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Parution - « Communiste dans le monde arabe », de Karim Mroué et Samir Amin Déboires et naufrage d’un « espoir démocratique »

En librairie depuis quelques semaines, un ouvrage de Karim Mroué et de Samir Amin, Communiste dans le monde arabe. Issu d’une famille de dignitaires religieux du Liban-Sud, Karim Mroué a été secrétaire général adjoint du Parti communiste libanais (PCL), avant de s’occuper de la revue al-Tariq, tandis que Samir Amin, un Égyptien, est un économiste président du Forum du tiers-monde. Leur ouvrage est une réflexion sur la guerre du Liban aussi bien que sur l’histoire des partis communistes arabes. Ils y réfléchissent à l’état du monde après la chute de l’URSS et le 11-Septembre, et, à partir de leurs expériences singulières, à l’histoire des mouvements communistes dans l’ensemble du monde arabe. Ces réflexions et ces interrogations aspirent à refonder « un espoir démocratique » dans cette partie du monde. L’ouvrage, paru chez un petit éditeur français (Le temps des cerises), offre l’avantage de fournir au lecteur francophone des informations utiles sur la fondation du PCL en 1924 par quelques intellectuels influencés par les idées de la révolution d’Octobre (1917) et son développement. Marxiste convaincu, Karim Mroué n’hésite pas à relever que la première raison de la crise du communisme en général, à laquelle participent les partis communistes arabes, c’est Lénine qui en assume la responsabilité « dans le choix de la Russie comme premier terrain d’expérimentation du projet socialiste de Marx ». Lénine a voulu changer le monde, alors que les « conditions objectives » de ce changement, de nature essentiellement économique, n’étaient pas réunies. Et certes, comment réaliser l’avènement de la dictature du prolétariat, dans un pays où l’industrie est encore naissante ? Mroué relève aussi les différentes étapes par lesquelles le PCL est passé pour se libérer du dogmatisme soviétique et retrouver le marxisme tel que pensé par Marx, et non tel que schématisé par la révolution d’Octobre, qui a tenté de plaquer aveuglément ce schéma sur toutes sortes de situations historiques. Pour ne citer qu’un petit exemple : le refus de Moscou d’autoriser le parti, qui souhaite s’appeler Parti du peuple, à changer de nom. Un exemple qui illustre la rigidité mortelle du système soviétique, aussi bien politique qu’idéologique. Après le vote par l’ONU du partage de la Palestine en 1948, avec l’accord de Moscou, les partis communistes figureront parmi les premières victimes des dictatures militaires qui s’installeront dans le monde arabe dans la seconde moitié du XXe siècle, et dont ils croiront naïvement être les « alliés objectifs », dans le projet de changement global. Localement, c’est aussi une grande erreur historique que le PCL commettra, reconnaît Karim Mroué, quand il s’engagera dans la guerre civile libanaise, en croyant qu’elle constituait « la voie pour changer le système confessionnel du pays » et mettre en échec le projet « isolationniste ». Le PCL en arrivera à comprendre qu’il s’était engagé dans une guerre qui avait fini par être « absurde » et par prendre ses distances à l’égard du concept de « violence révolutionnaire ». Aujourd’hui, le PCL soutient que « le socialisme et la démocratie sont indissociables » et appelle au pluralisme politique et économique, sur le modèle du « capitalisme d’État » qui triomphe en Chine. On relèvera aussi, dans l’ouvrage, le chapitre de Samir Amin, qui se concentre sur l’expérience du Parti communiste en Égypte, ainsi que dans d’autres pays arabes. Un livre utile, desservi par une mauvaise distribution. Il n’est en vente, en effet, qu’à la librairie el-Bourj, ce qui souligne d’autant mieux le courage qu’il faut, de nos jours, pour s’entêter à être libraire. Fady NOUN

En librairie depuis quelques semaines, un ouvrage de Karim Mroué et de Samir Amin, Communiste dans le monde arabe. Issu d’une famille de dignitaires religieux du Liban-Sud, Karim Mroué a été secrétaire général adjoint du Parti communiste libanais (PCL), avant de s’occuper de la revue al-Tariq, tandis que Samir Amin, un Égyptien, est un économiste président du Forum du...