Une belle vie de chien ! Carla HENOUD

Certains se la coulent douce… Réveil tranquille, délicieuse potée, balade dans les beaux quartiers de la ville, rencontre avec les copains, dodo. Et puis, de temps et temps, une séance toilettage bien méritée. Shampooing, coupe, brushing, pédicure. Quelle belle vie de chien ! Ramsey Khattar est un grand et sincère ami des bêtes, et surtout des chiens. Il suffit de le voir, patiemment, leur prodiguer des « soins beauté », qui sont aussi quelque part des soins santé, pour le constater. Dans sa maison située loin de la ville, le jeune homme est zen. Toujours un peu baba-cool, il affiche l’allure détendue d’un soixante-huitard nostalgique du temps où on faisait l’amour plus que la guerre. C’est en maillot et marcel, « vous comprendrez plus tard pourquoi », précise-t-il en souriant, tatouage au bras et tablier de pro qu’il travaille, dans une salle spécialement aménagée pour cette tâche ardue. Une musique jazzy flotte dans l’air. Des percussions, installées dans la pièce attenante, sont un indice de plus qui définissent le style et la façon d’être de ce figaro particulier. « J’ai une formation d’analyste programmeur », souligne-t-il. Mais son amour pour les bêtes et cette activité en particulier l’ont amené, presque naturellement, à en faire un métier. « J’avais 18 ans quand j’ai commencé à faire des coupes à mon premier chien. Même le vétérinaire aimait mon travail ! » Durant les années où il vécut en France, stimulé par un « toiletteur » voisin qu’il observait tous les jours à la tâche, il décide de prendre des cours et de suivre des stages. De retour au pays, il démarre auprès de nombreux vétérinaires avant de s’y mettre en solo. Travaux pratiques Caramel, un Pomeranian de 10 mois, est arrivé depuis une demi-heure. Sa maîtresse, inquiète, car c’est le premier toilettage de son chien chéri au poil long, attend à l’extérieur. « Le travail est délicat, explique Ramsay, tout en procédant à la précoupe. Il faut apprivoiser les chiens, les rassurer. Souvent, même des chiens de salon arrivent avec des clous ou des morceaux de vitre entre les pattes, sans que leur propriétaire n’aient remarqué quoi que ce soit », poursuit-il, révolté par certaines dangereuses négligences. Caramel, lui, est calme. « Tu es bien ? » lui demande Ramsey. Sans doute préfère-t-il l’ambiance sereine des lieux, cette atmosphère ouatée, aux cliniques vétérinaires qui lui inspirent des souvenirs plus angoissants. Installé sur une table pivotante, il observe cet homme calme et appliqué le coiffer, tout en lui chuchotant des mots doux. Il se laisse faire. Brosses, peignes, rasoirs et autres séchoirs sont à portée de main. « Ne fais pas cette tête ! » alors que Caramel, 45 minutes plus tard, n’est déjà plus le même chien ! « J’aime ce travail, souligne Ramsey, parce qu’il est également artistique. C’est exactement comme un coiffeur pour hommes et femmes, il faut réussir une belle coupe. Mais c’est plus difficile, c’est un travail de deux heures sans anesthésie ! » Coupe du lion, coupe pantalon ou coupe moderne sont les plus demandées par des maîtres fashion-victims… Deuxième étape, le shampooing, pour chien à poil blanc, dur, antipuce ou avec démêlant, a lieu dans un évier spécialement aménagé pour lui. « Et voilà, secoue ta tête ! » Recoiffage, Caramel, qui regarde les oiseaux curieux défiler devant la fenêtre, peut à présent passer au brushing. Tout y passe, les pattes, le buste, les oreilles, le dos. « Le plus dur, confesse Ramsay, c’est le finissage. Mettre l’ensemble du poil en proportion, dans une forme et des couleurs harmonieuses. Je laisse la tête pour la fin, le chien sent alors que nous avons fini. Je comprends que certaines personnes mettent du temps à aimer la coupe, parfois le changement, momentané, est radical, car je dois raser le poil qui est dans un très mauvais état. Mais ils reviennent tous, et c’est l’essentiel. Je peux faire ce que je veux, des pompons aux pattes, une crinière de lion. Je laisse toujours ma signature », conclut-il, avant de rendre un Caramel métamorphosé à sa maîtresse étonnée…