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Actualités - OPINION

Je demande le divorce !

Je dis blanc, « ils » disent noir. Je dis oui, « ils » disent non. Je dis ceci est illégal, « ils » rétorquent que c’est bien plutôt cela qui l’est… Et j’en passe. En clair, nous ne sommes d’accord sur rien. Le fossé qui sépare les Libanais des deux bords est si profond qu’il me semble infranchissable. Ce qui me semble être une évidence n’est pour l’autre bord que machination américano-euro-machiavélique. Pour moi, il n’y a pas de doute possible ni permis quant aux responsables de l’assassinat de Rafic Hariri, de Bassel Fleyhane, de Georges Haoui, de Gebran Tuéni, de Samir Kassir, de Pierre Gemayel, de Walid Eido. Le doute est aussi interdit quant aux assassins des bus de Aïn Alak, aux poseurs de bombes nocturnes, ou aux instigateurs des événements de Nahr el-Bared. J’interdis aussi de perdre la mémoire en ce qui concerne l’assassinat de Béchir Gemayel ou de René Moawad, pour ne citer qu’eux, ainsi qu’en ce qui concerne le simulacre de procès et l’emprisonnement de Samir Geagea. Je ne pardonne pas qu’on oublie les tortures du Beau Rivage ou qu’on gomme de la mémoire collective des Libanais toutes les autres atrocités, physiques ou morales, que nous avons dû subir trente ans durant. Je ne peux excuser ni justifier que certains pôles, jadis déclencheurs d’une guerre de libération, se transforment aujourd’hui, et contre toute logique, en défenseurs, voire en alliés de ce même bourreau. Je réclame et acclame le tribunal international, « ils » crient au scandale, à l’ingérence étrangère, à la machination. Cerise sur le gâteau : je suis scandalisée par le comportement des hommes du Hezbollah, qui s’érigent en maîtres absolus du sacro-saint « périmètre de sécurité » de la banlieue sud et, depuis six mois, de la moitié des places du centre-ville. J’ai un haut-le-cœur en apprenant que des agents de l’ordre, en uniforme, ont été fouillés, dépouillés de leurs armes et, comble de l’impertinence, questionnés ! Il s’en est trouvé pour dire qu’on n’avait qu’à ne pas aller les provoquer ! On aura tout vu. Je ne comprends déjà pas comment le gouvernement accepte, ferme les yeux, sur le comportement de toute une tranche de la population libanaise, sous prétexte que certains de ses membres font de la résistance. Mais accepter en plus qu’ils s’approprient impunément des terrains, qu’ils squattent un centre-ville en agonie… Je n’arrive pas à comprendre : suis-je la seule qui voit l’immensité du gouffre qui nous sépare ? Suis-je la seule à m’offusquer de la nécessité d’un laisser-passer, véritable visa, pour accéder aux régions hezbollahies ? Suis-je la seule à me dire que notre armée saurait toute seule défendre le Liban, sans avoir besoin de miliciens armés en plus, si seulement « on » voulait bien lui en laisser les moyens ? Suis-je la seule à penser que la présence d’une « résistance » armée humilie notre armée et minimise sa crédibilité ? Je ne suis certes pas la seule, mais il faut bien reconnaître que mon avis n’est pas unanimement apprécié. Nous aurons essayé, à coups de « dialogue », de médiations en tout genre, parfois à coups tout court, de ramener les autres à ce que nous pensons être la seule vérité acceptable. Force est de constater que nous n’avons pas réussi : pis, nous ne réussirons jamais. Alors, que faire ? Il faut bien qu’un camp l’emporte. Ça ne peut pas être blanc et noir. Retourner au temps de l’hégémonie de notre chère voisine ? Aller de l’avant avec la révolution du Cèdre, en écrasant au passage les volontés réelles de certains Libanais ? Pour moi, la solution est simple et elle ne doit plus être considérée comme un tabou : quand un couple ne fonctionne pas, il faut bien qu’il se sépare. Quand la sauce ne prend pas et que l’on ne partage plus les mêmes idées ni les mêmes idéaux et que toute démarche ordinaire de la vie quotidienne devient pénible, il est peut-être temps de prendre la décision qu’il faut : le divorce. Joumana Debs NAHAS
Je dis blanc, « ils » disent noir. Je dis oui, « ils » disent non. Je dis ceci est illégal, « ils » rétorquent que c’est bien plutôt cela qui l’est… Et j’en passe. En clair, nous ne sommes d’accord sur rien. Le fossé qui sépare les Libanais des deux bords est si profond qu’il me semble
infranchissable.
Ce qui me semble être une évidence n’est pour...